Chacun le sait : la world music a ouvert des portes à travers lesquelles se sont engouffrées quantités d’artistes populaires qui n’avaient pas automatiquement son authenticité, ni sa conception musicale (Paul Simon et ses tambours de Soweto, Peter Gabriel et son funk océanien, Ritchie Blackmore et son attirail pour troubadour moyenâgeux, la liste est relativement incomplète...). La chose est désormais réparée puisque le label Prikosnovénie publie sa deuxième compilation présentant l’identité sonore et graphique à travers un superbe livre CD couleur. Parmi cette débauche de quadrichromie, un agencement des titres des nombreux artistes de qualité qui composent le label en tout point de vue original : les 17 titres sont répartis selon les saisons qu’ils sont censés représenter, tel un voyage de la Slovénie au Japon en passant par l’Arménie rythmé par le cycle de la Nature.

Les voix douces et intimistes voire déchirantes et poignantes se mêlent à des arrangements racés ; il convient de dire que bon nombre des titres de Fairy World II calquent ce schéma musical qui fait ses preuves (Brocéliande de l’excellent duo Pinkruby, Amby Metch des Franco-Arméniens de Deleyaman). Voué à l’Eurasie, Fairy World II s’en rapproche astucieusement par la volonté de présenter les artistes qui initient les auditeurs aux rêveries, à la féerie, au mysticisme envoûtant des arrangements de harpes et de lyres anciennes. Parfois, des échantillons sonores de musique africaine font leur apparition sur des titres titillant les nouvelles technologies (Gethsemane de Lys) et il est facile de comprendre que les amateurs de trip-hop de premier ordre tomberont sans dommages sous le charme du troublant Lilly White des classieux Misstrip, avec ses giclées de guitares à faire saillir les veines.

Majoritairement basée sur des compositions folk ou bien des ballades, cette compilation reste là, maître des événements, et ailleurs en même temps. Et il faut bien se convaincre à l’écouter qu’il existe des Pouvoirs, ceux qui permettent de passer sans soucis d’une saison à l’autre, d’un pays à un continent, d’une rêverie à un voyage musical non dénué de charme. Cette compilation en détient car il faut bien se rappeler d’une chose : la musique vit au rythme des gens qui la font et de ceux qui la reçoivent.