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mercredi 15 avril 2015
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par Fran le 19 février 2005
Date de sortie : 22 Novembre 2004 / Production : Steve Lillywhite / Production additionnelle : Chris Thomas, Jacknife Lee, Nellee Hooper, Flood, Brian Eno, Daniel Lanois, Carl Glanville / Enregistré par Carl Glanville assisté de Chris Heaney à Hanover Quay, Dublin et dans le Sud de la France.
Voilà des mois que les fans trépignaient d’impatience mais le douzième U2 est enfin arrivé ! Il y a bien eu entre temps la "machine à DVD" pour satisfaire entre autres les revendications des plus férus [1], mais c’est bien le successeur de All That You Can’t Leave Behind (2000) que l’on nous livre en cette fin d’année 2004.
Son titre How To Dismantle An Atomic Bomb désarçonne d’entrée de jeu, tout comme la pochette sobre genre premier album de groupe punk avec têtes de mauvais garçons, lunettes noires, fermetures éclairs, et à la nonchalance affichée. Le retour aux manettes du producteur Steve Lillywhite et le single explosif Vertigo pouvait faire présager un album résolument rock, faisant la part belle aux riffs ravageurs de Edge soutenus par une section rythmique au taquet. Mais avec U2, on est habitué aux brouillages de pistes et cette impression première n’est qu’un leurre. L’album se révèle rapidement plus complexe.
Les références punks de Vertigo rappelant les premiers singles du groupes -Out Of Control, I Will Follow- cèdent la place aux envolées caractéristiques de Edge. Miracle Drug fonctionne comme une bombe à retardement, les errements guitaristiques sont perpétuellement contrariés par des barrés frénétiques tandis que la basse est entêtante à souhait.
Sometimes You Can’t Make It On Your Own est emplit d’une émotion palpable où Bono évoque les derniers moments de vie passés avec son père décédé la veille du concert au Slane Castle. Cette disparition lui influencera la majeure partie des textes de l’album. Celui de Love And Peace Or Else fait preuve d’un certain désanchantement mais ce morceau constitue le plus bel effort de l’album. La production d’Eno, Lanois et Flood est d’entrée reconnaîssable avec un son inquiétant qui nous replonge dans les années les plus excitantes du groupe caractérisées par une succession d’univers musicaux différents.
La suite est moins convaincante, City Of Blinding Lights sonne comme un pastiche de Where The Streets Have No Name tandis que A Man And A Woman est une ballade classique au sérieux goût d’inachevé. Néanmoins, une déflagration électrique annonçant All Because Of You (single US) s’est immiscée entre ces deux réelles déceptions. Ce titre renoue une nouvelle fois avec un son brut à la configuration instrumentale classique "guitare-basse-batterie" et révèlera sans nul doute toute sa substance en live.
Autre très belle réjouissance de l’album Crumbs From Your Table. Edge et Adam ont décoché un riff qui fait mouche, Bono est euphorique tandis que Larry relance le combo quand celui-ci a le malheur de reprendre son souffle. La suite est toute aussi excitante quoique apaisée. One Step Closer se révèle être une ballade intimiste magnifique avec sans doute l’un des plus beaux textes que Bono ait écrit tandis que Original Of The Species, aux accents brit pop, permet de se rassurer sur ses capacités vocales.
L’aventure se termine malheureusement sur une fausse note Yahweh. Sorte de supplication du plus mauvais effet emmenée par une batterie et une basse anecdotiques. On lui aurait largement préféré Fast Cars [2], véritable ovni aux accents orientalisants et au texte ironique constituant une sorte de réponse à Vertigo. La boucle est bouclée !
Cet album s’inscrit donc dans la continuité de All That You Can’t Leave Behind en proposant une synthèse des différents univers musicaux que U2 a pu explorer en 25 ans d’existence. Le résultat est plutôt satisfaisant même s’il on aurait préféré une plus grande prise de risques dans la structure des morceaux qui est souvent prévisible et qui aurait permis d’être en phase avec les textes sombres et torturés de Bono. Mais il serait absurde de reprocher à U2 d’exploiter ce qu’il a créé, leur révolution musicale est désormais derrière eux. Après avoir digéré le punk, été classé groupe new-wave, porté l’étendard du rock héroïquo-romantique (ne cherchez pas çà ne veut rien dire), intégré l’héritage américain puis la musique industrielle, la techno... que peut-on encore attendre de plus de ce groupe ? Fort est de constater qu’après le très/trop ambitieux Pop (1997) qui désorienta de nombreux fans, nos Irlandais donnent désormais la priorité à l’efficacité produisant des mélodies somptueuses taillées pour la scène. On pourrait y voir une démonstration pathétique d’un groupe vieillissant tentant vainement de survivre au sein de la nouvelle scène rock, mais cette livraison révèle une nouvelle fois une alchimie entre ses membres et un son toujours aussi singulier, souvent imité...
Cet album ravit donc les fans du quatuor dublinois, mais aura beaucoup de mal à faire changer d’avis ses détracteurs qui font preuve d’une toute aussi grande fidélité.
[1] Le dernier concert de la tournée européenne en 2001 avait été diffusé sur plusieurs chaînes de télévision. Les fans, par le biais d’une pétition circulant sur le net (et pour la plus grande joie d’Universal) avaient réussi à faire céder le groupe pour que ce dernier accepte la sortie d’un deuxième DVD de l’Elevation Tour. Ce sera chose faite en 2003 avec U2 Go Home : Live From Slane Castle.
[2] Titre présent uniquement dans l’édition limitée CD/DVD/BOOK et dans l’édition UK de l’album.
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