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Sixes & Sevens

Sixes & Sevens

Adam Green

par Vyvy le 1er avril 2008

4,5

Paru le 7 mars (Rough Trade)

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Cette fois-ci, il a pris son temps. Le forçat de l’anti-folk, qui commença a travailler au sein des Moldy Peaches à l’âge de 12 ans, le même qui au cours de sa carrière solo cherche par tous les moyens à se démarquer de cette vague indé, et à se trouver un personnage, une voix. Oui oui, le type qui a normalement un rythme d’un album par an et enregistre en trois semaines entre deux tournées, ce monsieur donc, a pris son temps.

Ce temps, il ne l’a pas vraiment pris volontairement : sa maison de disque trouvait qu’il se tuait un peu à la tache, et qu’il serait intéressant qu’il s’arrête de courir et se (re)pose. Si bien qu’au lieu d’enregistrer son album en trois semaines, il a passé un an et demi dessus, consacrant selon ses dires [1]] plus de temps à certaines de ces chansons qu’à ces précédents albums. Quitte à prendre son temps, au temps prendre l’air et le voilà donc parti dans le New Jersey, où avec son band et ses guests il investit une école pour autistes la nuit tombée… Quitte à prendre ainsi le large, autant ne pas partir seul et prendre son pied, entre amis. Ainsi, Green, qui assure avoir précédemment carburé au thé et au sérieux lors de ces quatre premiers albums, avoue quelques cigarettes dans la cour de récré de l’école : on vous aura prévenu, cet album s’annonce décadent.

En effet, quand on observe l’évolution crooner-sirupeux-ironique que l’homme vert a pris sur ces deux derniers albums, on peut se demander combien de couches de ridicule grandiose on peut ajouter sans que notre estomac ne refuse, de manière forcenée, le gâteau final. Il semblerait que ce seuil critique ne soit pas atteint malgré un nombre de couches (20 titres en 48 minutes) jusque là inégalé dans la discographie verte. Mais la question reste entière quant à la bonne manière d’écouter du Adam Green : en boucle, à la suite, ou par touches, au moyen d’un shuffle ? Ainsi, si 20 couches, 20 ambiances à la suite ça paraît un peu indigeste, prenez le contrôle, il ne vous en voudra pas [2] .

Que nous offre donc Sixes & Sevens, à part une belle opportunité d’utiliser le terme esperluette ? Il présente un programme de réhabilitation musicale, et de la flûte de pan sur la superbe You Get So Lucky, et des trois frères Hansons que l’on retrouve discrètement en chœurs masculin sur le petit bonbon qu’est Twee Twee Dee. Il permet à Green d’avoir recours à plein de chœurs gospels parfois en plus des cordes et vents. Il nous emmène d’un festival grandiloquent à une île tropicale où fleurissent les OhouOhoh et les douces notes du Glockenspiel, il fuit vite une Homelife qui le tue et chante son amour à Capella sur le joliment instrumenté - et sans doute un des plus beaux titres d’Adam Green, It’s So Fine. Comme un peu toujours avec Adam Green, on a du réchauffé, une allusion à Nat King Cole par là, un Broadcast Beach qui sent Gemstones à plein nez et un Drowning Head First partagé avec sa girlfriend Loribeth Capella qui plaira aux (néo)fans des Moldy Peaches en plein post-Juno revival. Mais, avec un an et demi dans les jambes, le nouvel album comporte aussi son bon lot de très bonnes surprises, qui ouvrent d’autres voix et voies au jeune vétéran (26 ans et 14 ans de musique professionnelle). A ma gauche, un Bed Of Prayer qui donne un peu plus de consistance aux insistantes comparaisons entre Green et Leonard Cohen (bien que sur cet album l’ombre de Kevin Ayers soit bien plus sensible) ; à ma droite, le barré et soyeux Sticky Ricky ou l’on entend les influences cabaret glauque du bonhomme.

Et comme souvent avec Adam Green, on finit avec une petite pirouette, cette petite phrase dans Rich Kids : I used to spend time with rich kids, but all they talked about was me. Cette chronique touchant à sa fin, il va bien falloir confirmer un avis clair et conçis : Adam Green réussit dans son tout récent effort à râtisser large, a partir dans tout les sens, sans se perdre, et avec un brio qui détonne et étonne encore et toujours, écoutes après écoutes. L’instrumentation a rattrapé les textes, muant avec les nouvelles envies du chanteur qui ouvre beaucoup de portes et n’en referme que peu. Armé de tant de voix, Green choisit l’hétérogénéité, choisit de ne pas choisir, et de grapiller, en pieuvre distinguée, à pas mal de râteliers. Qu’on se le dise ; Green a un but, être le « Woody Allen de la Pop » [3] ; donc soyez prêt à entendre, beaucoup et longtemps, parler de lui.



[1dans une interview aux Inrocks=207925&cHash=ec9121b62e

[2voir son interview dans Drowned in sound

[3peut on lire le dans 20 Minutes

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tracklisting

01. Festival Song (2:20)
02. Tropical Island (2:18)
03. Cannot Get Sicker (2:24)
04. That Sounds Like A Pony (1:10)
05. Morning After Midnight (2:07)
06. Twee Dee Dee (2:28)
07. You Get So Lucky (2:33)
08. Getting Led (2:26)
09. Drowning Head First (2:37)
10. Broadcast Beach (2:21)
11. It’s A Fine (2:12)
12. Homelife (2:33)
13. Be My Man (2:16)
14. Grandma Shirley and Papa (2:04)
15. When A Pretty Face (2:53)
16. Exp. 1 (2:38)
17. Leaky Flask (3:12)
18. Bed of Prayer (2:27)
19. Sticky Ricki (2:15)
20. Rich Kids (3:10)
 
durée totale : 48:24