Dernière publication :
mercredi 15 avril 2015
par mot-clé
par index
par Alexx le 12 juillet 2006
En ce début de période estival, les festivals fleurissent et font le bonheur d’amateurs de musique. Cette semaine, nous commencerons donc avec un jeune festival un peu à part des monstres que nous aurons le plaisir de vous faire partager cet été. Alors certes, ce n’est pas du rock, mais aller voir ailleurs ce qui se fait, permet de mieux comprendre les évolutions de certains groupes qui se tournent vers les affres de l’électronique [1]. Rendez-vous donc avec Scopitone, festival des musiques, spectacles, images et arts numériques.
En ce dernier jour de juin donc, Scopitone ouvre ses portes dès le matin avec ses expositions “arts et loisirs numériques” avec découverte du monde numérique pour les enfants et les moins grands. Mais le plus intéressant dans cette version jour, reste les “installations”, regroupements d’artistes et de créateurs de quelques bizarreries plus intéressantes les unes que les autres ; tel cet échange corporel par sofas interposés. L’un enregistre les mouvements de son occupant pendant que le deuxième restitue ces mêmes mouvements offrant à son hôte un mode de communication, de toucher différent et somme toute assez intéressant. Mais on peut aussi s’amuser à jouer les DJ chorégraphes avec l’installation ou le spectateur peut créer son morceau avec divers instruments préenregistrés chacun liés à une danseuse donnant ainsi le plaisir des oreilles mais aussi des yeux... Bref, beaucoup d’interactivité lié à des créations toutes plus captivante les unes que les autres.
Vendredi 30 Juin
Mais partons maintenant en direction de Scopitone nuit qui reste la finalité de ce festival. Arrivé sur le site, je me dirige vers la Halle contenant la scène principale où finissent de jouer les Exploring Room enfermés dans leur cube. M’informant de l’ordre de passage, je me rends sous le Chapiteau, lieu plus rock où jouent les Japonais de Mono. Aussitôt face à ce quatuor, on sent qu’il y a du Mogwaï ou du Godspeed You !Black Emperor là-dessous. Le post-rock est ici tendu et intense avec des morceaux ne dépassant pas les dix minutes. Ces durées justifient donc les sautes d’humeur que l’on peut ressentir, de l’apaisement à la fureur en un clin d’oeil. Par ailleurs, tels les guitaristes de GY !BE, celui de Mono reste confortablement assis, penché sur sa six cordes...
Mais Matmos va commencer son show sous peu. Je quitte alors le Chapiteau et arrive juste pour le début des Californiens. Le set monte vite en puissance et les effets visuels liés à la musique ne sont pas pour déplaire. L’abstract hip-hop que nous livre les deux compères est jouissive et fait vite remuer les quelques motivés au devant de la scène. Le fait que les chansons ne soient pas distinctement détachées, joue beaucoup sur le déroulement du show. Ce dernier passe à une vitesse fulgurante ! C’est encore sur mon petit nuage que je retourne sous le Chapiteau voir Why ?, petit combo américain inspiré de Brian Wilson.
Mené par un moustachu aux bouclettes noires, le groupe utilise très peu de guitare et s’appuie principalement sur différents claviers pour livrer des chansons pop. Le public semble accrocher mais peu connaissent les morceaux aux vues des applaudissements de début de chansons.
Peu convaincu, je repars à la Halle pour assister au ciné-concert des Improvisators Dub sur Tempête Sur l’Asie, film muet datant de 1928 et réalisé par Poudovkin. Je ne pourrais pas vous compter l’histoire car j’étais plus porté par la musique rythmée qu’est la dub. Certes la première partie est entraînante et les Bordelais maîtrisent bien leur sujet. Malheureusement, la deuxième partie n’est pas du tout convaincante et le public le fait savoir en demandant un peu plus de beats frénétiques. Constatant que le soufflé redescend et que de son côté, le groupe continue ses pérégrinations electro-minimalistes, je m’en retourne sous le Chapiteau voir Wax Tailor.
Plus intrigué que déçu par les précédents sets, je me dis que le DJ français ne va certainement pas décevoir. Et je ne me trompais pas. Accompagné d’un violoncelle et d’une flûte traversière, Wax Tailor offre une performance efficace et épurée. Les deux musiciennes rendent les chansons plus denses. Par moments, une chanteuse à la voix de femme-enfant vient transformer l’abstract hip-hop en trip-hop. Comme à l’habitude de ce genre de prestation, le DJ gère aussi la vidéo en arrière-plan. Un bon set que le public apprécie et qui oscille entre douceur et beat exalté.
Mais finissons ces allers-retours entre le Chapiteau et la Halle pour aller assister au show des Coldcut. Ces derniers sont annoncés en tant que concert-vidéo. Le double écran géant derrière eux affiche déjà une lumière éclairant le nom du groupe. Puis arrivent les deux patrons de Ninja Tunes accompagnés de deux autres DJs. Le set commence alors et la musique monte doucement avec le zoom partant des tréfonds de la galaxie pour arriver sur notre planète et s’arrêter sur le toit de la Halle. Enfin, la musique explose et les vidéos suivent. La performance donnée par le groupe est impressionnante surtout vu de derrière où l’on surplombe les sept écrans géants qui seront tous de la partie pour ce jeu de découpage, collage sonore et visuel. On aperçoit beaucoup de choses et les yeux ne trouveront pas de repos avant le fin. La grosse particularité réside dans l’intégration des films dans la musique. Ceci a pour conséquence de jouer encore plus avec nos sens qui sont trop occupés pour nous faire penser à la chaleur qui réside dans la salle. La densité musicale et les clins d’œil pour Français [2] ont fait de ce set le meilleur de la soirée, nous prouvant que l’improvisation était de mise avec de tels génies !
Samedi 1 Juillet
Ce soir, la belle Émilie Simon joue et rien que pour ça, ça valait le déplacement. Le show de la demoiselle est beaucoup plus intense que celui auquel j’avais assisté deux mois plus tôt à Bourges. Et contrairement à la veille à la même heure, la halle est déjà bien remplie. Son set est toujours principalement basé sur son dernier album Végétal. Elle le jouera presque en entier à l’exception d’Alicia. La belle se déhanche et le public réagit au quart de tour. Cette fois-ci, je m’étais placé près de Cyrille, (toujours habillé de son haut de forme et de sa longue veste noir lui conférant le titre de magicien du son) pour pouvoir l’observer dans ses créations sonores hypnotisantes. En vain ! Le percussionniste se démène comme un beau diable pour faire compléter le tout et s’amuse toujours autant sur le piano d’Émilie. On peut entendre ici et là quelques personnes lui crier leur amour. Ce soir le public a l’air en forme et la belle aussi. Dommage que le concert n’ait pas duré plus longtemps.
Surtout que ce soir, Scopitone se retrouve pris en otage par un match de football. Lors de la diffusion de la première mi-temps, quelques hués retentissent mais une bonne partie s’assied et regarde. M’éclipsant, je me dirige vers le point presse où je rencontre un confrère. Une conversation plus tard, je me rends compte de la propreté du sol : pas de tapis de gobelet ! Une belle initiative fait que trente-cinq gobelets ramenés au stand recyclage donne droits à un ticket boisson. Une idée lumineuse !
C’est donc après une mi-temps que les spectacles reprennent à la Halle pendant que la diffusion continue sous le Chapiteau et que messieurs Truffaz (trompettiste jazz), Talvin Singh (percussionniste), et Murcof (DJ électronica) entrent sur scène pour nous offrir un set d’electro-jazz des plus envoûtants et surprenants. D’un côté, Murcof pose les bases avec quelques mélopées et autres rythmiques que Talvin va suivre et apposer sa patte pour enfin entendre une trompette jazz qui sait se faire retravailler par un sampler implémenté de quelques distorsions. On aurait pu craindre le pire car chacun des trois pouvait étouffer les autres dans leur prestation respective. Heureusement, ce n’est pas le cas et l’entente entre ces musiciens est telle que l’on ressent une osmose dans les morceaux joués. Conservant les codes du jazz, chacun d’entres eux a le droit à une mise en avant dans une improvisation. Bref, que du bonheur !
La place est laissée à Laurent Garnier, exportateur de techno et membre d’une “french touch” dépassée. Ce soir, le DJ est accompagné par Bugge Wesseltoft pianiste electro-jazz de son état (la Norvège pour ceux que ça intéresse), et par Philippe Nadaud, saxophoniste venant prêter main forte à nos deux compères. Les beat techno retentissant, le clavier (rhodes ou harmonium) et les sax partent sur les chemins ardus de l’impro sur les compositions de Laurent, prenant par moment le rôle du chef d’orchestre. En effet ce dernier prévient de ses accélérations de rythme pour que ses accompagnateurs puissent nous livrer le meilleur d’eux mêmes et de leurs instruments. L’alliance du free-jazz à la techno est surprenante et excitante. St Germain avait démocratisé l’electro-jazz il y maintenant cinq ans, c’est au tour de Laurent Garnier de lui apporter sa patte et par là-même un nouveau souffle !
Déjà vu dans nos pages ici, Birdy Nam Nam arrive sur la scène pour faire connaître les affres de l’abstract hip-hop à quatre. Nous confiant leur fatigue après huit sets en neuf jours, ils nous promettent un show de qualité. Et effectivement, l’ambiance est là et ils n’hésitent pas à faire péter les beats ! C’est sûr, les quatre prennent du plaisir à nous balancer leurs différentes compositions qui rappellent par moments le Hello Nasty instrumental des Beastie Boys et plus particulièrement Intergalactique. Réclamant du bruit tout au long de leur prestation, le public les acclamera pendant leur dernier morceau totalement endiablé...
Epuisé, je me dis que j’aurais du mal à profiter pleinement des deux derniers artistes, je préfère donc m’éclipser. Reste que Scopitone est un excellent festival où l’ambiance est électrique !
[1] Et puis, ça fait pas de mal !
[2] On a pu apercevoir Pierre Richard, Louis de Funès, Jacques Chirac et bien d’autres encore
Répondre à cet article
Suivre les commentaires : |