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Viva La Vida Or Death And All His Friends

Viva La Vida Or Death And All His Friends

Coldplay

par Yuri-G le 7 octobre 2008

3,5

paru le 16 juin 2008 (EMI/Parlophone)

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Évacuons tout de suite la question. Celle-ci : faut-il avoir honte d’apprécier Coldplay ? ... plus particulièrement leur nouvel et quatrième album Viva La Vida Or Death And All His Friends ? Absolument : non. Cette interrogation émerge lorsqu’on s’attarde sur le statut du groupe et son appréciation horrifiée au sein... - au sein de quoi justement ? l’intelligentsia indie ? la presse spécialisée ? le club des amateurs de la saucisse de Francfort ? Au final, elle ne vaut pas grand chose. Rien qui mérite d’être jugé, si ce n’est la qualité de la musique : une totale évidence dont on doute parfois, face aux levées de boucliers virulents. Après tout, il s’agit de se concentrer sur l’album, juste lui.

Et honnêtement, Viva La Vida est réussi. C’en est même surprenant, si l’on se remémore le degré d’irritation atteint il y a trois ans par X&Y, disque assez inepte, larmoyant, presque bas de gamme. Sûr, le groupe était avachi dans le confort (créatif), et plus rien ne semblait avoir prise sur leurs chansons vaguement putassières, dans leur conquête du monde. On suppose que Coldplay a décidé de changer. Oh, il n’est pas non plus question de bouleverser de fond en comble leur musique. Mais une touche de singularité ne nuit pas. C’est alors que Brian Eno est entré en jeu. Chargé de la production, il était aussi investi de la volonté du groupe d’aller plus loin ; ne se contentant pas de ce qu’ils savaient faire.

Un travail fructueux qui, à la première écoute, se révèle à vrai dire de manière intuitive, puis de plus en plus puissamment. Eno a le mérite de ne pas faire peser sur la musique de Coldplay une charge expérimentale qui serait malvenue. Son intervention se mesure dans des structures sensiblement alambiquées (une chanson en cache une autre) ou par des arrangements parfois brumeux, en tout cas aux multiples niveaux mélodiques. Chris Martin et ses compagnons offrant à cette occasion leurs compositions les plus fulgurantes, l’émulation des deux parties fait de Viva La Vida un album à la beauté ample, auquel on sait gré de ne pas fuir l’idée de "grandeur". Bien sûr. Car, à l’heure où des boulevards sont ouverts à des sonorités electro-pop ramassées, toutes fières de leur hédonisme criard, entendre des hymnes - on sait qu’ils ne peuvent qu’être massivement diffusés - soucieux de qualité d’écriture, de densité et d’espace, rendrait pour peu espoir. Le plus frappant, sûrement le single homonyme triomphant, Viva La Vida, empli de violons vivaces et d’un souffle euphorique : on s’y abandonne plutôt divinement. Tout comme Lost !, confectionné d’orgue et de percussions circulaires, où soudain une ligne de guitare répand mortellement une splendeur liquide... et un choeur surgissant des profondeurs achève d’y inscrire un sens libérateur.

Pour l’enregistrement, Brian Eno aurait, dit-on, recommandé au groupe l’écoute de My Bloody Valentine ou Tinariwen - groupe de blues malien. Tout du long, on sent à quel point Coldplay s’est imprégné de ceci ou de cela pour se renouveler. Ondes shoegaze, pop orchestrale, en passant par quelques emprunts sporadiques (flamenco, tendances progressives, et même psyché aux vapeurs inquiètes dans la deuxième partie de Yes), la cohérence est pourtant de mise, grâce à la constance des mélodies ; chacune a à offrir. Quand bien même il subsiste quelques passages marmelade, ce piano tire larmes introduisant 42, ou des paroles toujours un peu limitées (Just because I’m losing/Doesn’t mean I’m lost... vraiment ?), la puissance se fraie un large chemin. Le son est clair. Les instruments ont du corps. L’emprise est accomplie.

Viva La Vida signe une sorte d’abandon aux cimes de la pop fédératrice, que d’autres nommeront "grandiloquence, musique de stade, FM etc...". En abandonnant toute connotation péjorative, on se dit qu’après tout il en est exactement question. Ces chansons ne peuvent s’épanouir dans l’intimité d’une chambre close. Elles suggèrent la grandeur, l’ouverture céleste d’un espace (le stade), au sein duquel elles envahissent la foule d’une belle émotion. Un instant, les sonorités envahissantes d’une adéquation.
Voilà une musique apte à laisser une marque entre chacun, si tant est qu’on la fasse vivre et sortir. Une musique que l’élitisme fait fuir, sans pour autant renier la valeur des compositions. Grande pop pour tous.



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Tracklisting :
 
1. Life In Technicolor (2’30")
2. Cemeteries Of London (3’21")
3. Lost ! (3’55")
4. 42 (3’57")
5. Lovers In Japan/Reign Of Love (6’51")
6. Yes (7’07")
7. Viva La Vida (4’01")
8. Violet Hill (3’43")
9. Strawberry Swing (4’10")
10. Death And All His Friends (6’19")
 
Durée totale : 45’49"