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mercredi 15 avril 2015
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par Yuri-G le 20 octobre 2010
Paru le 27 septembre 2010 (Sub Pop/PIAS)
Pour situer tout de suite les choses : Everything In Between est un disque noise. Qui suppose vacarme, crachin, larsen - on est d’accord. Mais il faut perpétuellement se méfier de l’instantané. Lorsqu’on avait découvert No Age avec leur précédent album Nouns en 2008, c’était pourtant le respect le plus littéral du genre qui frappait : une poussée de stridences fonçant sur l’avant-plan, tête baissée. Il y avait des mélodies juvéniles mais la morgue de ce duo guitare/batterie méritait son appellation nette, noise. Une signature un peu primale, assez impressionnante. On pouvait imaginer que le terrain serait dès lors balisé pour eux. Mal vu, car ce nouvel album propose d’autres ressources.
Il y aurait au premier abord la même impression. Un groupe scotché sur ses déflagrations, qui aplanit quelques contours mais reste toujours frontal. Des chansons en papier de verre où règnent les saturations de guitare, les effets, boucles hérissées, et la cadence des mélodies. Cela reste le programme de No Age, électrocuter/électriser. Mais il y a aujourd’hui la place pour une nouvelle perspective. De Life Prowler, premier décollage, jusqu’aux morsures presque attendrissantes de Chem Trails, Everything In Between présente une sorte de parcours inattendu. Plus construit que le précédent, les syncopes punk (Fever Dreaming, où une boucle de guitare stridente simule un refrain) sont émaillées de plusieurs plages instrumentales où les guitares se déversent et stagnent. Dans cette matière sonore en constante éruption, il existe une insidieuse cohésion, à travers des morceaux tour à tour violents et éthérés, équilibre précaire échappant à plusieurs reprises à toute tentative de désignation. Peut-être serait-ce le sentiment de voir se décliner une même humeur en facettes éclatées, dont on retrouve les échos d’une piste à l’autre. Surtout, il existe une sensibilité qu’on n’aurait guère prédite. Sombre et retorse, elle évoque souvent les premiers Brian Eno pour ce goût du motif acide, comme s’il fallait trouver un point d’appui solide (accords répétés, hébétés) pour trouver une issue, accentuation mélodique ou sonore de quelques instants.
Mélodique ? On ne fera certainement pas croire que No Age compose de tels morceaux, pas strictement. Pourtant, le duo touche souvent à une alchimie. Que ce soit dans la mélancolie grattée à l’os de Common Heat où les propulsions joviales de Sorts, la noise primitive, qui s’exhibe comme agression sans autre visée, a été écartée. Everything In Between est bel et bien un album qui appelle ce qualificatif, mais son éclat, qui ne va pas sans heurts, amène un autre ordre de perception. Hypnose, fascination ou trouble, quel que soit son nom, c’est maintenant lui qui prévaut.
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