L’introduction fait peur. Au sens propre du terme : un rythme tribal paniquant s’accélère, fond d’une musique dissonante. Fort heureusement, cette electro horrifique ne durera que l’espace de Post-Present. Se met alors en place la fabuleuse atmosphère de More Deep Cuts, second album des Californiens de Thee More Shallows (Chavo Faster, Jason Gonzales et Dee Kesler). Des morceaux pesants, à l’image de la lente progression de Pre-Present, épais nuage s’élevant puis retombant. On pense immédiatement à Air ; on se laisse porter.

L’inquiétante ouverture au violon qui suit préfigure ce qui s’apparenterait aux meilleures minutes de cet excellent album (Freshman Thesis). La guitare s’entête sur les trois mêmes notes envoûtantes, avant d’annoncer l’apocalypse, sur fond de fines nappes sonores. Les accords délicats du premier interlude font retomber la tension, avant que Ave Grave ne rappelle étrangement le regretté Elliott Smith, tant dans le chant mélancolique que dans l’accompagnement faussement léger le soulignant. Alors que l’album poursuit son éclectisme (l’intermède Cold Dis), le deuxième tiers de l’album (le disque se divise en trois mouvements) s’achève sur le sombre Coisterphobia et sur un 2 AM aux accents trip-hop, alors que le chant paraît de plus en plus ensorcelant.

Sorti de ce virage sinueux, la dernière ligne droite se découvre sur des accents tristes et langoureux (Walk Of Shame). Malgré cette indéniable accélération de rythme, l’étrange sensation de malaise ressentie depuis le premier morceau démonique persiste. Le chuchotement de Ask Me About Jon Stross fait revenir doucement à la réalité. La fermeture est absolument magnifique ; on se prend à contempler cette lente marche, s’approchant inéluctablement de l’issue que sera House Break. On se plait alors à boire avidement les dernières gouttes de paroles que délivrent les trois musiciens.