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par Fino le 25 mars 2008
Paru en novembre 1997 (Copper Records)
Génies méconnus de la pop anglaise, les Texans de Cotton Mather - qui tirent curieusement leur nom d’un prêtre particulièrement virulent lors du procès de la sorcière de Salem au XVIIe siècle – allaient réaliser le parfait remake de Rubber Soul, trois décennies plus tard. Initialement paru dans un épais anonymat en 1997, l’album tombe dans l’oreille d’un autre légendaire pillard des fab-four. Noel Gallagher pousse alors ses alter ego, clame à qui veut l’entendre que Kon Tiki est le meilleur album depuis la secousse originale de 1965, et embarque la petite troupe en tournée avec lui.
Les cyniques martelant que le talent ne fait en aucun cas le succès dans le petit monde musical auront, une fois encore, un seau d’eau à porter à leur moulin. Propulsés par la déferlante Oasis et l’éternel équilibre des Anglais entre nostalgie de la Beatlemania et recherche d’une nouvelle hype tous les deux mois, la bande de Robert Harrison voit alors son album réédité en Grande-Bretagne, et son tube My Before And After enfin diffusé à une échelle digne de ce nom.
Fidèles à l’adage appliqué à la lettre par Lennon-McCartney selon lequel une bonne chanson pop, lorsqu’entendue pour la première fois, doit donner à l’auditeur l’impression de la connaître, le quartet, avec ce second album, tisse quatorze étoffes relativement brèves aux mélodies d’un naturel confondant. Effets vocaux, production et suites d’accords sortent pour la plupart directement de la période à laquelle les Beatles allaient bifurquer, sans chercher à le masquer pour le moins du monde. A ce petit jeu, le très bref Animal Show Drinking Song et sa voix qui peine à se maintenir dans le juste introduit à la perfection cet étrange objet qu’est "Kon Tiki". Œuvre impeccable de pop psyché, l’album a trop bien réussi ce qu’il tentait pour se faire un trou là où l’underground US ne jurait que par le shoegazing et ses kilomètres de rail de pédales.
La réinterprétation d’un chef d’œuvre du genre, contrairement à la réaction instinctive, est très certainement un exercice des plus périlleux. C’est sans doute la raison pour laquelle les quelques fans qui sont parvenus au-delà du rejet d’un ersatz de plus sont littéralement tombés sous le charme de cette pop nostalgique s’évaporant en volutes hallucinées. Si les exemples, à l’image d’Autumn’s Birds ou de Homefront Cameo, sont légion, c’est paradoxalement le titre powerpop, anachronique, du lot, qui a porté l’album. My Before And After, avec, dans une moindre mesure, Camp Hill Rail Operator, reviennent dans les années 1990, et soutiennent le piano martelé chéri par McCartney par une section rythmique qui se fait un peu plus tapageuse.
Passé cette acmé, le groupe finit son passage en revue par trois perles sixties. Ils se permettent au passage un clin d’œil à l’influence que Dylan a eu sur la bande de Liverpool, avec une mélodie vocale lors des couplets de Vegetable Row qui pourrait faire penser à Like A Rolling Stone parmi tant d’autres. Nés à la mauvaise époque, dans le mauvais pays, et malgré l’étiquette V.I.P. de leur fan club, Cotton Mather allaient se séparer après avoir produit trois albums. A l’heure ou l’indie, américain en particulier, tête le sein psychédélque-sixties (The Dandy Warhols, qui allaient reprendre le flambeau avant qu’il ne s’éteigne, pour ne citer qu’eux), Kon Tiki, perdu entre deux générations, est l’exemple typique de l’album atemporel pourtant passé entre les mailles du filet. Quelle honte !
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