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mercredi 15 avril 2015
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par Arnold, Fran le 5 septembre 2005
DJ Zebra, ancien bassiste de Billy Ze Kick & Les Gamins En Folie, est aujourd’hui un DJ reconnu et est passé maître dans l’art du bootleg. Il anime depuis la rentrée une émission en prime time sur Oüi FM, de 20h à 20h30. Le 31 juillet dernier, Zebra fêtait son anniversaire au Divan du Monde, au pied de la butte Montmartre. Suite à sa prestation d’Effervessonne, nous avons décidé de nous y rendre. A cette occasion, il répond à nos questions
B-SIDE : Tu étais bassiste chez Billy Ze Kick & Les Gamins En Folie, puis le groupe a splitté et tu as monté les Raggamins et enfin, tu t’es mis à mixer... Qu’est-ce qui t’as fait abandonner l’instrument pour passer derrière les platines ?
DJ Zebra : Si tu veux vraiment remonter à ça, je faisais déjà le DJ quand j’étais môme, après j’ai commencé à faire DJ à Canal B [1]. Et quand on tournait avec Billy Ze Kick, des fois, on finissait en soundsystem : on passait des titres de reggae, ragga, on tchatchait dessus comme ça se faisait souvent dans le reggae à cette époque. C’est comme ça que les Raggamins sont nés. C’est moi qui passait les disques, donc après, c’est venu naturellement.
Mais j’ai pas décidé un jour d’abandonner les instruments pour passer aux platines. D’ailleurs actuellement, quand je fais le DJ, je passe beaucoup de sons que je produis ou que j’enregistre moi-même. C’est du travail fait en amont sur ordinateur, synthétiseurs ou sur des guitares. Il y a toujours ce côté musicien, même en tant que DJ. Si je suis DJ, c’est parce que je suis tout seul, c’est uniquement pour ça. C’est pas parce que j’adore les platines ! Je préfères les guitares, les groupes de rock, je vais jamais en boîte écouter un DJ, je vais plus souvent en concert, et j’aime bien être peinard, tout seul, à faire le con plutôt que d’entraîner un groupe avec moi.
BS : Tu connais Joseph Arthur ? Sur scène il est justement tout seul, à faire des samples...
Zebra : Oui, il y a aussi Buck 65... Des performers... Ou Peaches par exemple ! J’adore ! Elle arrive seule, elle passe sa bande, elle joue, ROCK’N’ROLL ! Elle a ses guitares, ses danseuses... Je l’ai vu déjà toute seule avant qu’elle ait ses danseuses, elle assure... Moi, je me sers de mes platines, elle, elle prend une guitare... Mais on a la même démarche. On fonctionne en tant que Rock-Star... On se contente pas d’être le mec juste comme ça qui fait ses petits mouvements de moulinnette... On AGIT !...
BS : On a vu ça... à Effervessonne... D’ailleurs est-ce que tu fais d’autres festivals comme ça ou tu interviens entre chaque groupe ?
Zebra : Nan. J’avais promis de ne plus le faire. Mais on me proposait de mixer avant Iggy Pop et les Chemical Brothers !! Même si les conditions étaient pas là pour me valoriser, avec les balances par dessus mon son, ce qui en général se produit. C’est pour ça que je ne voulais plus le faire. Mais là, je me suis dit "je m’en fous ! c’est Ron Ashton"... J’ai fait d’autres festivals où j’avais un set à moi tout seul où en général, je joue en dernier après les groupes. Et là, ça envoie... J’ai le même volume sonore que les autres et une scène pour moi tout seul !...
BS : Peinard...
Zebra : (rires)... Là oui ! Les 2 Many DJ’s l’ont eu, alors pourquoi pas moi ?!
BS : Tu appelles ce que tu fais : des Bootlegs... Pour moi une bouteille, euh un bootleg, c’est un enregistrement pirate d’un concert...
Zebra : Tu as raison... Tu vois, ta langue a fourché sur "bouteille/bootleg"... A la base, le bootleg, ça date de la prohibition. Aux USA dans les années 30, l’alcool était interdit donc ils cachaient les bouteilles dans leurs jambes. Et le mot de code pour demander de l’alcool, c’était : " Do you have a bootleg ?"... Et c’est devenu le mot qui désigne tout ce qui est en dehors de la légalité, comme les enregistrements live pirates. Aujourd’hui, le mot a une signification plus créative dans le milieu des DJs. Quand on mélange deux morceaux et qu’on les met à disposition sur Internet, c’est parfaitement illégal. Mais effectivement, maintenant, les gens pensent que bootleg désigne un mélange de deux morceaux. En fait non, ça désigne l’intention de mettre gratuitement à disposition sur Internet un mélange de deux compositions faites par d’autres artistes...
BS : De ce côté-là, comment ça se passe avec les groupes ? Tu as des problèmes avec ça ? Ou bien ils sont plutôt satisfaits et te laissent tranquille ?
Zebra : Non, il n’y a aucune plainte des groupes. Ils sont plutôt flattés qu’on mixe sur leur musique. De toute façon, les bootlegs sont faits par des gens qui aiment les musiques qu’ils mélangent, et c’est souvent fait avec humour. Souvent, il y a une oreille musicale derrière. Beaucoup de gens pensent que le bootleg est un truc complètement débile qui consiste à mélanger du Chantal Goya avec Metallica, alors que c’est la minorité des cas. Mais souvent, c’est le public qui est choqué. J’ai fait un mélange entre la Mano Negra et Diam’s. Les gens se disaient " C’est pas possible ! Il a pas fait ça Manu Chao !" Non non, c’est un Dj qui l’a fait !... (rires)
BS : Y a t-il des groupes, des musiques qui ne t’inspirent pas ?
Zebra : Le Hard, le Heavy Metal, du genre Iron Maiden etc... Sinon, j’utilise ce que j’aime, c’est à dire tous les styles. Après, tout n’est pas exploitable. Certains titres ne se prêtent pas du tout au bootleg. Par exemple, Tomorrow Never Knows des Beatles est tellement complexe, qu’on peut difficilement coller quelque chose avec. Par contre, un titre comme Taxman où tu remarques une ligne de basse, "tiens, qu’est_ce que je peux coller avec ça". Il y aussi The Magnificient Seven des Clash qui a une longue intro instrumentale donc tu peux franchement la repérer avec les passages au milieu. En fonction de ce que tu peux tirer du morceau, tu vois ce que tu peux mettre dedans. Le reste, c’est de l’oreille musicale qui travaille.
BS : J’ai entendu que tu avais récemment obtenu une récompense pour tes bootlegs.
Zebra : Oui, j’ai eu la révélation de l’année au Jybo Awards l’an dernier. Jybo (équivalent français), c’est le plus gros forum de fans et de créateurs de bootlegs au monde. Les Dj laissent des mp3 de leurs bootlegs, les fans les écoutent et donnent leurs impressions, et parfois des conseils. C’est le passage obligé pour tout bootleger. Donc, j’en ai mis plusieurs l’an dernier et j’ai gagné la révélation de l’année, et Loo & Placido qui sont d’autres bootlegers français ont eu d’autres récompenses. Ils sont énormes, voila les références françaises du bootleg. [2]
BS : Maintenant, la question habituelle de B-SIDE. Tu es plutôt vinyl, CD ou mp3 ?
Zebra : Je ne suis pas du tout mp3. J’en consomme beaucoup pour mes émissions de radio mais j’écoute pas de musique sur mon ordinateur. Je suis plutôt CD, tout en étant gros acheteur de vinyl. Parce que les CD, je peux les écouter dans ma caisse...
BS : Oui c’est sûr, dans la caisse, les vinyls c’est plus dur...
Zebra : rires... Je suis un fervent défenseur du CD auprès des DJs. Beaucoup sont réfractaires à ce format en disant "les vrais DJs mixent du vinyl". Et souvent dans les soirées, les platines vynil sont bien en évidence et les platines CD planquées en dessous. Pour moi, la platine CD, c’est la platine du producteur. C’est comme ça que je le vois. Tous les bootlegs que je fais, je les balance sur CD, je vais pas commencer à les graver en vinyl. C’est débile, on va pas faire du vinyl pour faire du vinyl. C’est un espèce de snobisme du vinyl auprès des DJs. Donc, voilà, je défends les CD.
BS : Quels sont tes projets pour la rentrée ?
Zebra : Déjà mon émission pour la radio, le Zebramix sur Oüi FM sera diffusé de 20h à 20h30. Je continue à assurer la rubrique Bootleg sur Onde de Choc (France Inter) le jeudi soir entre 23h et minuit. Autrement, il va y avoir la soirée Bootlegs qui va démarrer le 24 Septembre au Divan du Monde avec Loo & Placido dont je parlais tout à l’heure. Ca va être 100% Bootleg, on va faire venir les meilleurs DJs de ce style (anglais, américains, etc...). En Angleterre, ça cartonne ; aux Etats-Unis, il y a des soirées régulières et en France, il n’y a rien encore. Donc on l’a fait. Sinon, je prépare un album pour début 2006, avec que des mixs, pas de bootlegs (pour les raisons qu’on a évoquées tout à l’heure) et plusieurs dates un peu partout en France. Donc il y a beaucoup de choses... rires
Propos recueillis par Arnold et Fran, entretien préparé avec Mouton Noir. Voir le site de DJ ZEBRA.
[1] radio-rock Rennaise
[2] voir le site de Jybo, le site Bootlegs, et encore le site de Loo & Placido
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