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mercredi 15 avril 2015
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par Béatrice le 2 mai 2006
paru le 9 mai 2006 (Touch and Go Records / PIAS)
Cinquième album du quintet californien, The Spell s’ouvre sur quelques notes de piano qui s’échappent tel un dernier souffle, juste avant qu’on soit emporté dans un tourbillon de pensées noires et claustrophobes. Dès les premières secondes, il s’installe une ambiance aussi planante qu’oppressante, qui ne se défera que difficilement une fois le silence revenu... Évoquant parfois des Warlocks sous analgésiques ou un Arcade Fire en pleine dépression, les titres défilent, hypnotiques, comme une morne procession dont on ne voit pas la fin.
Les guitares s’étranglent quand elles ne sont pas syncopées, la section rythmique, pesante et lancinante, construit une cage sonore qui hape l’auditeur dès le premier titre ; au-dessus, un violon ou un piano vient parfois broder quelques mélodies, pendant que la voix, traînante et désincarnée, étire les mots autant que possible, laissant à chaque syllabe le temps de mourir dans une complainte fantômatique. Les titres s’enroulent et captivent, entraînant dans une spirale angoissée. Histoires de captivité et d’emprisonnement, que ce soit dans une toile ou sous l’influence d’un mauvais sort, les deux premiers titres se montrent particulièrement sombres : "The Poison is blinding, the streets are all winding, the clocks lose their time", chante Pall Jenkins dans le titre éponyme. Puis, on semble retrouver une lueur d’espoir, avant d’être emporté dans une valse infernale et hantée... Et l’épopée se poursuit, sous une nuit de plomb, dans un paysage désertique et poussièreux en pleine hibernation - quand le ryhtme ralentit, c’est pour accroître un peu plus le sentiment d’accablement et de pessimisme qui imbibe chaque seconde du disque ; quand il s’emballe, c’est l’angoisse et la force du désepsoir qui prennent un peu plus possession de la musique, et on se sent traqué et pris au piège.The Waiter #5, qui arrive à être à la fois le titre le plus lumineux et le plus désespéré du disque évoque, en quelques notes frêles de piano et un doux soufflement de brise, un hiver glacial et éternel ; puis les violons de Places transportent l’auditeur dans un cabaret miteux et déserté au fin fond de l’ouest lointain, dans lequel un groupe fatigué tenterait d’animer une fin de soirée qui s’étire.
On ne sait jamais vraiment où on est, à l’écoute de cet album désorienté et désorientant, mais il ne fait aucun doute qu’on y est toujours seul, et qu’il y fait toujours noir, froid et sec. Assemblage d’hymnes à l’attente et à l’absence, bande-son de la fuite et de l’errance à travers de vastes étendues désertiques, ce disque plonge dans une tristesse où on se love doucement. Rarement groupe aura aussi bien porté son nom, tant la musique du groupe évoque le lent cheminement infini d’une procession désesépérée.
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