Nouveautés
(He)art Coalition

(He)art Coalition

Jando

par Psymanu le 28 novembre 2005

3

LP paru en 2005 (autoproduit)

Diminuer la taille du texte Augmenter la taille du texte Imprimer l'article Envoyer l'article par mail

Jando nous vient d’Aquitaine, est originairement composé d’un mec qui sait tout faire (guitare, clavier, samples, chant, basse, djembe, excusez du peu) mais qui après deux albums autoproduits (Cyclove en 2003 et White Kaleidoscope Night en 2004) entre métal, jazz, et rock émo s’est laissé rejoindre par divers collaborateurs. Définir la musique de Jando relève du pari. Et la brochure ne m’aide pas vraiment, car le listing de leurs influences (en vrac : jazz, latines, électro, post-hardcore) donne mal à la tête à quiconque s’efforce d’imaginer le truc. On sent, de toute manière, la volonté affichée du groupe de ne se laisser enfermer dans aucune des inévitables étiquettes, forcément réductrices pour un groupe ambitieux, mais qui facilitent bien la tâche quand même au moment d’en parler. Alors il ne reste plus qu’à se laisser glisser le long de ce concept album en onze actes, car oui, mesdames messieurs, c’est un concept album.

« (He)art coalition est axé sur une quête, une aventure émotionnelle qui se développe de titre en titre. Celle-ci se veut à la croisée des chemins entre art, science, et sentiment ». « Cela parle de cosmos, de vie, de conscience et d’inconscience, de couleurs, de cris ; mais c’est avant tout une histoire d’amour avec l’inconnu, qui peut être représenté par un monde physique, un tableau onirique ou une femme ».
Ah, ok. Déjà ça ne rigole plus, et l’on est un peu nerveux parce que manifestement, il va falloir s’accrocher. Et là où la notice est vraiment pratique, c’est qu’elle m’explique chaque titre. Oui, un par un et en quelques mots, et c’est ainsi que je peux savoir de quoi ça parle. Pratique car la voix, hélas plutôt mal accentuée et parfois étouffée, est difficilement intelligible, d’autant plus que ça chante en anglais surtout, mais aussi en espagnol et en français. Les vocaux de Jando tantôt caressent et tantôt vocifèrent, partent dans les aigus, hoquettent, convulsent, nous la font à la... à la... à la beaucoup de monde ! Et c’est bien là un défaut de Jando, ce chant peut être un peu « convenu », trop dans l’air du temps... Concerné, intense, mais trop peu original, et dont les « on dirait machin » qui s’imposent à notre esprit truquent la donne, nous empêchent de mieux écouter de bouillonnement d’idée qu’est (He)art Coalition.

Car bouillonnement il y a. Jando ralentit, accélère, trépigne, apaise, hurle, susurre, on passe d’atmosphères planantes et de véritables lacérations métalliques. Ils savent tout faire et veulent le montrer. L’écueil, c’est le manque de cohérence. Car pour s’accrocher, l’auditeur a tout de même besoin d’un encrage, d’un fil à tirer. Et c’est peu de dire que cet album se démène à nous paumer dans cet océan de sons. Jando a pour habitude de projeter lors de ses concerts des images, en rapport avec leur univers. Elles participent de leur création. C’est peut être bien cela qui manque lors de la simple écoute du disque, pour sa compréhension.

Ouverture Boréale porte bien son nom. Les guitares sont aériennes, le chant aussi, un bip bip rappelant les vieux films de science fiction et on accompagne le groupe dans l’espace, dans l’immensité de l’univers qu’il veut nous faire explorer. Ensuite Big Ring, un morceau nerveux au refrain accrocheur, un peu punk, mais qui vire hardcore, tout en saturations. Puis, au milieu du titre, le groupe stoppe son propre élan, se refait contemplatif et redécolle. Pamphlet, la plage 3 vient donner la touche latine à l’ensemble. Lui non plus ne trouve pas le tempo, prend des accents de Mano Negra, puis file ailleurs, alterne les phases métals et narratives, une voix off. Ça parle « conscience sociale et morale », c’est très agréable mais les ruptures sont peut être encore trop brutes pour ne pas agacer. L’intro de Composer Action Sphere est quelque peu arabisante, c’est Sabrina qui rejoint Jando au micro. Une bien jolie voix qui plane au dessus de nappes de saturations. Rise Of Pure frappe direct, le chanteur rugit au milieu des guitares. C’est peut être le titre le plus efficace du disque. Even Even est un titre expérimental, à base de petits samples, une sorte de collage, de kaléidoscope, sur lequel est parlé un texte en français. Obscur, mais pas déplaisant. Un gazouillis de bébé et un piano nous acceuillent sur Reloading Mankind, on est dans une douceur que vient d’abord interrompre le champ écorché de Jando, puis un gros riff. Et l’on repart dans le hardcore, avec un petit intermède jazzy (quand je vous disais que c’est un album « compliqué »). Une chanson très sombre et pesante, finalement. Le climat se fait plus léger sur A Far Away Interpret, et toujours cette succession de « moments », ce refus de conserver une même direction au sein d’un même morceau, comme si un mec zappait en permanence d’une station de radio à une autre : les jolis sons se succèdent, mais comment les apprécier pleinement sans s’y attarder ? Rock’n Roll Declaration agit comme un rayon de soleil, car il porte plutôt bien son nom, mais... Seulement au début. Car il est totalement plombé par ces variations qui font la marque de fabrique de (He)art Coalition... Et qui empêchera toujours cet album d’être accessible au quidam et à la sauvette, puisque pour être apprécié il nécessite une immersion totale et une écoute sur la longueur. Impossible d’en extraire une pièce puisque hors ce disque elle n’aura plus aucun sens. Pourtant, Les Fins Étranges montre la capacité du groupe a être accrocheur, au même titre que le final, Mirror Constellation.

(He)art Coalition n’est pas un mauvais disque, loin de là. Mais persiste tout du long cet amer sentiment que l’on vient d’avantage d’assister à une démonstration émotionnelle et technique qu’à une œuvre bien assise, cohérente et mature. Jando gagnera à simplifier son propos, surtout lorsqu’il visera une densité équivalente ou supérieure à celle de cet album, dans le simple but de ne pas égarer son auditoire.



Répondre à cet article

modération a priori

Attention, votre message n'apparaîtra qu'après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom



Tracklisting :
 
1- Ouverture Boréale (1’56")
2- Big Ring (5’12")
3- Pamphlet (4’01")
4- Composer Action Sphere (4’12")
5- Rise Of Pure (4’32")
6- Even Even (1’43")
7- Reloading Mankind (5’25")
8- A Far Away Interpret (3’50")
9- Rock’n Roll Declaration (3’49")
10- Les Fins Étranges (3’59")
11- Mirror Constellation (4’16")
 
Durée totale : 43’00"