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mercredi 15 avril 2015
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par Alexx le 10 mai 2006
Ce soir, l’affiche réserve son petit lot de surprises. Imaginez, trois groupes français sur cinq : les frais et nerveux Hushpuppies, Katerine, l’homme aux textes acides et ambigüs et les rois de la scène et des tournées, je veux parler de Dionysos. Au milieu de tout ça sont noyés les très médiatisés Arctic Monkeys et les non moins connus mais plus discrets dEUS.
Les festivités se déroulent sous un chapiteau nommé Phénix, le plus grand lieu de concert de ce printemps (pouvant accueillir 5500 places). 19 H, à ma surprise, les Hushpuppies ont commencé plus tôt que prévu (fait bien rare, lors de ce genre de prestation). Ne les connaissant pas, tout reste à faire ! En tout cas, le public réagit bien, tellement bien que l’on a l’impression que ce sont eux qui forment la tête d’affiche. Ce dernier répond à chaque riff qui s’enchaîne sans répit. Le chanteur balance ses paroles, invectivant la foule. Et le public en redemande (si c’est pas rock’n’roll...) !! En effet, c’est un groupe très énergique mais qui ne me laissera pas un souvenir impérissable. Si ! Le chanteur qui s’offre un slam rapide tel un frileux dans une mer trop fraîche.
Place est faite à Katerine “l’emmerdeur” et sa suite, composée majoritairement des restes de la formation connue sous le nom des Little Rabbits. Je les attendais en caleçon blanc et en haut de corps de lycra rose à l’instar de la pochette de son dernier album. Niet ! Le Vendéen se contente juste d’une fleur dans ses cheveux mi-longs. Commence alors un show marrant de quarante-cinq minutes où je me rends compte qu’il est capable de faire bouger du monde. Il faut avouer que son univers est assez décalé et qu’il réussit à le retranscrire sur scène avec panache. Ses chansons ont l’air d’être tirées de sa vie et de ses critiques sur le monde qui nous entoure. Ainsi, il nous chante ses aléas avec un poulet fraîchement abattu et estampillé Poulet 728120. Cette histoire finira d’ailleurs par un énorme « Poulet 728120 - Je t’aime ! » de la part de Katerine et du public qui s’amuse beaucoup. Arrive l’un des morceaux qui l’a fait connaître et dans lequel il clame : « Je suis dans la merde, mais je vous emmerde ! » le tout remixé au goût du jour. Enfin arrive le moment tant attendu par votre serviteur et le public. Beaucoup d’artistes reprennent ces deux petites phrases : Dionysos, Cali, Hushpuppies... En tout cas, on aura rarement vu un public s’échiner à faire du bruit, hurler, taper du pied pour contredire un chanteur lorsque ce dernier dit : « Je coupe le son... » Heureusement que la suite arrive parce que le boucan est presque aussi fort que celui du concert ! « ...Et je remets le son ! » Ainsi se termine cette belle prestation.
Après une petite discussion avec ma voisine, les quatre benjamins de ce soir arrivent et démarrent sur les chapeaux de roues. Guitares hurlantes, public hurlants aussi, et un jeu de scène assez statique. Les mauvaises langues (dont je fais partie) pourront dire qu’ils ne font que jouer leur album. Puis, je reconnaîs le single et me rends à l’évidence : le set est bel et bien formaté pour jouer l’album comme si vous étiez au studio. Les quatre de Sheffield ne bougent pas beaucoup et la dégaine du chanteur avec sa guitare hautement perchée sur son abdomen lui confère un côté sale gosse.
Les chansons se suivent et ont l’air de se ressembler. Pourtant, quelque chose m’échappe. Ce je-ne-sais-quoi qui fait leur réputation. Puis, arrivent les trois derniers morceaux. Plus libres, plus palpitants, quelque chose se passe et ceci s’explique pendant un échange d’opinion avec mes voisins et que les roadies déménagent les matos des singes arctiques : ce sont des chansons toutes neuves tirées de leur dernier EP, et mélangées à une chanson totalement inédite. Là, je comprends alors le buzz qui les a suivi avant qu’ils ne se rangent au sein d’une major.
Bien maintenant, je l’avoue, les deux groupes qui suivent sont ceux qui m’ont fait faire le déplacement (avec trois autres jouant le lendemain). Ce n’est que la troisième fois que je vois dEUS en live pourtant, au vu de ce qui est passé, ça allait être grandiose. Tom Barman débarque avec ses quatre autres compères et commencent par un morceau de leur nouvel album Pocket Revolution. La foule reste dubitative. Arrive rapidement le Paranoid Android du pauvre [1], j’ai nommé Instant Street. Pur moment de bonheur et de déchaînement pour Tom qui s’aperçoit que la foule n’est pas très réactive. Allons bon, il partage alors avec le public l’origine belge de la formation et de l’entendre ajouter : « Nobody’s perfect » sur un ton que ce satané public ne comprend pas. Pourtant, les chansons sont très bien interprétées et dEUS va jusqu’à jouer Fell Off The Floor, Man. Enchaînant les morceaux puissants (Theme For Turnpike) avec quelques plus doux (The Magic Hour), le concert est équilibré et le plaisir de les écouter est d’autant plus fort que l’on a affaire à un public ignare et amorphe alors qu’il avait prouvé le contraire quelques minutes auparavant... Je surprends même une discussion où il est question d’un match de foot apparemment plus important que ce qu’ils écoutent (désolant) !! Pour en finir et marquer le coup, dEUS interprète un Suds & Soda magistral où enfin des gens réagissent. Chanson mémorable et certainement l’une des plus appréciées de la soirée par votre serviteur...
Reprenant ma discussion avec ma voisine, je découvre qu’elle venait de découvrir quelque chose et qu’elle se renseignerait sur ce groupe. En attendant, nous échangeons quelques données sur le dernier passage : Dionysos. Je ne m’attarderai pas trop dessus. Comme à leur habitude, le combo pète la forme et fait se succéder les titres de leur dernier album Monster In Love. Dès Giant Jack, la foule est en délire et les slammers se font remarquer. Très peu de morceaux de leurs précédents opus sont joués. Même pas un Mc Enroe’s Poetry ou un Don Diego 2000 ! Comme à son habitude, Mathias escalade tout ce qu’il trouve. Il demandera au public un pogo punk mais dans le silence. C’est sur Neige que se finit la représentation, acclamée et réclamée pour une seconde partie. En les attendant, je m’amuse à écouter les impressions des gens qui sont “époustouflés” par le show qu’ils viennent de voir. Les six de Valence reviennent et préviennent qu’ils feront tout pour bien finir la soirée avec quelques surprises à la clé. Ainsi débute le duo Jedi/Cox sur lesquel Mathias se baigne dans la foule pour aller sur leurs mains jusqu’à l’échafaud du fond et y chanter a cappella un couplet de Coccinelle. Final classique (pour eux, parce que c’est toujours impressionnant à voir), le groupe se retire et Mathias reste pour chanter une dernière fois avec la foule aux anges...
Bien, il est temps maintenant d’aller se reposer au beau milieu du calme de la campagne du Cher.
Vacant docilement à diverses occupations : promenade dans le centre de Bourges, contemplation architecturale de la cathédrale, tentative de visite du Palais Jacques Cœur et le repérage de son théâtre par la même occasion pour le soir même... Je décide de me rendre au Palais d’Auron après une légère sustentation à l’un des multiples boui-boui servant notamment des plats savoyards, alsaciens, italiens, mexicains en sus des traditionnels kebab (mais je ne suis pas là pour faire une rubrique gastronomique). Le temps de s’installer, on remarque vite que le spectacle prend du retard. Il ne reste plus qu’à prendre son mal en patience (50 à 60 % du temps de tout bon festivalier). Par moment, un des membres du groupe Architecture In Helsinki pointe le bout de son nez. L’un d’entre eux va même jusqu’à venir sur le bord de la scène se frotter les mains d’impatience. Enfin, les huit filles et garçons s’installent auprès de leurs instruments avec la tâche d’ouvrir les cinq heures de musiques. Ce show commence d’ailleurs difficilement. Entre les changements de places intempestifs des protagonistes et la balance qui a l’air d’être mal (bizarrement ?) réglée, les premières chansons sont décousues et le fabuleux It’s 5 ! semble quelque peu déglingué...
Ce n’est qu’à partir de Neverevereverdid que ce petit incident est résolu. Cela permettra de pouvoir pleinement profiter de la marche funèbre introductive du morceaux emmené par les cuivres et de son contrecoup de folie ! Ici et là, quelques personnes dansent sur les mélopées folles des Australiens qui eux s’amusent beaucoup. La majorité du public n’a pas l’air d’accrocher malgré de chaleureux applaudissements. Il est vrai que les découvrir sur scène sans avoir jeté une oreille sur leurs albums est risqué. Mais de là à entendre dire que les cuivres ne servent à rien... !?! Enfin bref, les architectes se retirent satisfaits et heureux (tant mieux, car on n’a pas finit d’entendre parler d’eux...).
Ce qui suit est assez spécial car c’est encore sous le coup de l’émotion que je m’attaque à Cocorosie ! Outre l’installation d’un écran qui présage un petit film et peu d’instruments (basse, piano, guitare sèche, petite harpe et un sampler pré-chargé), on se dit que les sœurs nous préparent quelque chose d’assez intime. Que nenni ! Mais attaquons nous à leur entrée : un chef indien masqué à la vénitienne (!) débarque avec un grand gaillard grimé d’un masque de la « commedia dell’arte » en tutu et collant accompagné de quatre autres personnes. Les premières chansons sont très electro et les sœurs jouent de leur voix en faisant tomber les masques. Par ailleurs, après quelques minutes, on se rend compte que les rythmiques ne sont pas tenues par le sampler, mais par “l’homme tutu” et un de ses comparses, adepte du tout à la bouche ou comment nous faire une démonstration de l’art du "human beat boxing". Et franchement, c’est génial !! Après renseignements, notre “homme tutu” se révèle être Spleen, un MC des environs de Paname.
La scène se transforme vite en “voice performance” avec une voix d’enfant américaine, une diva, un rappeur au bon flow et une voix soul... Bref, un bon mélange comme on les aime ! Ce groupe est surprenant, la basse qui l’accompagne est à la fois discrète et puissante. Les instruments sont de moins en moins utilisés, mais la magie ne disparaît pas pour autant. Au final, la scène devient une piste de danse hip-hop où tout le monde y met de sa personne. Ce set de cinquante-cinq minutes est passé bien vite et on en redemande. Imaginez ! L’intensité de Sigur Ròs alliée à la profondeur d’un Portishead et bien plus encore !!!
C’est à cet instant que je me rend compte que le set de cet après-midi ne finira vraiment pas à l’heure et que je risque de manquer le début de Final Fantasy au théâtre Jacques Cœur. Pour l’instant, place est faite pour la belle et sombre Émilie Simon et ses quatre acolytes. Le concert commence par les deux premières chansons de Végétal (Alicia et Fleur De Saison). Album qui sera pratiquement joué en intégralité. Je me complais dans l’observation de Cyrille Brissot, véritable sorcier du son avec tous ses instruments bricolés, sampler digital et autres bizarreries... Qui plus est, avec son chapeau haut de forme et ses lunettes, son apparence tient plus du magicien. Bien entendu, on se laisse bercer par la voix envoûtante de la rose noire qui joue avec son public et les différents photographes. Ce n’est qu’à la moitié de sa prestation qu’elle revêt sur son poignet son “arrangeur de voix digitale en temps réel” pour nous jouer Swimming, morceau magique et intense qui hypnotise toute la salle du Palais d’Auron. La grande originalité de ce live réside non pas dans le traitement des sons par Cyrille (on ne voit pas bien ce qu’il fait et en plus, les instruments sont tellement singuliers qu’on ne comprend pas leur utlisation) mais dans leur création. Le percussionniste joue beaucoup de sa personne en se frappant le torse, se mouillant les mains pour créer quelques clapotis, utilisant des jouets dans un piano ouvert. D’ailleurs, s’il le pouvait, je suis sûr qu’il entrerait entièrement dedans. Émilie, quant à elle, chante de sa plus belle voix et nous fait démonstration de son univers fantasque, onirique et doux. La reprise des Stooges, I Wanna Be Your Dog commence lentement. Au point qu’on ne la reconnaît pas. L’intensité est bien présente lorsque les guitares rugissent. Le rappel est composé de My Old Friend alors que je m’attendais à une clôture avec Cendres. Tant pis, j’aurais au moins pu la voir à l’œuvre...
Émilie partie, je regarde ma montre et constate que l’heure est bien avancée : il ne reste plus qu’une demi-heure pour faire monter et jouer les Flaming Lips ! Je remarque aussi que la salle se vide d’une manière impressionnante, il ne restera que la moitié de la salle pour ce concert ! Je me mêle alors à cette foule en me demandant si je vais assister à ce dernier show ou bien si je cours voir le Canadien Final Fantasy. C’est alors que j’entends des fans hurler et remarque le leader des Flaming Lips gérer l’installation des roadies. Ce coup d’œil à la scène me fait voir deux canons à paillettes, une Wonder Woman et un Captain America ! Me rappelant le commentaire de Giom à leur propos, je décide de rester les voir par curiosité. Et grand bien m’en a pris puisque dès les lumières éteintes, la musique résonne fortement et des ballons de baudruches de quatre-vingt centimètres de diamètre sont éjectés des backstages par des Pères Noël et autres aliens spatiaux. Ces derniers ont chacun un côté de la scène et dansent sur les divers morceaux. Le chanteur est très communicatif et nous explique (entre deux ballons dans la figure) que les Pères Noël et les aliens sont respectivement les représentants de l’Église catholiques et de l’Église de Scientologie (hués de la salle pour les deux parties). Lors de leur guerre musicale, ils se battent à coup de lampes torches surpuissantes telles des sabres laser avec le groupe jouant au centre et nous nous débattant avec le reste de ballons. À un moment, je reconnais un des membres d’Architecture In Helsinki (une longue barbe et des dreadlocks d’un bon mètre pour un Père Noël, c’est peu conventionnel). Les Australiens fous sont donc de retour. Vers la fin, Wayne Coyne nous révèlera l’identité de ces personnes masquées : vous savez déjà qui sont les Santa Claus et les extra-terrestres sont habités par les Cocorosie et quelque membres du staff. Le rappel se fait après une bonne heure de show et Wayne nous explique que la chanson qui suit, malgré son âge, est toujours d’actualité. Le tout ponctué par un « Fuck George Bush ».
22 heures passées, je me rends sur les lieux de mon dernier concert, la tête encore pleine de riffs et me demandant si je n’allais pas quitter le festival à la place. Mais l’envie de voir Jack The Ripper est plus forte. J’en profite pour découvrir aussi le magnifique plafond du théâtre Jacques Cœur en attendant les huit Français.
Ces derniers arrivent seulement à sept. Le trompettiste est resté derrière, ne jouant pas sur le premier morceau. Et ce sera ainsi pour tous les autres musiciens ne jouant pas. Ils préféreront s’éclipser plutôt que de rester plantés là. Les morceaux sont joués de manière très similaire aux albums, sauf dans les moments de tensions où l’intensité sonore augmente également. Le chanteur a le teint pâle et les yeux noircis par le maquillage. Son comportement suggère celui d’un toxicomane mais le personnage vit ce qu’il chante, des névroses et sentiments psychologiquement dérangeants. Le violoniste, lui, ressemble à Lenny Kravitz avec ses cheveux hirsutes et ses grosses lunettes. Le bassiste se cache derrière ses cheveux. Le pianiste reste serein, tout comme les deux guitaristes. Par moment, le chanteur descend de la scène pour venir parmi nous, voire même se jeter sur de pauvres malheureux qui n’en demandaient pas tant ! Un long rappel satisfait nos oreilles ainsi que quelques groupies hurlantes...
Il ne me reste plus qu’à repartir sur les routes, et penser à ne pas m’endormir pendant ce petit voyage de quatre bonnes heures. Qui passeront très vite grâce au souvenir de ce week-end musical comme je les aime. On en ressort heureux, plein de notes de musiques courant sur les plaines enrichies de mon imagination...
[1] dixit un membre de la rédaction...
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