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mercredi 15 avril 2015
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par Reki le 27 juin 2006
paru en mars 2006
Deux mots me viennent souvent à l’esprit lorsque je pense à Serge Gainsbourg : la classe destroy. Ces deux mots pourraient aussi convenir à cette compilation de reprises anglo-saxonnes des chansons du génie Gainsbourg. De mots doux susurrés en duos de choc, les musiciens anglo-saxons ont sans doute (re)composé le plus bel hommage rendu à Gainsbourg depuis sa mort, il y a quinze ans. L’alliance entre l’anglais et le français ressemble à la pochette du disque, à l’entrelacement de Jane Birkin et de l’homme à tête de choux, symbiose parfaite de deux antipodes. On se demande souvent si un voyageur ne perçoit pas mieux l’essence d’un pays que ses autochtones, il semblerait qu’il en va de même en musique quand on goûte à ce disque.
La beauté du CD tient d’abord à la délicatesse des adaptations de Boris Bergman et de Paul Ives. La poésie des textes de Gainsbourg paraissait intraduisible ... Boris Bergman, avec le concours de Paul Ives, a pourtant traduit en anglais quatorze de ces chansons, sans en égratigner les subtilités et la sensibilité. « Pour respecter Gainsbourg, il a fallu trahir la lettre », a expliqué Boris Bergman, auteur, parolier, écrivain et acteur né à Londres en 1945, qui a écrit une multitude de paroles de chansons pour, parmi d’autres, Alain Bashung, Christophe et Paul Personne. Grâce à lui, Requiem Pour Un Con devient Requiem For A Jerk, sans prendre une ride, et Sorry Angel se transforme en A Song For Sorry Angel sans perdre une rime.
Puis, il y a la ribambelle de groupes anglo-saxons qui font revivre brillamment la musique de Gainsbourg. On aurait pu s’attendre à quelques fausses notes, il n’en est rien : chaque reprise a son originalité, sa tonalité, sa saveur. Les timbres se succèdent en se réappropriant les chansons, de la reprise rock des Franz Ferdinand, accompagnés de Jane Birkin, A Song For Sorry Angel à la ballade fragile de Carla Bruni, Those Little Things (Ces Petits Riens). Chaque chanson est l’association de deux (voire plus) univers musicaux, et l’esprit de Gainsbourg est conservé et renouvelé. Les inspirations de Gainsbourg ne s’estompent pas mais gagnent au contraire une nouvelle transcendance : la mélancolie (I Just Came To Tell You That I’m Going de Jarvis Cocker et Kid Loco) côtoie le mystère (L’Hôtel de Michael Stipe), et l’humour (Requiem For A Jerk de Fautlin, Brian Molko et Françoise Hardy) la sensualité (I Love You (Me Either) de Cat Power et Karen Nelson) ; on connaissait la reprise de Je T’Aime Moi Non Plus par Brian Molko et Asia Argento : cette nouvelle version par Cat Power et Karen Nelson n’a rien à lui envier, et cette chanson mythique conserve à la fois sa subversion et son pouvoir aphrodisiaque. Parmi les autres interprètes de Gainsbourg que l’on ne pourrait oublier après l’écoute de ce disque : Portishead, Tricky, Marianne Faithfull, The Kills, et ce choix n’est pas exhaustif ...
« Je ne veux plus entendre que le silence » a dit un jour Serge Gainsbourg, c’est ce dont rêvera chaque auditeur de ce disque après l’avoir dégusté, mais le silence après la musique de Gainsbourg, c’est toujours du Gainsbourg...
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