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par Giom le 28 juillet 2009
publié en 2005 (Éditions Naïve)
Commençons, une fois n’est pas coutume, par une note personnelle. J’ai lu ce livre en parcourant les routes américaines en direction de la Babel moderne. Je ne pouvais que l’aimer. Mais même dans son canapé français, on peut dire que ça le fait.
Chuck Klosterman aime bien les histoires morbides. Comme il aime bien le rock’n’roll également, il se lance dans une aventure décapante : faire le tour des lieux mythiques des États-Unis hantés par les morts de personnages rock plus ou moins connus. En bon néo-beatnicks, il fait tout ça en voiture. Néo s’entend car Chuck a son propre véhicule et dispose d’un lecteur pour écouter les 800 disques qu’il a emporté dans son coffre. Changement de génération.
On va donc chez Jeff Buckley, Kurt Cobain ou au Chelsea Hotel, lieu de la mort de Nancy, copine d’un certain Sid Vicious. Les Allman Brothers ne sont bien sûr pas oubliés lors d’un périple sudiste... Du pays, en veux-tu en voilà donc, avec en toile de fond les pensées de l’auteur parfois métaphysiques, souvent musicales, presque tout le temps amoureuses. Car Chuck est un peu perdu sentimentalement, entre Diane, Lenore ou Quincy, notre pauvre narrateur ne sait plus qui choisir et si au fond, il faut choisir. Chacune défile donc dans son esprit, amenant soit la nostalgie soit l’amertume d’un être monomaniaque et qui en a malheureusement conscience.
Côté musique, les choses sont aussi intéressantes notamment une théorie développée par l’auteur sur l’album Kid A de Radiohead comme prophétie apocalyptique pré-11 septembre. C’est vrai que l’analyse est pertinente et les coïncidences étonnantes. Les amateurs de Kiss (et oui, ce groupe est adoré par l’auteur) trouveront même leur bonheur dans ce livre puisque l’auteur y consacre quelques pages. Il nous offre alors une mini-dissertation sur les valeurs respectives des albums solos de chacun des membres du groupe sortis simultanément mais qui, si on cumule les ventes de chaque opus, n’ont atteint comme chiffre de vente que celui d’un unique album du groupe. Radiohead, Kiss, que les aficionados de rock plus énergique ne partent pas en courant, on trouve beaucoup plus d’autres analyses d’autoroute dans ce livre, parfois passionnantes, toujours pétillantes en tout cas.
Ce livre s’inscrit donc dans la pure tradition des road diaries et on peut dire que Klosterman renouvelle bien le genre. On connaissait déjà ses qualités de plume dans les pages du magazine Spin (le portrait dans le livre de la rédac’ chef de Chuck est d’ailleurs savoureux), il réussit à convaincre sur grand format. Jamais ennuyeux, alors que l’exercice peut amener à l’être, l’auteur sait se confier en finesse et avec humour, toujours avec une pointe désabusée attachante. Au final, on finit par préférer Diane à Lénore, ou l’inverse, à moins que ce ne soit Quincy... enfin bref. Et puis le narrateur sait choisir ses thèmes qui a priori nous rassemblent tous : la mort, l’amour et la musique, trio magique s’il en est.
D’un point de vue stylistique, la prose de Klosterman est également agréable. On roule dessus comme Chuck sur le bitume. On pourrait comparer l’entreprise avec le passionnant film No Sex Last Night de l’artiste Sophie Calle. L’humour et le questionnement existentiel serait plus quant à eux en rapport avec l’univers de Woody Allen, en plus rock bien sûr.
Je, La Mort Et Le Rock’n’Roll. En fait tout est dans le titre.
Ah oui, un dernier truc, Chuck aime le sport aussi. Surtout le basket-ball. Donc pour savourer le livre encore davantage, il est bon d’avoir quelques notions de NBA sinon les déboires de Kobe Bryant suite à une sombre histoire de viol ou l’expression « suer comme Patrick Ewing » ne vous feront pas sourire. Heureusement, que j’avais quelques restes...
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