Films, DVD
Soulmates Never Die - Live In Paris 2003

Soulmates Never Die - Live In Paris 2003

Placebo

par Psymanu le 14 février 2006

4

paru le 15 mars 2004 (EMI)

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Soulmates Never Die présente l’intégralité du concert donné par le groupe Placebo à Paris Bercy le 18 octobre 2003, devant les 16.000 personnes d’une foule dense et dynamique absolument acquise à la cause du trio européen (comment leur donner une nationalité précise ?). Ah tiens, en France ? Une « machine » telle Placebo qui nous fait l’honneur de son seul DVD live, c’est rare ! C’est oublier un peu vite que notre cher pays est celui qui a toujours su le mieux accueillir leur musique. Ailleurs, parfois ignorés ou méconnus (États-Unis), parfois traités avec une rieuse condescendance par la critique (Angleterre), c’est plus compliqué. Et puis Brian Molko et ses hommes n’ont-ils pas, depuis Without You I’m Nothing, proposé des versions « en français dans le texte » de certains de leurs tubes ? Ils nous aiment, on vous dit ! Et on le leur rend bien.

Avec Bullet Proof, Placebo s’est trouvé une entame de concert absolument canon. Chaque disque fut pour le groupe l’occasion de « gonfler » leur son, et lorsqu’ils mettent le résultat au service des guitares, on en prend plein les oreilles et l’on se dit que finalement, malgré les samples, malgré la popularité hystérique qui les fait passer pour un groupe à minets/minettes, il est resté sacrément rock’n’roll. Non, Placebo ne doit pas devenir un combo electro. Ne serait-ce que parce qu’il faut savoir qu’en concert, celui qui surprend peut-être le plus de prime abord est le ténébreux Hewitt. Quel batteur ! C’est lui qui donne son épaisseur à la musique par les crépitements constants de son instrument, entrecoupés de frappes de mule. On ne le voit pas dans la pénombre, mais on l’entend vraiment bien, il serait triste de le voir remplacé par une boîte à rythme. Placebo en concert, c’est aussi un visuel, un éclairage. Celui-ci est dans les bleus, avec des flashes de lumière blanche, une ambiance quelque peu techno. Le but est manifestement de souligner le côté à la fois mélancolique et clinquant de la musique. A l’arrière-scène défilent des images dont le contenu est parfois assez énigmatique, jouant sur des ambiguïtés, des contre-pieds tragi-comiques, à l’image encore une fois de leurs compositions.

Toute la carrière de Placebo est survolée durant les 21 titres qui composent ce DVD. Un regret : seul Bionic vient représenter leur premier album. Et il est si bien exécuté qu’on se dit que d’autres chansons telles Nancy Boy, ou ce bon vieux Teenage Angst, auraient tout à fait trouvé leur place sur ce set. D’autant que certains extraits de Sleeping With Ghost semblent peiner à prendre leur envol en live. English Summer Rain, s’il est un fer de lance en studio, n’est pas reproductible tel quel en live, ce qui lui ôte tout impact. La version proposée au public, trop le derrière entre les deux chaises du pur electro et du strict rock à guitare ne « fonctionne pas ». Quant à Protège-Moi, version francisée de Protect Me, il est plus que temps de se rendre compte du ratage total qu’elle constitue, Despentes ou pas. Molko y met pourtant tout ce qu’il a, et s’y accompagne même à l’harmonica, et c’est vraiment pour lui qu’on applaudit tout de même à la fin.

Mais entendons-nous bien. Ce sont là les deux seuls accrocs à une performance d’ensemble dont jaillit la magie bien plus souvent qu’à son tour. La voix de Brian est à son apogée : bien qu’aigrelette et nasillarde, elle est d’une puissance (autant en décibels qu’en potentiel émotionnel) remarquable et saisit littéralement l’auditeur à la gorge. Elle fait merveille sur Soulmates, ou Special Needs, et bien sûr avec Peeping Tom. Depuis 1996, année de parution de Placebo, leur premier opus, le groupe est parvenu à élaborer un nombre impressionnant de chansons que l’on qualifiera de « tubes » à contre-cœur tant le terme a parfois des accents péjoratifs vis-à-vis de la qualité intrinsèque des compositions. Without You I’m Nothing, que le groupe consent à rejouer, est demeuré un crève-cœur intact, peut être leur meilleure chanson. Pure Morning, c’est tellement de souvenirs d’adolescence forcément blessée, avec ce clip qui nous revient en tête comme un réflexe conditionné dès les premières notes. Et puis, qui d’autre peut se vanter d’enchaîner des choses du calibre de Special K, Taste In Men, et Slave To The Wage ? De quoi laisser K.O. debout le public le plus réfractaire. Mais celui de ce soir agite les bras comme un seul homme, coule un regard ébahi au bassiste suédois dès que celui-ci ondule son immense carcasse en rythme, hurle dès que Molko fait son Nelson Montfort (il prononce une phrase en anglais puis la répète immédiatement en français). Ils savent y faire, les salauds. Et même les chansons que l’on voudrait à tout prix détester pour les avoir trop entendues sur des radios pourries juste entre Nickelback et Limp Bizkit se révèlent en live en tant que véritables machines de guerre : Bitter End est simplement irrésistible, une invitation au head-banging frénétique. En rappel, Centerfolds calme le jeu et n’a aucun mal à arracher les larmes aux fans les plus sensibles, avant le grand final. Et quel final ! Une silhouette bien connue des connaisseurs : Frank Black, lunettes de soleil et nonchalance style « j’ai même pas vu qu’il y avait un public », vient balancer son Where Is My Mind. Un instant cool comme on en fait peu, qui permet à Molko de rendre à César ce qui lui appartient, sa musique tenant finalement davantage des Pixies que d’un quelconque revival glam ou gothique dont il n’a que faire.

Excellente performance, et excellente qualité technique, ce DVD a tout pour plaire. En prime, un documentaire sur la tournée. Le passage le plus intéressant est sans conteste le passage de Placebo par les États-Unis, cet autre monde où ils ont tout à construire, et il est amusant de les voir jouer dans une salle de 600 places pas tout à fait remplie. Le groupe montre ainsi qu’il n’a jamais eu peur de se mettre en danger, et qu’il sait aller chercher le public partout où il est, par la force de leur jeu de scène et la qualité de leurs chansons. Soulmates Never Die est un état des lieux en même temps que l’apogée de leur carrière jusqu’ici. Sans doute signe-t-il un tournant pour le groupe qui a maintenant une assise en terme de répertoire et de popularité lui permettant de viser plus haut ou d’explorer d’autres directions, qui sait. Sans doute Meds constituera-t-il un début de réponse à ces questions.



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Setlist :
 
1- Bullet Proof
2- Allergic
3- Every You Every Me
4- Bionic
5- Protège-Moi
6- Plasticine
7- Bitter End
8- Soulmates
9- Black-Eyed
10- I’ll Be Yours
11- Special Needs
12- English Summer Rain
13- Without You I’m Nothing
14- This Picture
15- Special K
16- Taste In Men
17- Slave To The Wage
18- Peeping Tom
19- Pure Morning
20- Centerfolds
21- Where Is My Mind ?