Films, DVD
M*A*S*H

M*A*S*H

Robert Altman

par Milner le 31 mars 2005

5

paru le 25 janvier 1970

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« En pleine guerre de Corée, trois chirurgiens brillants et fantaisistes débarquent dans une antenne médicale de l’armée de terre. Pour résister aux horreurs quotidiennes de la guerre, ces trois dragueurs organisent une vie parallèle et complètement folle à l’intérieur du camp. »

Dit comme ça, ce film pourrait paraître un poil consensuel si ce n’est qu’il incarne tout simplement une farce antimilitariste unique en son genre. En fait, M*A*S*H est basé sur les conduites sexuelles dans un hôpital chirurgical, où docteurs et infirmières essayent de rester lucides malgré les réalités cruelles de la guerre, en y donnant libre cours par des comportements transgressifs et rebelles. Évidemment, on est loin des leçons du cinéma moderne : là où Spielberg commençait par montrer l’intégrité de ses soldats Ryan avant d’en suivre la métamorphose en saucisse et boudin, le découpage du film épousant d’ailleurs celui de ses héros, M*A*S*H construit sa trame littéraire de toutes pièces, et de manière fort peu conventionnelle, à coups de zooms sur les charcutages en règle, situations burlesques ou bruits de fond obligeant les acteurs à pousser les limites du réalisme, qui ont certes moins de grâce que la filmographie entière d’un Cecil B.De Mille. Au lieu de faire dans le mélo réaliste, Altman préfère jouer la carte de la dérision et surtout du gore outrancier. Une façon pour lui de démontrer que la violence est inhérente à l’homme et que l’homme est habitué à créer son propre enfer.

Si le film était resté fidèle, à la goutte d’hémoglobine près, au roman original de Richard Hooker, il n’aurait pas pu exister. Héritant du scénario après le désistement de pas moins de 15 grands noms, le débutant Robert Altman semble assez indiscipliné pour comprendre ce dont il s’agissait et est dès le départ en total désaccord avec les pontes de la Fox. Réalisateur visionnaire (il le prouvera tout au long de sa carrière), il n’hésite pas à laisser ses acteurs improviser leurs dialogues ou changer des scènes, ce qui rendra furieux le scénariste Ring Lardner Junior. Tourné sur les hauteurs d’Hollywood sensées rappeler le paysage coréen avec un budget digne d’une PME (75 000 $), il a participé au lancement de la carrière de plusieurs stars d’Hollywood dont le plus connu est Donald Sutherland. Décliné depuis en différents formats dont une série TV extrêmement populaire outre-Atlantique, M*A*S*H a attaqué de front l’establishment hollywoodien et le public en conjugant réalisme choquant et humour noir. Loin de faire dans la vulgarité crasse (du genre : réalisé par Mel Brooks mais avec Lagaf’ dans le rôle principal), ce film demeure un petit chef-d’œuvre de réalisme chirurgical que Wes Craven aurait pu mater une nuit d’érection difficile et continue de fasciner (pour preuve le titre Suicide Is Painless issu de la B.O., récemment repris par Marylin Manson).

S’il s’en sort finalement bien - les problèmes surgissent au montage où la Fox se retrouve avec des heures de rushs cahotiques et incohérents pour un scénario n’ayant aucun suivi linéaire. Nécessitant un lien pour joindre ses nombreuses séquences, Altman introduit finalement des haut-parleurs afin d’annoncer les scènes à venir - ce ne sera rien comparé à l’engouement du public qui, malin, se masse pour voir cette tirade anti-Viêtnam. Générant pas moins de 80 millions $ de recettes lors de sa première année d’exploitation, il sera en fin de compte récompensé de 5 nominations aux Oscars et se verra décerner la Palme d’Or du Festival de Cannes en 1970. De nos jours, ce classique de l’histoire du cinéma se revoit avec un plaisir qu’on ne retrouve aujourd’hui ni chez Jacques Rivette, ni chez Harry Potter, ni dans un vieil enregistrement des Chiffres et des Lettres.



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