Dernière publication :
mercredi 15 avril 2015
par mot-clé
par index
par Sylvain Golvet le 2 mars 2010
sorti le 7 avril 2004 (Bac Films/Wild Side Vidéo)
Le film de Jim Jarmusch est en fait une collection de sketchs réalisés à des périodes différentes depuis 1986. Le premier segment de ce film, Strange To Meet You avec Roberto Benigni, était au départ une commande du Saturday Night Live. Reprenant l’idée à son compte, Jarmusch se met en tête de poursuivre l’expérience au gré de ses envies (et de son emploi du temps). Et sans que cela soit prévu au départ, Coffee And Cigarettes deviendra donc un film d’une heure et demi, sortant sur les écrans en 2004.
Le principe est simple : deux ou trois personnes, qui se connaissent ou non, discutent de choses et d’autres autour d’une tasse de café et d’une cigarette. On sent d’abord dans ce dispositif l’envie de Jarmusch de réunir ses acteurs fétiches et amis afin de s’amuser autour du plaisir de jouer et d’écrire, sans autre prétention. On y trouve donc Roberto Benigni, aperçu dans Down By Law, Bill Murray dans Broken Flowers, Iggy Pop dans Dead Man, etc... Mais il y aussi des petits nouveaux dans l’univers Jarmuschien, comme les White Stripes ou Cate Blanchet.
Sur un système binaire (le noir et blanc, les motifs quadrillés, le duo, les jumeaux, ...), Jarmusch se sert de l’institution occidentale du café-clope pour parler de la communication entre les gens. Souvent prétexte à se réunir, le café-clope sert ici souvent à meubler un trou, à s’occuper les mains, à faire passer un malaise. Car, Jarmusch sait qu’un bon dialogue comique tient d’un quiproquo de départ. On assiste donc la plupart du temps à des dialogues de sourd, où personne ne semble se comprendre. En fait, la vision des relations entre les hommes qu’en tire le réalisateur est assez pessimiste. Les gens sont soit gênés, fâchés, ne savent pas quoi se dire. Ils préfèrent même se retrouver seuls, comme dans Renée. En fait, les gens ne se parlent vraiment, ils comblent juste le vide leur existence, tout en gardant cette façade polie. Isaac de Bankolé va même jusqu’à forcer Alex Descas à se créer un problème pour justifier le fait qu’il ait appelé. Pourtant, Jim Jarmusch privilégie plutôt le côté cocasse des dialogues et laisse juste flotter cette vision mélancolique, notamment dans le dernier sketch où un homme se laisse mourir après son dernier café.
Le recueil de sketch accuse bien sûr le coup inhérent au genre, qui, même si le concept est le même, ne peut être qu’inégal. Du coup, certains sketchs paraissent moins poussés que les autres, même s’ils se regardent sans déplaisir. Mais le film contient son lot de passages savoureux. Il faut voir Alfred Molina (Dead Man, Spiderman 2, ...) essayer de convaincre Steve Coogan (24 Hour Party People et heu...Le Tour Du Monde En 80 Jours...) d’être son ami sous prétexte qu’ils sont arrière-cousin. (Steve Coogan lui demande même : « Tu n’es pas gay quand même ? ») Cate Blanchett nous dévoile tous ses talents de comédienne dans Cousins où elle joue à la fois une actrice guindée et une rockeuse fauchée. Mais le meilleur sketch à mon goût nous offre une confrontation de légendes vivantes du rock Iggy Pop et Tom Waits. Ce dernier y explique qu’il mène de front une carrière de musicien et de médecin (« Musique et médecine, c’est vraiment ma vie... Combiner les deux... »). Iggy se fait remettre à sa place quand il propose un nouveau batteur à Tom. En tout cas ce dernier sort vainqueur de ce combat (verbal) de légende. Pour se faire excuser, Jarmusch laisse Iggy conclure avec sa version de Louie Louie pendant le générique. En tout cas, ce sketch a déjà eu sa petite carrière puisqu’il a obtenu en 1993 la Palme d’Or du meilleur court-métrage au Festival de Cannes.
Ah, au fait, les non-fumeurs adeptes du thé vert peuvent aussi voir ce film...
Répondre à cet article
Suivre les commentaires : |