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par Oh ! Deborah, Aurélien Noyer, Emmanuel Chirache, Thibault, Laurence Saquer le 23 juin 2009
Parce que l’homme a toujours aimé se faire peur, voici quelques chansons flippantes pour la playlist de la semaine.
The Red Telephone - Love (Forever Changes, 1967)
Notre ami Arthur Lee contemple les ambulances depuis sa baraque qui surplombe L.A. Ce spectacle macabre lui inspire cette chanson inquiétante, aux accents baroques un brin angoissants. Derrière les oripeaux hippies se cache donc un mal de vivre qui réclame sa liberté. "I want my freedom" réclame le chanteur sur fond d’arpèges troublants.
Black Sabbath - Black Sabbath (Black Sabbath, 1970)
Des cloches qui sonnent le jugement dernier, un riff satanique et lancinant, des percussions primitives, une voix incantatoire qui se faufile parmi les silences pour hurler "please god help me !" : Voici le premier titre de Black Sabbath, tuerie démoniaque à écouter impérativement tout seul dans le noir. Inutile de préciser que la cavalcade wagnérienne qui fait office de pont porte elle aussi le sceau du diable.
Know - Nick Drake (Pink Moon, 1971)
Au centre de Pink Moon, troisième et dernier volet du songwriter, un morceau de guitare sèche et lancinante aux cordes toujours plus pinçantes, le fredonnement de Nick Drake, obsédé par l’ennui, qui persiste de façon malsaine, un chant qui tremble. Tandis que les autres ballades oscillent toujours entre mélodies tendres et expressions existentialistes, Know (I’m not there) s’impose comme l’étrange et mystérieuse métaphore d’une impasse morbide causée par le vide intersidéral submergeant l’auteur.
The Bewlay Brothers - David Bowie (Hunky Dory, 1971)
Ce titre de David Bowie mériterait à lui tout seul un roman, tant il pénètre l’âme de celui qui l’écoute. Incompréhensibles, les paroles dérangent tout autant que ces délicats quoiqu’étranges accords de guitare acoustique, qui prennent lors du refrain des aspects troublants. "Hanging out with your dwarf man", crie alors Bowie, et la folie gagne l’auditeur aussi sûrement que dans un asile d’aliénés. Sans oublier ce final démentiel sur lequel Bowie modifie sa voix en la pitchant (d’où cette impression d’entendre un gnome chanter les chœurs, comme sur le bien nommé Laughing Gnome). Et si on vous disait qu’en plus on y entend du mellotron à vous glacer le sang et une mélodie surréaliste qui hantera le plus sensé des hommes jusqu’à la fin de ses jours... La plus belle chanson de Bowie ? peut-être.
Ain’t No Sunshine - Rahsaan Roland Kirk (Blacknuss, 1971)
A l’origine, ce titre de Bill Withers possède la mélancolie des histoires d’amour. Revu et corrigé par le jazzman saxophoniste Roland Kirk, la musique prend des allures obsédantes et terribles. De la tristesse de l’amoureux esseulé ne subsiste que la solitude absolue.
The End - Nico, (The end, 1974)
Reprise du mythique single des Doors, The End devient ici un hymne abyssal aux accents germaniques déclamatoires et exarcébés. Vagues d’harmonium, piano décousu, parties d’orgue spasmodiques et brêves apparitions de chœurs célèstes. A 5 :40, la prêtresse conjure l’espace et se prend pour le diable lorsqu’elle récite les mots glaçants de Morrison. « "Father ?" "Yes, son ?" "I want to kill you. Mother, I want to ..." » avant de pousser un vrombissement luciférien. Erreur monumentale : le morceau se termine par une impro jazzy malvenue et sans rapport.
Frankie Teardrop - Suicide (Suicide, 1977)
Morceau encore plus dépouillé et minimal que le reste du mythique premier album de Suicide, Frankie Teardrop dure 10 minutes. Beat rapide et relents synthétiques en arrière plan, la peur fait son effet quand Alan Vega pousse des cris apeurés, hystériques et imprévisibles. Sur ce morceau absolument flippé et claustrophobe, le chanteur semble assister à un assassinat engendré par un jeune ouvrier désespéré, tuant femme et enfant. Au milieu : des bruits de caissons qu’on traîne par terre. A la fin : des échos froidement industriels et des cris saturés démentiels. Prisonnier de son destin, Frankie is dead.
Albatross - Public Image Ltd. (Metal Box, 1979)
Sans chercher à comprendre de quoi parle cette chanson, il faut reconnaître que la voix de John Lyndon et les riffs malsains de Keith Levene atteignent des summums de paranoïa.
Heart and Soul - Joy Division (Closer, 1980)
Comme souvent, le rythme est chronique et polaire, le climat, crispé. Et quand viennent les guitares éperdues, erratiques, le malaise solitaire se décuple, la lassitude se matérialise, doublée par un synthé étrange et latent à peine audible mais maintes fois réutilisé dans les années à venir. Le sujet de nos frayeurs siège dans ces mots : Heart and soul, one will burn. Force est de reconnaître, sans parallèle forcé, qu’un destin se jouait. Pendant ce refrain dont la morbidité est complaisante, acceptée et naturelle, dicté comme nulle part, une âme erre dans la pièce, un frisson nous traverse.
Thriller - Michael Jackson (Thriller, 1982)
Parce que Michael en loup-garou, ça fait peur. Et puis cette ligne de basse fabuleusement sautillante, suivi du break le plus flippant de la terre (boum boum, répété à l’infini pendant que Vincent Price récite son texte par dessus des synthés de mauvais augure) !
Pornography - The Cure (Pornography, 1982)
Pour clore le sujet de ses imputations venimeuses, Smith nous punit tous et nous déteste sur ce morceau expérimental type BO de vie d’un meurtrier, en attendant l’exorcisme. I must fight this sickness, find a cure. Des bruissements difformes et un rythme tribal (rappelant Atrocity Exhibition de Joy Division) jubilent derrière le mur d’un orgue impénétrable. Progressivement, des gémissements et bribes de langue allemande passés à l’envers envahissent l’espace lorsque des esprits sournois viennent installer la folie.
From Her to Eternity - Nick Cave (From Her to Eternity, 1984)
Sur cette expérience déstructurée et convulsive, cinq minutes d’horreur absolue, de bruitages oppressants, de piano qui rend fou. Pire qu’un film d’épouvante, From Her to Eternity éveille des images réalistes, malsaines et innommables type Nuit des Longs Couteaux. Nick Cave se désincarne, hurle et se comporte comme un ogre affamé de carnage.
The Tease The Tear - And Also The Trees (And Also The Trees, 1984)
Débutant sur du post-punk assez basique avec voix théâtrale à l’appui, le morceau se transforme soudainement en refrain gladiateur, bourrasque violente et totalitaire.
Our House - The Young Gods (T.V. Sky, 1992)
Les Suisses de The Young Gods sont capables de nous inviter sur leurs verts pâturages suisses d’une façon très personnelle. Souffle court dans un tuyau de gouttière pour commencer, amadouant ainsi l’auditeur lambda, s’inspirant au passage de trucs et astuces proprement allemand (de type Einstuerzende Neubauten), Our House est un piège qui se referme sur le téméraire qui y met le pied dedans. Décharge électrique courte et efficace, Our House est un distributeur d’adrénaline qui a le pouvoir de faire vriller les yeux, le cœur et les neurones en même temps. Risque de dépendance très élevé.
Odyssey - Kyuss (Welcome To Sky Valley, 1993)
Il faudra un jour que Kyuss soit reconsidéré par l’ensemble de l’humanité et reconnu à sa juste valeur. A cet égard, Odyssey fait partie des morceaux les plus hallucinants créés par le groupe, sorte de musique post-apocalyptique qui propulse l’auditeur directement dans le ventre de la bête ("the belly of the beast"). Il n’en ressortira pas indemne.
The Becoming - Nine Inch Nails (The Downward Spiral, 1994)
Difficile de faire plus terrifiant que ce titre de Nine Inch Nails qui n’est rien d’autre qu’un aperçu en musique des tourments de l’enfer. Les textures sonores sont industrielles, bruit d’engins qui frappent le fer ou la tôle, tandis qu’en fond sonore on perçoit des hurlements de terreur. La musique se fait plus menaçante au fur et à mesure que la machine prend le contrôle de l’homme évoqué dans les paroles. "It wont give up it wants me dead, Goddamn this noise inside my head".
Hurt - Nine Inch Nails (The Downward Spiral, 1994)
A coup d’arpèges tordues et d’accords torturés, Trent Reznor transforme ce qui aurait pu être une simple ballade sur le désespoir en épure de la névrose. Hurt est à la musique ce que Seul contre tous de Gaspard Noé est au cinéma.
Grind - Alice in Chains (Alice in Chains, 1995)
Une douche glacée d’acide sulfurique, voici l’effet que fait Grind. Sur un fracas d’accords plombés, Jerry Cantrell sort des stridences malades et gluantes de sa guitare, avant de chanter "In the darkest hole", bientôt rejoint par la voix déformée de Layne Staley. Bienvenus dans le troisième album studio d’Alice in Chains, où l’ambiance n’est pas à la dégustation de kinder surprise dans l’herbe.
Hey Man, Nice Shot - Filter (Short Bus, 1995)
Ouverture à la bande-originale du film Tales From The Crypt Demon Knight (aux côtés de Ministry avec Tonight We Murder, autre Scary Song), "Hey Man, Nice Shot", boule de feu lancée par Richard Patrick, ex-Nine Inch Nails, évoque le suicide en public de Budd Dwyer. Ligne de basse sourde, puissante gradation pour accompagner la fumée produite par l’impact de la balle sur l’os du crâne, acclamation brutale impeccablement produite, Hey Man, Nice Shot n’est pas à mettre dans toutes les mains. "What a good shot man !".
Apple of Sodom - Marilyn Manson (Bande originale de Lost Highway, 1997)
Ceux qui ont vu et apprécié Lost Highway de David Lynch comprendront aisément que ce morceau se fond très bien dans l’ambiance inquiétante du film. Toujours aux franges de la folie, de la luxure et du cauchemar, les univers du cinéaste et du musicien se retrouvent sur ce morceau génialement glauque... Comment ne pas frissonner de terreur quand Marilyn compte "one, two, three" par dessus des bruits non identifiés qui provoquent un malaise certain chez l’auditeur ? Les guitares sont distordues, les voix hideuses et déformées. C’est bien.
Surgical Sound Specimens From The Museum Of Skin - Fantômas (Delìrium Còrdia, 2004)
Quand le psychopathe Mike Patton s’allie à d’autres musicopathes (Buzz Osborne des Melvins, Trevor Dunn de Mr. Bungle et Dave Lombardo de Slayer), on peut déjà craindre le pire. Alors quand il décide d’enregistrer la BO d’un film d’horreur imaginaire traitant de la chirurgie sans anesthésie, ça donne Delìrium Còrdia dont l’unique piste (74 minutes au compteur) donne une assez bonne idée de ce qu’aurait été un tel film...
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