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mercredi 15 avril 2015
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par Emmanuel Chirache le 1er mai 2007
paru le 26 décembre 2006 (V2)
Paradoxal. Voilà ce qui vient immédiatement à l’esprit lorsqu’il s’agit d’évoquer les TTC. Encensés par la presse branchouille, ils adorent Britney Spears et rêvent de passer sur MTV. Considérés comme des rappeurs parodiques, ils revendiquent le premier degré. Chantres de la misogynie, ils attirent des filles splendides à chacun de leur concert. Obsédés sexuels, ils ont des touches de Français moyen. Appartenant à la minorité blanche qui fait du hip-hop en France, ce sont eux qui nous ont gratifiés du meilleur morceau de rap des années 2000 avec leur fabuleux Dans Le Club, hommage explicite au In Da Club de 50 Cent.
Au milieu de toutes ces contradictions, Teki Latex. Leader du groupe qui comprend également Tido Berman et Cuizinier, personnage singulier à la fois par son physique et ses opinions sans concessions (il se moque par exemple des prétentions littéraires des rappeurs français), le chanteur symbolise l’attachement français à l’underground au-delà même de ses déclarations d’intention provocatrices. Aux Etats-Unis, quand un Blanc fait du rap, il devient Eminem. En France, cela donne TTC, un objet musical confidentiel qui mêle rap, électro et pop, et qui ne ressemble au hip-hop américain qu’à travers la violence verbale avec laquelle ils parlent chacun du sexe et des femmes. A la première écoute, les textes sont d’ailleurs bien souvent hilarants. Mais à la longue, les références crues au sexe et le machisme hard peuvent hélas épuiser l’auditeur. Premier degré ou pas.
Petit échantillon drolatique et lourdingue, c’est selon : « Laisse-moi te farcir le derrière comme un ravioli, poli comme une boule de bowling je l’aime à la folie. » (Frotte Ton Cul Par Terre) « Claque tes fesses quand je claque des doigts, mouille tes lèvres quand tu parles de moi, tous tes ex ne font pas le poids. » (Quand Je Claque Des Doigts) « Pas la peine d’appeler je ne réponds pas au téléphone, je le regarde sonner et puis je pense aux dinosaures car les téléphones n’existaient pas encore à cette époque. [...] Désolé, mais j’en ai trouvé une plus belle, à côté d’elle tu as l’air d’une poubelle. Je m’en fous qu’elle se la ferme, à chaque fois qu’elle l’ouvre c’est pour dire de la merde. » (Téléphone)
La musique ? Téki Latex prétend qu’elle n’a qu’un intérêt mineur aujourd’hui à côté du style vestimentaire et du "fun". À l’aune de ces deux critères, les TTC seraient sans doute le meilleur groupe du monde. Leur dégaine assure (branchouille, on vous dit !) et pour ce qui est de s’amuser avec un maximum de meufs, on peut leur faire confiance. Seulement voilà, Téki Latex a tort de croire cela. Parce que sa musique n’est pas mal du tout non plus. Pour preuve, ce nouvel album aux sonorités un brin moins rebutantes pour le pékin lambda que Batards Sensibles, le précédent opus. Ainsi on appréciera les très bons Quand Je Claque Des Doigts, Paris, Paris, (Pas La Peine D’appeler Je Ne Réponds Pas Au) Téléphone, Travailler (à mon avis le meilleur titre) ou encore Frotte Ton Cul Par Terre. Rien de comparable toutefois à la force de Dans Le Club.
Pas rocks pour un sou, les TTC méritent qu’on s’attarde ici sur eux. Car ils ne sont ni Diam’s ni Jay-Z, mais une nouvelle monstruosité de la modernité musicale, une hybridation des genres, une vision pornographique des rapports hommes/femmes, une exception culturelle qui rêve de se fondre dans le mainstream anglo-saxon. Un truc de parigots ? Non, des mecs qui adorent les fringues et veulent se taper des gonzesses. Un peu rock quand même, alors.
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