Concerts
Bruce Springsteen & The E Street Band

Paris (Parc des Princes)

Bruce Springsteen & The E Street Band

Le 27 juin 2008

par Sylvain Golvet le 8 juillet 2008

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Des nombreux clichés qui courent sur Bruce Springsteen, certains sont vrais, d’autres faux, beaucoup en tout cas sont basés sur de vrais constats. Il paraît donc qu’assister à un concert du Boss est un événement exceptionnel, avec trois heures garanties de spectacle renversant. Il paraît aussi qu’on y sera entouré de fans gentils et dévoués, prêts à faire la fête dans la joie et la bonne humeur. On n’en doute pas un seul instant et il sera d’ailleurs prié à tous le monde de laisser à l’entrée tout cynisme ou mauvais esprit (ainsi que ses bouchons de bouteille), tant le maître-mot de ce soir sera, quitte à effrayer les plus durs à cuire, la sincérité ! C’est avec tout ça en tête que j’entre ce 27 juin dans un Parc Des Princes prêt à se remplir de près de 50 000 gentils fans venus pour Bruce Springsteen & The E Street Band.

Pas d’inutile première partie, c’est donc un peu avant 21h que l’équipe entre en scène, et, à quelques « Bonsoir Paris » près, enchaîne direct avec un Adam Raised A Cain de la grande époque, guitares acérés et chœurs bouillants. Il est clair que l’équipe n’a pas la fougue d’il y a 30 ans. Hormis le fait de jouer dans un stade aux conditions sonores forcément limitées (le son a une fâcheuse tendance à rebondir sur les obstacles qu’il rencontre), on sent bien que le E-Street Band est moins tranchant, moins explosif, plus pépère, disons-le. Cela correspond à l’évolution de la carrière du Boss et il faut dire que les albums suivants la reformation du gang en 1999 ont rarement été à la hauteur de ceux des débuts. Pourtant, les huit musiciens servent admirablement le maître de cérémonie de la soirée, et tous ont leur personnalité, leur apport à cette machine de guerre qui prend surtout tout son sens en public. Et même si la bande est handicapée par la disparition en avril dernier de Danny Federici, clavier depuis les débuts, c’est bien soudés et puissants qu’ils se présentent dans un Parc des Princes chauffé à bloc. Surtout, ils montrent leur maîtrise à tout moment, au gré des improvisations de leur Chef, jonglant avec les mesures ou ralentissant le tempo avec une fluidité déconcertante.

Car s’il y a quelqu’un qui ne semble pas ressentir les effets de l’âge, c’est bien le Boss. A presque 59 ans, il chante, hurle, sue, danse, court, glisse sur trois mètres sur les genoux et enchaîne les morceaux avec une facilité impressionnante. Et surtout, il joue avec le public, l’interpelle, le fait participer. Plusieurs fois, il plongera sa main dans le public pour y récupérer de nombreux cartons ornés de titres demandés par les fans et les ramènera sur scène pour piocher dedans quand l’envie lui en prendra.

Entre quelques extraits du récent Magic, c’est un enchaînement de classiques, The Promised Land, Spirit In The Night, Candy’s Room, Atlantic City, Darlington County, une première partie menée pied au plancher qui, bien que dénuée de gros tubes, enchante le public qui chante à l’unisson. Un palier d’intensité est même franchi avec Because The Night. Le titre co-écrit avec Patti Smith est l’occasion d’un formidable solo de guitare du discret Nils Lofgren, électrisant avec lui la foule entière. Une osmose poursuivie avec le formidable She’s The One mais surtout avec Mary’s Place. Cet hymne à la fête est l’occasion pour le Boss de convier tout le monde à danser, bouger et chanter, lui qui arpente l’avant-scène comme pour motiver ses troupes. Il est alors autant un chanteur rock qu’un performer soul voire presque un prêtre mais plutôt adepte du gospel que du chant de messe. Un rock n’ roll exorcism qui rappelle celui du Live in New York City de 2001.

La suite calme le jeu mais pas l’émotion. Seul au piano, Springsteen ressort un For You du fond des âges et tient en haleine avec ce long texte mêlant amour et hargne. Frisson dans la foule, de même qu’avec The River et la montée en puissance de The Rising. Le reste est moins marquant jusqu’à Badlands, dont le final repris par le stade entier accompagnera la sortie de scène du groupe.

Bien entendu, le rappel sera dément, avec Tenth Avenue Freeze Out mais surtout avec Born To Run, accompagné d’Elliott Murphy, qui confirme encore son statut de déluge rock’n’roll ultime. Même Dancing in The Dark (souvenez-vous de l’horrible clip de De Palma…) sonne impeccable et le tout se termine en danse irlandaise collective, sur American Land, ressortie des Seeger Sessions qui fourni l’occasion à tout le monde de communier, Vieille Europe et Nouveau Monde réunis. Ouf !

Bilan ? 2h50 de concert et jamais au grand jamais on ne ressentira une pointe de routine ou de spectacle millimétré. Comme à chaque fois, on aura assisté à un show unique - en témoigne la setlist, écrite à la main par le Boss lui-même (cf en bas de cet article), qui change tous les soirs, et laisse place aux envies du public. Tout ça sonne bien évidemment horriblement cliché, tant de joie accumulée et de bon esprit réuni ne peuvent qu’être surpris. Pourtant, c’est ce j’ai vécu ce soir, comme de nombreux autres sur cette tournée, en compagnie du ’’house-rockin’, pants-droppin’, earth-shakin’, hard-rockin’, booty-shakin’, love-makin’, heart-breakin’, soul-cryin’ and, yes, death-defyin’ legendary E Street Band’’ ! Pourquoi s’en priver ?

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La setlist de la main du Boss.


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Setlist :
 
Adam Raised A Cain
Radio Nowhere
No Surrender
The Promised Land
Spirit In The Night
Rendezvous
Candy’s Room
Atlantic City
Janey Don’t You Lose Heart
Darlington County
Because The Night
She’s The One
Livin’ In The Future
Mary’s Place
Fire
For You
The River
The Rising
Last To Die
Long Walk Home
Badlands
Out In The Street
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Girls In Their Summer Clothes
Tenth Avenue Freeze-Out
Born To Run
Bobby Jean
Dancing In The Dark
American Land
 
crédits photo : Jan Lundahl/Backstreets