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mercredi 15 avril 2015
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par Kris le 23 janvier 2007
paru en octobre 2002 (Hellcat)
Sur le papier, certaines choses semblent incroyablement appétissantes et on en attend beaucoup. Des collaborations inattendues alléchantes. Des duos qui donnent envie. Parfois cela donne des choses dingues comme Gorillaz. Parfois cela déçoit énormément comme l’équipe du PSG 98-99. Mais ici, chose rare, malgré l’effroyabilité qui nous fait trésailler à la vue de la composition du groupe, l’album qui en découle est une excellente surprise qui dépote du tonnerre. Le projet Transplants a tout d’abord germé dans l’esprit du leader et chanteur des Rancid, Tim Armstrong. Désireux de plancher sur un projet plus éclectique que l’univers punk-rock dans lequel il évolue, Armstrong engage son roadie de l’époque Rob Aston pour écrire les paroles des chansons et chanter à ses côtés. Les Transplants sont nés. Sera greffé par la suite au projet le batteur de Blink 182, Travis Barker. Il faut bien avouer que sur un papier où figure le chanteur de Rancid, le batteur de Blink 182, des collaborations d’artistes de la scène punk, une pochette où figure des blancs-becs tatoués jusqu’à l’ongle, il y aurait de quoi franchement hésiter avant de lancer la galette dans le lecteur CD...
Heureusement que la curiosité ne nous a pas fait défaut sur ce coup-là, car nous serions passés à côté d’une bien belle surprise. Bien sûr on retrouve certains terrains connus et familiers, des sonorités qui rappellent les influences premières de l’univers artistique des membres respectifs des Transplants. Cependant, on assiste à une métamorphose, une éclosion, un papillon sortant de sa mutation. Ou bien serait-ce plutôt une étoile filante ? Un éclair de génie qui aurait jailli d’une collaboration impromptue que l’on avait condamné d’avance ? Dans tous les cas, impossible de rester insensible face aux rafales assenées dès les premières écoutes. Diamonds And Guns est le prototype du single parfait des années 2000. À l’image de l’album, Diamonds And Guns est varié, alternant les rythmes et les genres. Les grosses guitares sont là, les claviers lo-fi sont là, le rap hardcore de Rob Aston est là, le ska de Tim Armstrong est là, la batterie vivace et loquace de Travis Barker est là. La formule est quasi-parfaite. Et le tout en quatre minutes, emballé c’est pesé ! Ce premier album des Transplants renferme une richesse incroyable qui se révèle redoutablement efficace. L’album est de toute évidence calibré pour un auditoire large se cantonnant dans les normes avec tous les titres variant de deux à quatre minutes chacun. Le contenu également a le mérite de pouvoir plaire aussi bien à l’auditeur occasionnel qu’à une oreille un peu plus pointue.
L’ouverture sur Romper Stomper mets sur les rails dès les premières secondes. Démarrage en trombe tambour battant, le rythme s’accélère tandis que la voix s’énerve et ouvre ainsi la porte à des influences hard-rock progressives. Puis tout retombe. Et sur ses pattes s’il vous plaît, pour mieux rebondir. On assiste à un Tall Cans In The Air funky et bagarreur. Le refrain retombe sur un politiquement incorrect « Fuck You », et les Transplants joue du ska, du bon gros rock à grosses guitares, agrémenté de flows hip-hop des rues. Vacillant tantôt dans l’amusement, tantôt dans la brutalité digne de Rage Against The Machine, les trois Transplants sont désormais affranchis de leur étiquette de néo-punk-ska-rockeurs qui, il faut bien le dire, n’est pas réellement des plus flatteurs. Le mariage improbable du punk et du hip-hop. Ou bien serait-ce plutôt du hard-rock et du reggae. N’importe, les Transplants correspondent en tout point à la définition de la fusion, et renvoient au loin les pompeux Red Hot Chili Peppers. En témoignent les festoyantes et joyeuses D.J., D.J. ou California Babylon, flambeaux rayonnants d’une réussite musicale pleinement assumée. On lorgne ici du côté de Fatboy Slim avec des titres aux refrains entêtants et captivants, aux tendances dansantes, au charme irrésistible. Même les ballades rock ne semblent pouvoir choisir leur camp, aussi énergique que (relativement) calme. Weigh On My Mind ne semble pas pouvoir se languir, emportée par la méchante batterie vive de Barker, et ce malgré le chant nonchalant de Brody Dalle, chanteuse des Distillers et ex-femme de Tim Armstrong. Le rap se taille également une bonne part du lion, s’incrustant par endroits, et prenant parfois l’ascendant sur certains titres. Le titre D.R.E.A.M. rappelle très aisément Cypress Hill ou Public Enemy et baigne sous haute influence hip-hop, empruntant le refrain de C.R.E.A.M. du Wu-Tang, et montre parfaitement la connivence efficace et tant rêvée entre rock et rap. Un rapprochement de ces deux genres que l’on avait rarement vu aussi efficace depuis les coups de canons Walk This Way de Run DMC / Aerosmith et Bring The Noise de Public Enemy / Anthrax. On finit en beauté sur un hiératique Down In Oakland, comptine de western moderne emmenée par un Tim Armstrong dans le rôle du cowboy punk.
Surprenant de bout en bout - sauf peut-être l’inutile Quick Death, bis repetita du premier titre Romper Stomper - ce premier album des Transplants est une réussite et une énorme surprise. Imposant leurs univers musicaux et inoculant leurs influences respectives, les Transplants ont créé un univers parallèle. Un monde où la classification des genres devient inutile et où seuls l’hédonisme et le plaisir de jouer et d’écouter la musique qu’on aime prime. Et dire qu’on a failli tourner le dos à ce petit régal... On a failli être con...
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