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par Frédéric Rieunier le 27 octobre 2008
Avec un Y comme dans "yaourt", Yoanna est une petite Suisse dont le côté acidulé provoque des sensations pourtant peu communes avec ce produit laitier. Elle présente d’ailleurs sa musique comme le mariage improbable entre Yvette Horner et les Béruriers Noirs, ses chansons comme les rejetons d’une union contre nature entre Antisocial et Tout le bonheur du monde. Si une telle description a de quoi rendre sceptique, on est rapidement rassurés, face à la personnalité facétieuse et le caractère bien trempé de cette chanteuse et accordéoniste.
A peine entrée en scène, la demoiselle démarre avec Ma plume, dont les mots et les harmonies conjuguent simplicité et efficacité pour décrire ses amours et névroses. Entrée en matière réussie, elle poursuit avec Roi pirate, aux airs d’accordéon marins qui laissent croire un instant à l’auditeur qu’une mouette pourrait bien faire son apparition au milieu de la salle des fêtes de la mairie de Gentilly, où se déroule ce volet du FestiVal-de-Marne.
« A la demande générale, une chanson sur l’avortement ! » L’explication de texte est bienvenue puisque le texte de Funambule a de forts accents sibyllins. Sa mélancolie et ses derniers mots révèlent ainsi tout leur sens : « Sur le fil de la vie attendue, il y a la mort qui se suspend ». S’ensuit La crise du logement, où, admirablement, Yoanna fait contre mauvaise fortune bon cœur et transforme le regard désabusé qu’elle porte sur sa vie en « grand ménage de printemps ». Puis c’est à l’égalité des sexes que s’intéresse la chanteuse - dans une chanson baptisée fort à propos Toutes des salopes ! -, en dressant le bilan de la libération sexuelle tout en constatant qu’il reste à faire pour mettre à bas les derniers vestiges de phallocratie.
Vient alors le moment tant attendu de la reprise par la chanteuse et ses musiciens (à savoir une violoncelliste de talent et un percussionniste à l’étonnante polyvalence) de ce grand de la chanson française que fut Renaud durant tant d’années. La jeune femme s’avance sur le bord de la scène, toujours munie de son accordéon, suivie par ses acolytes qui délaissent provisoirement leurs instruments. Lorsque Yoanna entame avec emphase « J’veux qu’mes chansons soient des caresses ou bien des poings dans la gueule... », une grande partie du public reconnaît Où c’est qu’j’ai mis mon flingue. Dont le titre en forme de ritournelle est déclamé burlesquement par ses deux comparses, d’une voix fluette, bouches en cul-de-poule.
Puis la Suisse saute de la scène et, fendant la foule sans manières, gagne le fond de la salle avant de monter sur le zinc de la buvette. Sa voix grave et assurée entonne alors une Fleur dont les beaux pétales sont autant d’épines contre la brutalité égoïste dont font preuve certains hommes dans l’étreinte. « Réveille-toi. Ouvre tes yeux et soigne tes plaies du mieux que tu peux. Trouve ton courage. Arrache-toi ! Car il te tue du bout des doigts. Réveille-toi ! » Au-dessus d’elle, une lampe avec une grosse ampoule émet une lumière jaunâtre. On pense aux concerts des Têtes Raides, lorsque le groupe chante Ginette. On sourit. Pour se quitter sur une note plus gaie, Yoanna se lance dans La maladie. Qui est véritablement plus joyeuse, puisqu’elle y décrit son addiction bien vénielle pour les garçons et y dresse la liste des détails qui la font craquer et la poussent aux temps chauds à rechercher leur compagnie. Une raison de plus de s’impatienter du retour de l’été...
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