Concerts
Dead Can Dance

Paris (Zénith)

Dead Can Dance

Le 30 juin 2013

par La Pèdre le 1er août 2013

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Au parc de la Villette, dans l’écheveau des allées, des percussions africaines étourdissent l’atmosphère du jour le plus ennuyeux de la semaine. Et à coté de ces noirs frivoles se pressent des dandys ratés, des lovecraftiens à cheveux longs, des baroudeurs gothiques, des fiers rockers homosexuels semblables à Etienne Daho, puis des gens encore plus normaux. Voilà le public de Dead Can Dance qui attend l’ouverture du Temple du Soleil. La cène exceptionnelle se déroule pour plus d’ampleur au Zénith cet été, après un passage complet au Rex l’année dernière – et on ne rate pas un groupe si parcimonieux. En effet, la salle, pleinement jonchée de strapontins, est comble, les disciples se tenant là assis, impatients mais affables. David Kuckhermann, drôle de bougre, percussionniste sur tout (son site explicite : Cajon, Riq, Hang, Udu) tient la première partie, et de sa main sure, explore des sonorités (what else ?) ésotériques - évidemment, le public, d’une bravoure olympienne, l’applaudit tranquillement. Peut-être n’est-il pas nécessaire de revenir dessus, mais on se demandera patiemment pourquoi le personnel technique du Zénith a étendu les gradins jusqu’à l’extrême de l’aile droite : les chanceux qui se sont vus attribuer ces places ont pu admirer les délicates broderies du rideau masquant la scène. Loin de toute forfanterie, le cortège Dead Can Dance arrive dans une atmosphère de concerto avec l’assurance et la modestie d’artistes distingués, et bien sur, en tête de file, la reine et le roi.

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Le concert s’ouvre dans la procession du solennel Children of the Sun, avec à la fin ses cuivres aveuglants. Le groupe s’applique immédiatement avec le plus grand respect de la musique et s’affaire comme dans un petit rituel : lorsque Lisa Gerrard laisse la voix à Brendan Perry, elle recule dans l’ombre avec une ténue impériale jouer du yangqin ou du dulcimer. Lisa Gerrard d’ailleurs, d’une beauté pâle et inaltérable, est vêtue d’une longue robe de velours bleu cobalt, d’une cape fixée à une couronne incrustée de pierres et coiffée d’un haut chignon, sans que cela ne paraisse comique à aucun moment, bien au contraire. Car lorsqu’elle pousse sa voix, le regard lointain et dévot, on ne peut que s’émerveiller de sa grâce flottante : femme d’essence divine, le chant ne trahit chez elle aucun effort. En revanche, loin sont les années où Brendan Perry pouvait exhiber son cheveu cavalier et ses yeux clairs, car désormais, avec le crâne galbe, l’air buriné et rougi, il se présente à nous avec l’allure d’un écrivain russe séculaire. Sur scène encore plus que sur disque, Perry est décidément la moitié suave et terrienne du groupe, tant l’on voit sur son visage passer l’ivresse et le tourment. Il est aisé, dans ce bal solaire et mystérieux, d’imaginer la fidélité du public. Des gens se lèvent même et parcourent la salle d’un pas chamanique et habité, obéissant à la magie impérieuse que le groupe prodigue. Alors certes, dans la chaleur d’un Zénith conquis, on se dissipe un peu et l’écoute n’est pas constamment pleine de la ferveur requise. Surtout la setlist promotionnelle focalisée sur le dernier album Anastasis ne favorise pas toujours l’enthousiasme propre à l’écoute des classiques. Alors lorsque le groupe part une première fois de scène, les fidèles peuvent être sceptiques, n’ayant pas le sentiment d’avoir entendu les cantiques légitimes.

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Mais Dead Can Dance est plein d’une honnêteté aristocratique. Le rappel sera alors souverain : avec les fouettages orientaux de The Ubiquitous Mr. Lovegroove, le public commence timidement à descendre de ces strapontins fastidieux. C’était sans compter les années qui passent, Gerrard revient sur scène chantant Happy Birthday to You à Perry, visiblement ému (54 ans, comme Robert Smith, Morrissey ou Pascal Légitimus). Le groupe s’attaque alors enfin au cœur, et tout le monde se retrouve debout sous les devins. Dreams Made Flesh, Song of the Siren (on n’y coupe pas), pour l’émotion vulnérable de toutes ces âmes sincères. Et ce sera sur la marche celtique Return Of The She-King que le groupe s’en ira. On aurait voulu en entendre plus, mais l’important était ce soir là d’être tous ensemble.



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Setlist :
Children of the Sun
Agape
Rakim
Kiko
Amnesia
Sanvean
Black Sun
Nierika
Opium
The Host of Seraphim
Ime Prezakias
Cantara
All in Good Time
Rappel :
The Ubiquitous Mr. Lovegrove
Happy Birthday to You
Dreams Made Flesh (This Mortal Coil)
Song to the Siren (Tim Buckley)
Return of the She-King