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mercredi 15 avril 2015
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par Kris le 17 octobre 2006
paru le 26 juillet 2006 (Sub Pop)
Le grunge n’est donc pas encore mort. Quelques irréductibles musiciens se bornent à tenir l’étendard de ce genre que l’on croyait fini et daté dans le temps comme le punk, le rockabilly ou le disco. Et pourtant... Mudhoney reprend du poil de la bête, comme à la belle époque. Rendu populaire grâce à leur énorme succès Touch Me I’m Sick, Mudhoney a vécu, a expérimenté de nouveaux horizons, s’est frotté à quelques excentricités, mais finalement est toujours revenu à ce à quoi il était le plus doué, le grunge. D’albums moyens à des pics d’egos retrouvés lors de trop rares illuminations laissant entrevoir un passé glorieux, les Américains de Seattle se faisaient un peu oublier, faisant de la musique pour eux.
Ils semblent tenir un bon rythme avec la sortie d’un album tous les quatre ans les bons gars. Avec Tomorrow Hit Today sorti en 1998, Here Comes Sickness en 2002, l’opus de cette année était donc promis. Under A Billion Suns ne surprend pas, mais il fait plaisir. On retrouve les Mudhoney tels qu’on les souhaitait dans un coin de notre tête, cette rage fatidique, comme s’ils s’engageaient dans un combat face à l’apocalypse. Les guitares fusionnent avec les engrangements des pédales fuzz grinçant à foison. Mark Arm se veut plus létale que jamais, puisant dans cette voix provenant d’un au-delà féroce, il insuffle cette puissance nonchalante additionnée à cette sonorité souterraine et cuivrée. Let’s Drop In est vénéneuse et insidieuse tant son rythme lent et grave grappille ses galons, crache les fruits de son larcin instinctif. Mudhoney cueille aussi du côté du blues-rock, tendant vers une mouture free-jazz musclée qui se fait moins prétentieux que Jon Spencer, mais non moins efficace comme sur I Saw The Light.
L’identité Mudhoney s’affiche clairement au fur et à mesure de ce Under A Billion Suns, mais laisse aussi filer quelques imperfections qui ont toujours été. Des chansons qui n’ont parfois pas de sens, des structures musicales distordues qui ne mènent nulle part. Cela a souvent été dans le passé le point faible de Mudhoney, cette incapacité à suivre une ligne, une cohérence notable au sein d’un même titre. Car si les Melvins ou Nirvana ont su conquérir cette scène grunge et marquer leurs noms au Panthéon, Mudhoney resteront probablement pour toujours les éternels laissés-pour-compte de cette scène mythique. Le départ de Matt Lukin, bassiste ex-Melvins et co-fondateur de Mudhoney avec Mark Arm, a laissé quelques traces en 2002, mais le groupe a quand même su garder un certain savoir-faire, même si celui-ci ne suffira pas à les faire rentrer dans la grande mémoire collective aux côtés de ces grands noms du grunge.
Certaines chansons laissent quand même présager mieux qu’un simple passage aux oubliettes de l’Histoire, déjà bien remplies, pour les Américains. Endless Yesterday par exemple, qui est une superbe ballade rock, où la voix de Mark Arm sonne comme celle de Michael Stipe. Car Mudhoney possède tout de même cette grande sensibilité virile, cette fatalité et cette faille visible du grand colosse à guitares. Ils savent même faire du rock moderne, presque post-rock, mais pas trop, comme On The Move ou sur Empty Shells, pour prouver aux petits jeunes que les dinosaures ne sont pas tous éteints. Il s’agit d’un très bon album des vétérans, Under A Billion Suns aurait pu être ridicule, comme le dernier album des feu New York Dolls, ce n’est pas le cas. Mudhoney nous a prouvé que c’est encore bien dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.
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