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La galère des festivaliers

La galère des festivaliers

par Milner le 10 juillet 2005

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Le mois de juillet a quelque chose d’égoïste puisque pour les vacanciers qui se respectent, tout le monde travaille sauf eux. C’est également pour d’autres la saison des résultats d’examens en tous genres qui provoquent dès lors un soulagement intense : tout cela est derrière nous désormais. On respire profondément. Les journées sont claires, belles et longues. Quoi de mieux que de profiter de la lumière et de la chaleur comme festivalier parmis les nombreux choix proposés à travers tout l’Hexagone, voire le Continent ?

Car, il s’agit de ne pas se tromper. Lorsqu’un festival se présente sous une forme « 3 jours en dehors du temps », attendez-vous à perdre patience et à regarder votre montre tous les quarts d’heure. Entre fausses promesses et programmation bidon, le festivalier finira de toutes façons par échouer au bar. Après tout, c’est bien connu, plus un concert commence tôt, plus les gens se pressent à la dernière minute pour apercevoir une once de leur chanteur préféré du moment. Et là, le problème se pose : l’organisation repousse tout le monde à deux kilomètres minimum du site sur cinq parkings différents dont un, qu‘un agriculteur n‘est visiblement pas allé nettoyer trois jours avant puisqu‘on se serait cru au Paris-Dakar pour accéder à ses fins. Une seule solution : prendre son courage à deux pieds et marcher, marcher, marcher.

Oh là là, c’que c’est long de marcher vingt minutes sous une chaleur à vous transformer en écrevisse avec toute votre maison sur le dos... Arrive enfin sur le site avec une demi-heure de retard, parce qu’un enfoiré de mec de la sécurité m’a empêché de me rapprocher du seul camping de la ville avec mon auto. Je m’installe aux abords de la Grande Scène (qui est en fait aussi grande qu’une âme de Premier Ministre). L’espace concert est bourré de gosses, très jeunes. Evidemment, ce qui m’intéresse passe seulement en dernière partie de soirée. L’ambiance est suranné. Le premier artiste de la journée fait un petit signe de la main, genre « Hou ! Hou ! » et se met son public dans la poche après avoir annoncé que tous les concerts qu’il avait fait auparavant n’étaient rien en comparaison avec ce qu’il vit en ce moment. Enfin, je n’ai rien contre les présentations « est-ce que ça va bien, en veux-tu, en voilà », mais il y a des moments en 2005 où la fiction commence à déraper devant la réalité. Jugez-en par vous-même : « Si on vous dit qu’ici c’est comme une deuxième maison, qu’est-ce que ça vous fait ? ». La question grave, spéciale chaumière, club des plus de cinquante ans. Silence. Eh tac ! La vraie gaffe en technicolor. L’artiste patauge, s’accroche tant bien que mal par la suite à tout ce qui le caractérise musicalement mais tout cela morne, policé, statique. Une véritable berezina.

Enfin, c’est l’heure de ma tête d’affiche, un groupe qui ne tourne plus aussi souvent en France qu’auparavant mais qui assure un spectacle permanent. Dès les premières notes de basse claquées, je m’agglutine vers la scène, histoire de bien me rendre compte du truc. Tout d’un coup, une horde d’ados drapés de T-shirts à slogan détourné me bousculent et secouent leurs bières et leurs bobs pour mieux me gâcher le spectacle. J’aurai décidément tout connu ce jour-là... Coincé derrière un girafon pendant deux bonnes heures, la vision du spectacle m’échappe et je dois me rabattre sur un des deux écrans géants qui ornent la scène. Un solo de batterie, un rappel et puis s’en va, circulez, y’a plus rien à voir... 2 heures du mat‘, c’est fini. Le groupe passe par derrière, il sort par les coulisses. Et tout le monde se pince pour faire comme si on frôlait l’émeute. Les videurs jouent les mecs à la redresse en pure perte. Tout le monde s’étend du côté des buvettes pour se mettre une tête comme c’est pas permis ! A 5 heures, en retournant au camping, les cadavres se ramassent à la pelle le long de la route mais les brigades de gendarmerie qui patrouillent ne changeront rien ; le mot d’ordre est : « Tous défoncés, tous allongés ». Arrivé au campement, impossible de dormir, les hystériques qui ont organisés une contre-fête aux allures de rave party dans le champ voisin prennent du bon temps (et ils ont raison). Mais tout de même, 5 heures...

Le lendemain, pas une minute à perdre. Il est temps de rentrer chez soi car le trajet est long et car le quotidien doit reprendre. Une fois à la maison, tape mon rapport en forçant sur la vodka, téléphone à des collègues festivaliers en leur disant de se tenir prêts à tout et surtout, je me décide à envoyer ces notes à la publication seulement à la fin de la semaine, pour peu qu‘une nouvelle mésaventure réapparaisse dans mon cerveau encore tout troublé.



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