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Return To The Sea

Return To The Sea

Islands

par Kris le 20 juin 2006

4,5

paru le 9 mai 2006 (Rough Trade)

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Après un seul et unique album Who Will Cut Our Hair When We’re Gone, The Unicorns décidaient de se séparer. Un an plus tard, deux des trois ex-Unicorns Nick Diamonds (de son vrai nom Nicholas Thorburn) et le batteur J’aime Tambeur (Jaime Thompson) fondent un nouveau groupe : Islands. Les Unicorns qui avaient connu un succès tardif arrivant après la séparation du groupe, avaient ainsi droit à une sorte de renaissance au sein d’Islands. C’est dire si l’ex-nouveau groupe montréalais était attendu au tournant en 2006 avec comme prédécesseur l’unique perle qu’est le seul album des défunts Unicorns.

Cependant, à trop vouloir comparer Unicorns et Islands, Diamonds et Tambeur se heurtent à leur propre glorieux récent passé. Si Who Will Cut Our Hair When We’re Gone était une pépite brute de décoffrage, un diamant à dégrossir pour en saisir le parfait joyau, Islands livre un Return To The Sea différent de ce qu’a pu faire les Unicorns. On y retrouve certes la même verve, la même voix forcément celle de Nick Diamonds, le même semblant d’univers. Cependant, l’approche artistique d’Islands est bien distincte de celle qu’avait les Unicorns. Islands semble travailler beaucoup plus la structure de leurs chansons, ne laissant presque rien au hasard, partant ainsi d’une base solide pour faire se libérer leurs chansons et leur faire prendre une envergure rêvée. Preuve en est le titre d’ouverture. Swans (Life After Death) est une petite bombe, une démonstration improbable et d’une efficacité à toute épreuve. Quelle audace et quel culot de mettre un titre de plus de neuf minutes en ouverture d’album ! Des titres aussi longs nécessitent généralement une mise en ambiance, un petit trempage des pieds pour prendre la température avant de plonger dans le grand bain. Mais avec un titre de la qualité de Swans, on plonge d’instinct, la tête la première et on en redemande forcément. Une montée en puissance, une mélodie et des harmonies à couper le souffle, Islands nous sort d’entrée le grand jeu avec un morceau d’une maîtrise folle qui nous tient en haleine pendant près de dix minutes, les envolées se font discrètes mais insidieuses, l’ambiance se révèle doucement et fait s’égrener les minutes comme des secondes.

Les îles d’Islands se font soudainement ressentir au loin à mesure que les titres s’enchaînent. Les influences exotiques s’expriment sur les chansonnettes aux allures d’hymnes taillées XXL que sont Don’t Call Me Whitney, Bobby légère à souhait, croquante et mordante sous le palais, et Rough Gem qui comme son nom l’indique est un joyau dur, une joyeuseté à l’état pur, une excentricité à liberté maîtrisée, avec des chants enjoués, des instrumentations dansantes. En contrepoids, le lest est accroché avec des titres un peu plus lourds, consistants et ancrés, moins frivoles. On pourra y citer le très beau Humans, s’approchant de la musique de fanfare ou bien Tsuxiit, unique morceau instrumental de l’album, très nature, titre duquel se dégage une atmosphère exotique, enivrante et pacifique. Cela ne nous surprend qu’à moitié de savoir que des membres d’Arcade Fire ont joué sur ce titre. Une surprise comme seuls pouvaient nous en concocter Islands, un titre hip-hop vient se glisser sur Return To The Sea. Where There’s A Will There’s A Whalebone bénéficie de la participation du MC Busdriver, figure importante de la scène hip-hop US, et donne une force inouïe à ce titre grâce à son flow surpuissant.

Surprenant de bout en bout, Return To The Sea se révèle d’autant plus addictif qu’on parvient à dégager une fascinante légèreté, voire une facilité à rendre leurs chansons attachantes. À ne pas comparer avec Arcade Fire - comme y ont droit tous les nouveaux groupes venant du Canada - Islands ne fait pas dans le grandiloquent et ne va pas puiser sa force dans une profondeur et une polysémie musicale déroutante, Return To The Sea est direct et progressif, happant l’intérêt par ses structures musicales ultra-travaillées et d’où les explosions ne se font que d’autant plus percutantes quand elles sont maîtrisées. Comme l’indique très bien le titre Swans (Life After Death), les Unicorns morts, la vie après la mort prend donc la forme d’îles lointaines, attrayantes et incroyablement riches. Une fois qu’on a goûté aux Islands, il semblerait bien qu’on ait du mal à s’en passer... Parfois, c’est dur la vie.



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Tracklisting :
 
1. Swans (Life After Death) (9’32")
2. Humans (4’59")
3. Don’t Call Me Whitney, Bobby (2’32")
4. Rough Gem (3’36")
5. Tsuxiit (3’05")
6. Where There’s A Will There’s A Whalebone (3’57")
7. Jogging Gorgeous Summer (2’47")
8. Volcanoes (5’27")
9. If (4’33")
10. Ones (6’11")
11. Buckie Little Wing (16’20")
 
Durée totale : 62’59"