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par Giom le 29 septembre 2008
Paru en septembre 2005 (première édition en 1996) (Universal/Island Records)
Alors celle-là, on ne s’y attendait pas ! Voir le premier LP de DJ Shadow panthéonisé par Universal avec cette édition « deluxe », au même titre que Cream ou Marvin Gaye, on peut dire que ça fait bizarre. Il faut dire qu’en plein milieu des années 90, la parution d’Entroducing... a représenté un événement esthétique important dans l’histoire de la musique populaire. L’abstract hip-hop trouvait alors ses lettres de noblesse avec ce disque, acquérant ainsi une crédibilité artistique et faisant pousser une nouvelle branche à l’arbre de la musique électronique.
Comme l’explique la très intéressante introduction au disque d’Eliot Wilder qui se trouve dans le livret de l’ édition « deluxe », on peut tout à fait remonter à la notion de postmodernisme en art pour analyser le travail de DJ Shadow puisque celui-ci s’est chargé d’apporter à la musique populaire une esthétique de la fragmentation, du collage et du découpage qu’avaient déjà importé dans leurs arts respectifs des gens comme l’écrivain Dos Passos ou encore Andy Warhol. Avec Shadow, notons aussi la volonté redondante de l’artiste dans le choix de son pseudonyme de s’effacer derrière sa musique, le matériau musical trouve son originalité dans le mélange des genres préexistants. L’artiste n’est plus un créateur mais quelqu’un qui regroupe les éléments, qui les met en relation de façon brillante et inattendue. Ça n’a pas l’air comme ça mais c’est vraiment novateur et le résultat, sur Entroducing..., provoque chez l’auditeur une palette d’émotions extrêmement étendue. Shadow construit son disque tout seul avec sa platine et sa (sûrement) monstrueuse collection de disque. Les univers se multiplient, se répondent, orchestrés par un démurge de l’ombre. Une nouvelle façon de faire de la musique est inventée et deviendra école. Nombreux seront alors les DJs qui s’engouffreront dans le sillage de l’abstract hip-hop popularisé par le Californien, mais rarement avec le même bonheur.
Entroducing... est bien en cela un disque incontournable et on peut se demander si cette réédition ne participe pas à la récupération de son auteur par l’académisme de l’industrie musicale. Mais, comme d’habitude avec ces éditions « deluxe », nous sommes bien obligés de ne pas bouder notre plaisir tant la qualité du produit est, comme à chaque fois, exceptionnelle. La deuxième galette, sobrement intitulée « Excessive Ephemera » présente de véritables pépites tournant autour de l’univers de l’album : versions alternatives, démos, remixes, on a même le droit au début à quelques phrases du maître sur sa façon de composer !. Le tout se concluant par un extrait d’un concert à Oxford d’octobre 1997 qui montre à quel point la musique de Shadow est vivante, jamais figée et toujours en renouvellement. Comme il le dit lui-même, chacune de ses compositions permet « de commencer un voyage. On en revient toujours après avoir expérimenté quelque chose, en avoir tiré profit ». C’est bien vrai mais on aimerait bien maintenant expérimenter d’autres choses avec un nouvel album ! C’est bien beau les rééditions mais ça a un côté frustrant quand ça concerne un artiste encore en activité.
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