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mercredi 15 avril 2015
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par Manu le 4 août 2005
Et dire que je voulais pas y aller à ce festival. En plus il plu toute la journée de samedi (une première aux Vieilles Charrues où il fait d’habitude chaque année un soleil radieux).
Les années précédentes, bonne programmation ou pas j’y allais pour l’ambiance incomparable avant tout. Le camping, l’alcool, les filles, la fête, la drogue, les rencontres, l’éclectisme du public et de la programmation, le beau temps, la bonne bouffe (rare dans les festivals), eau minérale fraîche à volonté, la foule immense (65 000 personnes par jour) les navettes entre camping et concerts à dos de tracteur, la distribution de lait des paysans du coin le matin ... Bref tout ça, croyez-moi, c’est génial mais fatiguant !
Mais quand j’ai vu Iggy & The Stooges, Deep Purple, New Order, Blues Explosion et bien d’autres à l’affiche je n’avais plus le choix : il me fallait mes billets !!! Travail ou pas, fatigue ou pas, les Vieilles Charrues m’attendaient, une fois de plus. Mais durant ce week-end, pas question de tout voir. De tout façon, c’est impossible. Alors, j’ai sélectionné une grosse poignée de concerts. En bien ou en mal : voici les plus marquant [1]
Seule date en France. Immanquable pour les fans. Oui mais voilà, l’excitation fait très vite place à la déception. Ces vieux messieurs ayant refusé de faire les balances durant la matinée comme le font tous les autres groupes avant que le festival n’ouvre ses portes, on a eu droit à un son horrible durant les premiers morceaux.
Quand le son se fait meilleur on prête particulièrement l’oreille aux titres connus : Hush, Highway Star ... mais on est loin du live Made in Japan de 1972. Le chanteur est poussif et les morceaux sont joués d’une façon « pachydermique ». Le public est pourtant surexcité et finalement ce sont les nouveaux morceaux issus de l’album Bananas (2003) qui passent le mieux. Mais mieux que mauvais, ce n’est pas génial non plus.
Lors de la présentation du groupe, j’aurais même aimé que le public leur jète des tomates tant c’était pathétique ! Je m’explique. Chaque musicien a eu le droit à son solo. Mais 10 minutes de soli de Steve Morse, c’est impossible à digérer... Dès les premières secondes, il faut se boucher les oreilles tant le son de sa guitare est moche. Vous savez, ce son saturation infâme à la Van Halen. Avec des notes en cascade en veux tu en voilà. Et des passages de gammes classiques histoire de se la péter : « t’as vu comment je maîtrise ? ». Ça oui, il maîtrise mais où est le feeling ? L’émotion ? La poésie ? Tout ça est froid, sans âme, et fait de façon si démonstrative que ça en devient pathétique. Puis vient le tour du clavier. D’abord un joli son d’orgue Hammond et là, on se dit que ça va être mieux mais que nenni ! Des passages de musiques classiques à Alouette gentille alouette en passant par le thème de Stars Wars (je n’invente rien !), tout est d’un ridicule affligeant ! Débranchez-les !! Qu’ils retournent à l’hospice !
Malgré un concert qui a atteint des sommets de nullité le Smoke On The Water est lui rentré tout droit dans les annales du festival. Et oui. Ça, tout le monde l’attendait et ce fut magistral. Une ambiance hallucinante, 60 000 personnes qui chantent, dansent, lèvent les bras, applaudissent durant près de 9 minutes sur le riff de guitare le plus connus au monde, c’est inoubliable.
Le plus grand fucking concert de Rock’n’roll de toute ma jeune vie !!! Ces vieux fucking Stooges-là ne sortent pas de l’hospice pour faire quelques concerts ridicules ici et là comme un certain groupe nommé Deep Purple la veille.
Ce fucking samedi-là, il a plu toute la journée. Je le sens mal ce fucking concert. J’ai la quasi-certitude que je vais être déçu tellement j’en ai rêvé. Ça fait une semaine que je suis excité comme une fucking pucelle à l’idée de voir enfin ce groupe mythique dont je suis fan.
L’heure fatidique approche. Il fait nuit, il pleut toujours, je suis à la troisième rangée, pile en face du fucking micro d’Iggy. Un signe divin : il s’arrête de pleuvoir 20 minutes avant le début du concert. J’en peux plus d’attendre quand à 23h10 Iggy, Ron, Scot et Mike déboulent sur la scène. Et pan ! C’est parti : Loose, Down On The Street, 1969, I Wanna Be Your Dog sont dans l’ordre les quatre fucking premiers titres du concert. Le son est excellent, Iggy est surmotivé, il grimpe sur les amplis, saute partout, se roule sur scène, prend un bain de foule. J’ai du mal à tenir debout, ça pogote sec et je ne vois pas les coups arriver. Je décide quand même de reculer de 5 mètres pour mieux savourer. Que des titres des deux premiers fucking albums (mes préférés) avec seulement un nouveau morceau de 2003 : Dead Rock Stars (mon préféré aussi parmi les nouveaux morceaux).
J’assiste au concert de rock’n’roll parfait ! Ron Ashton aligne les fucking riffs et les soli agrémentés de wah wah les uns après les autres sans la moindre fausse note. Le frangin Scott « Rock Action » Ashton martèle ses fucking fûts imperturbablement. Ces deux-là ne paient pas de mine et ont pris physiquement un sacré coup de vieux, mais quelle efficacité ! Mike Watt bouge lui beaucoup plus avec sa fucking basse. Quant à Iggy, il a la même fucking voix qu’en 1969. Et le même physique aussi. A 58 ans, quand on le voit sur scène dans une telle forme et qu’on sait la vie qu’il a eue, on ne peut s’empêcher de penser que ce type n’est pas humain.
Sur No Fun, c’est désormais le traditionnel fucking lâché de fans sur la scène. Ça devient complètement fou. Sur la scène, une fille se dénude et provoque une réaction en chaîne : dans le public de nombreuses charmantes créatures grimpent sur les épaules de leur voisin pour montrer aussi leurs seins à Iggy ! Mais les fucking Stooges (qui ont dû en voir bien d’autres) continuent de dérouler leur fucking good rock’n’roll, imperturbablement. Steve McKay fait son entrée avec le sax sur Fun House. Puis vient un deuxième I Wanna Be Your Dog où Iggy fait le chien. Le public, bouillant, le tient en laisse. Je jette un coup d’œil sur un gros plan du visage d’Iggy sur l’écran géant, sa voix tremblote, il parait ému : merde, il va pas se mettre à chialer quand même ! Non, un fucking Stooges, ça ne pleure jamais !
Ils quittent la scène et Iggy reste quelques secondes seul pour regarder la fucking foule. Il est content, il sourit. Et part. Quelques minutes passent, déjà 1h15 de concert. C’est-à-dire le temps maximum pour un concert des fucking Stooges en règle général. Je suis bien loin d’imaginer que l’orgie va se prolonger encore pour atteindre près d’1h30 quand ils surgissent à nouveau des coulisses. « Fucking Merci, You’re a Fucking Good Public !! » lâche Iggy avant de lancer un tout nouveau morceau. Je sais pas quel est son titre mais si les Stooges nous mettent ce genre de trucs sur un futur album, croyez-moi, il va y’avoir une fucking épidémie de "Stoogitite" (maladie rare qui a fait des ravages à Detroit en 1969 provocant chez les sujets atteints la prononciation intempestive du mot « fucking ». Merde, je crois bien que je suis atteint. Fuck !
Dimanche. La nuit est tombée. Le diable peut sortir de sa tanière. Jon Spencer assure pourtant que « This is not the Devil’s Music » mais rassure juste après “But it feels like the devil’s time !”. Comme d’habitude, le show est sombre. La scène n’est pas très éclairée et Jon Spencer cherche d’emblée à éviter le seul projecteur braqué sur lui en déplaçant son pied de micro et avançant fréquemment sur le bord de la scène d’où on le voit à peine dans son costume sombre.
Le concert est bon ! Excellent ! Un régal ! Mieux qu’à la Route du Rock en 2004. On sent le public pris à froid. Beaucoup ne semblaient pas connaître. A entendre les discussions après le concert, beaucoup semblent avoir pris une sacrée leçon de rock’n’roll. L’ambiance grimpe crescendo et Jon Spencer, éternel Elvis moderne sous acide, fait tout pour faire monter la sauce. Il hurle, vocifère, éructe dans son micro saturé et ne cesse de marteler les mots « Bluuuuues Exploooosion !!!!!!!!! ».
L’entente au sein du trio est parfaite. Les morceaux s’enchaînent quasiment sans temps mort et les musiciens réagissent entre eux au quart de tour. 15 ans de métier déjà à délivrer le même mélange de rock’n’roll et blues crados sans concession.
Quasiment que des morceaux récents dans la setlist. L’intégralité de Damage, le dernier formidable opus du trio, aura été joué plus quelques morceaux du précédent comme She Said ou Sweet’n’Sour. Pour quelqu’un qui comme moi connaît par cœur ce formidable album très travaillé en studio car mixé par de nombreux producteurs et DJ comme DJ Shadow, le concert ressemble à une jouissive relecture brute de décoffrage de l’album ainsi débarrassé de tout bidouillage électronique. Avec seulement deux guitares et une batterie, les morceaux ne perdent rien. Bien au contraire, ils se transforment en véritables petites bombes fabriquées pour la scène. Un grand moment. Au même titre que les Stooges, un grand groupe à ne surtout pas rater !
Je retiendrais également de ce Week End la folie électro de LCD Soundsystem. Un tel concentré d’énergie qu’on aurait pu croire à un concert de punk !
New Order, qui a fait un show très correct visiblement mais je ne suis pas franchement fan. Les 80’s et moi ça fera toujours 4.
L’extra-terrestre Nosfell qui m’a mis sur le cul. Je ne sais pas de quelle planète il vient avec son langage bizarre, son sampleur, son comportement étrange et ses tatouages. Par moment, j’avais l’impression de voir un animal sauvage. Concert court mais suffisant pour faire rentrer une foule immense dans son univers. Un artiste rare.
On ne m’y reprendra plus. 2 fois que je fais l’effort d’assister à un concert de Mickey 3D. Je ne comprends toujours pas le succès de ce groupe. Certaines de ses chansons FM attirent pourtant ma sympathie, sans plus, et je me dis que tout cela doit prendre corps en live. Mais non. C’est creux. Archi-creux. Musicalement, il n’y a rien. Tout juste une ou deux mélodies de simplets. Largement surestimé. Le jour où les gens s’en rendront enfin compte, ce groupe tombera de très haut !
Ridan aura été une excellente surprise pour moi. Je m’attendais à un concert chiant et prétentieux de chanson à textes mais non. Malgré la pluie, il a soulevé le public avec une musique finalement assez diversifiée et enjouée. Avec en prime, une jolie reprise du Laisse Béton de Renaud transformée en Laisse Breton.
Après la tornade Stooges, passaient deux groupes que je voulais absolument voir : The Kills, le duo minimaliste sauvage et sexuel. Et les espagnols de The Sunday Drivers, révélations des dernières Transmusicales avec leur pop sans prétention mais bien agréable. Mais, j’ai mis beaucoup de temps à me remettre des Stooges. Je n’ai capté que quelques bribes de très loin de ces deux concerts. Pas assez pour donner mon avis, mais ça avait l’air très bien.
Je ne suis pas resté longtemps pour voir Devendra Benhart. Mais j’ai été conquis ! De somptueuses chansons folks et pop avec des harmonies vocales à la Byrds. A revoir très vite, j’espère, dans une petite salle.
Je retiendrai l’ahurissante reprise de Rock The Casbah des Clash par Rachid Taha. Pourtant pas fan du monsieur, avec ce morceau-là (et seulement celui-ci), il a déployé une énergie formidable. Ajoutez à cela l’effet foule et ces dizaines de milliers de personnes chantant à tue-tête le refrain en sautant dans tous les sens et vous obtenez un moment magique.
A noter aussi l’excellente prestation des Écossais de Franz Ferdinand. Certes, c’est du rock pour puceau, mais il faut bien avouer que c’est incroyablement bien foutu et comme ils n’ont pas d’autres prétentions que de faire de la musique « pour faire danser les filles », je dis chapeau messieurs ! C’est réussi à 200%. Efficace. Même avec une setlist composée pour moitié de nouveaux morceaux extraits du futur nouvel album. M’enfin, je conseillerai quand même à leurs jeunes fans d’aller faire un tour du côté du Blues Explosion ou des Stooges, histoire de prendre quelques leçons de rock’n’roll.
Encore un week-end inoubliable passé à Carhaix dans ce gigantesque et incomparable festival.
La Bretagne, ça vous gagne !
[1] crédits photo : Volubilis et Frédéric Villemin de TasteOfFindie
Vos commentaires
# Le 2 novembre 2012 à 11:50, par clem21 En réponse à : Festival des Vieilles Charrues 2005
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