Ne vous laissez pas tromper par cette pochette qui au loin a un léger air de Chocolate Starfish de Limp Bizkit, et dont la noirceur additionné au nom du groupe peut faire penser à un contenu proche de Motörhead. Surprise. Point du tout. Rien de tout cela, Okkervil River sonne folk, sonne authentique, sonne sobre et surtout, sonne juste. Témoignage corrosif d’un songwriter talentueux et sentimentalement maladif, Black Sheep Boy est l’œuvre de Will Sheff évoluant également dans le groupe Shearwater. Remuant et overbooké artiste, Will Sheff a grandi dans cette branche de songwriter dont l’univers obsessif est dépeint de manière diluée dans ses chansons. D’une folk-country enjouée et enluminée, Okkervil River nous ballade au gré de vagues popeuses à souhait. Non content d’un Black Sheep Boy sorti l’an dernier, les Texans nous offre un appendix en cadeau, soit une réédition de l’album originel. On se régale.

Comme un Elliott Smith sous la houlette de Eels, Will Sheff à la tête d’Okkervil River déglutit sa musique de ses tripes les plus profondes et les plus sincères soutenu par le non moins méritant Jonathan Meiburg. L’effort consenti est considérable si l’on prête attention au travail effectué par le groupe américain. Musique et ambiance séminales, tout cela se ressent et s’égrène au sein de Black Sheep Boy. Cette sincérité et cette sensibilité à fleur de peau se dégage au travers de titres tout en retenue comme In A Radio Song ou A Glow qui montrent ce côté dépréciatif de la musique. Intransigeant travailleur, Will Sheff dirige ce quator texan d’Okkervil River comme un petit chef, prêtant sa voix et ses talents de songwriting pour délivrer cet esprit ombragé et habité. Mention spéciale pour Another Radio Song, époustouflante chanson de bout en bout.

Petite pépite brut folk, Black Sheep Boy est un album attachant par ce côté non tapageur, absolument pas m’as-tu-vu, ce qui demeure rare de nos jours. On pense à Sparklehorse par exemple. Sobriété et efficacité. Okkervil River parvient à créer un amalgame entre une rage contenue et un talent imposant qui parvient à poser les bases mêmes d’un art sûr de soi, mais sans prétention. Des titres comme The Latest Toughs ou Black montrent également qu’Okkervil River savent piétiner les plates-bandes des Shins ou de Wilco. Il s’agit d’un bien bel album raffiné, sophistiqué mais qui ne perds rien en directivité ou en efficacité. On en redemenderait presque malgré le CD en plus... On ose ?