Incontournables
Where You Been

Where You Been

Dinosaur Jr.

par Brice Tollemer le 16 février 2010

Paru le 9 février 1993 (Blanco Y Negro/Sire Records)

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Est-ce que Dinosaur Jr. a concrètement permis l’avènement de Nirvana et plus globalement du grunge ? Non. La plupart des personnes qui ont aimé Kurt Cobain au début des années quatre-vingt dix n’avaient jamais entendu parler de Jay Mascis avant et n’ont jamais écouté ses disques par la suite. L’immense majorité de ce public n’était pas baigné par ce courant indépendant américain et n’était nullement préparé à ce nouveau type de son. En revanche, est-ce que Nirvana aurait vu le jour sans Dinosaur Jr. ? Probablement pas. Comme Hüsker Dü et Sonic Youth, le trio du Massachusets fait humblement partie (entre autres) de ces pères fondateurs du grunge. Enfin étymologiquement, excepté Mudhoney, personne ne l’a jamais vraiment été, grunge. Peut-être même que seuls les membres de Green River l’ont été. Ah non, quelle horreur, on trouve deux futurs membres de Pearl Jam. Bon, il faut compartimenter. Et c’est ainsi que l’intelligentsia rock hexagonale (qui est tellement brillante) se frotta la piche sur cette filiation indé-grunge pendant des années et continue encore aujourd’hui.

Alors finalement. Quelle a été la fabuleuse idée de Dinosaur Jr. lors de sa formation au cœur des années quatre-vingts ? De la guitare tout simplement. Encore et toujours. Comme idée, pour le moment, on n’a pas trouvé mieux. De la guitare de blanc pour les blancs. Un son de classe moyenne. Des complaintes de banlieues américaines. Des histoires d’amour vaguement passionnées ou destructrices. Un peu de drogue parfois. Des branleurs. Des slackers. Victimes collatérales de ces années Thatcher, de cette période Reagan, où le libéralisme économique était une valeur morale et l’argent une preuve suffisamment évidente de réussite. L’ennui et un ego gargantuesque, voilà ce qui motive Jay Mascis : « J’étais trop occupé avec moi-même pour pouvoir consacrer du temps aux autres. J’étais complètement isolé mais je n’avais pas le choix. Je pensais que tout le monde se sentait seul, je n’avais donc pas le moindre chagrin. Notre tranchant original vient de la frustration sexuelle. Pour nous défouler, nous avons monté ce groupe. C’était le seul moyen de tuer l’ennui. Je n’avais rien d’autre à faire, il me fallait une raison de bouger un peu. » [1]

Where You Been est le cinquième album studio du groupe. Le meilleur, difficile à dire. Honnêtement, il est assez rare que le cinquième disque soit le plus abouti d’une carrière. Tout ce qui a été dit sur Dinosaur Jr. l’a été excellemment évoqué dans Inside au cours de la chronique de leur premier album. Néanmoins, Where You Been est celui qui a obtenu le plus d’impact quand il est sorti. Un chant désenchanté, des solos de guitare, des cheveux longs. Neil Young. Voilà pourquoi on aime cet album. « Start Choppin’ », « Out There » ou bien encore « Goin’ Home ». On les aime, on les veut, on les écoute, elles nous bercent et nous rendent fous. Oui, le succès de ce disque est sûrement dû au contexte. En même temps, ce contexte, Jurassic Dark en avait été en quelque sorte son géniteur. Son maître. Son dieu. Where You Been est un juste retour de chose. La clé intemporelle d’une trappe enfouie et quelque peu farfelue. De la testostérone. Virez-moi vite toute cette merde de Gossip et de XX.



[1Mazzoleni F., Nirvana et le Grunge, Hors Collection, 2006.

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Tracklisting :
 
1. Out There (5:52)
2. Start Choppin’ (5:39)
3. What Else Is New (5:09)
4. On the Way (3:27)
5. Not the Same (6:00)
6. Get Me (5:50)
7. Drawerings (4:49)
8. Hide (4:11)
9. Goin’ Home (4:14)
10. I Ain’t Sayin’ (2:27)
 
Durée totale : 47:38