Rien ne ressemble plus à un concert de Primal Scream que sa discographie. Qu’est-ce que c’est que cette introduction à la con, me direz-vous. Et pourtant, toute modestie sous le tapis, elle reste significative lorsque l’on connaît les avatars versatiles de la musique de ce groupe, passant (combien de fois l’a-t-on lu ?) d’un blues-rock néo-stonien à de l’electro-dub viscéral. C’est à l’occasion de la sortie du dernier More Light que le groupe est de nouveau passé à La Cigale, deux ans après la tournée commémorant l’anniversaire de Screamadelica - le temps de pratiquement faire doubler le prix du billet.
Cette fois Bobby Gillespie nous la joue zazou de cabaret, débarquant avec son costume mauve, sa chemise noire et ses chaussures vernies. Dès le début, avec son sens du rythme retenu, son pas anguleux mais feutré, il dispose à l’instar d’Ozzy Osbourne de cette sorte de sénescence sensuelle - Gillespie trainant sa réputation de drogué notoire, à chacun de juger s’il s’agit là des conséquences. En tout cas, commençant par deux titres du nouvel album, le public a du mal à mordre. Le groupe, pas dupe, enchaîne un Jailbird décidé, un Shoot Speed/Kill Light puis un Accelerator pour ferrer les auditeurs. Mais dans l’ensemble les transitions entre des titres assez dissemblables ainsi que le jeu de scène plutôt engourdi du frontman font que le groupe peine à générer un véritable spectacle jubilatoire.
En effet, étrange créature de spectacle qu’est Bobby Gillespie : timide et folâtre, il entreprend des pas de danse qu’il achève soudainement, se précipite au bord de la scène pour ensuite se retenir. Il a décidemment plus de nerf sur disque que sur scène, la musique semblant aller plus vite que lui. Sur l’intermède dub Goodbye Johnny, Bobby prend des airs de Pierrot lunaire, trainant sur l’estrade son pas encombré et indécis, pendant que Andrew Innes, casquette Mao noire, pantalon et chemise de cuir, semble s’éclater sur sa guitare. Le cœur mou du concert se prolonge, et malgré le feel-good It’s OK, It’s Allright, on se dit qu’il ne fallait pas venir ce soir pour pogoter (d’autant plus qu’une bonne partie de l’audience se barricade comme à l’accoutumée derrière de très dispendieux smartphones).
Mais selon une logique convenue, à la fin du spectacle le groupe se décide à donner au public ce qu’il veut entendre. Le rappel révèle en général le substrat irréductible du concert : on y trouve toujours le plus essentiel. Et voilà le groupe parti pour un retour aux années ecstasy. Car vous reprendrez bien un peu de Screamedelica en dessert, n’est-ce pas ? Le public, aux anges, pousse des « whou-whou » stoniens qui ravit Gillespie, lui gratifiant en retour de son sourire Sammy Rogers (remarquez la ressemblance). Sur I’m Losing More Than I’ll Ever Have, les musiciens prennent leur envol et le titre se transforme en incroyable funk psychédélique : jamais Primal Scream n’avait tant ressemblé à Funkadelic.
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