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mercredi 15 avril 2015
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par Gilles Roland le 7 novembre 2011
paru le 25 octobre 2011 (Walt Disney Records)
Qu’est-ce que le génie ? Le CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et LexicaleS) offre la définition suivante : "Aptitude, facultés supérieures de l’esprit portées au-delà du niveau commun (se manifestant dans des entreprises, des inventions, des créations jugées exceptionnelles ou extraordinaires)".
Peut-on en toute conscience appliquer cette définition à un type qui a composé des morceaux comme God Only Knows, Good Vibrations, I Get Around ou Wouldn’t it Be Nice, qui a fait construire un bac à sable dans son salon pour y poser son piano afin de composer les pieds au chaud, qui a passé plusieurs années au lit tout en se nourrissant de hamburgers et de pilules diverses et variées, qui a fondé avec ses frères l’un des groupes les plus importants des années 60 (pour ne pas dire de la pop ou du rock), qui entend des voix et qui a donné à des millions de mélomanes l’envie de chevaucher une planche de surf alors que lui-même n’a jamais surfé ? Bien sûr que oui ! Brian Wilson est un authentique génie. Un artiste allumé, au toucher unique et à la personnalité complexe. Quelque-part entre Syd Barrett (pour le côté social) et Paul McCartney (pour le song writing), jamais totalement en phase, mais toujours brillant.
Et comme un génie peut tout se permettre, Brian Wilson ne se gêne pas. Il s’amuse. Ses albums récents (surtout depuis That Lucky Old Sun) traduisent un désir ardent de laisser libre court à une volonté d’explorer différents univers et de rameuter ainsi l’esprit bigarré des 60’s californiennes. Car, quoi qu’il fasse, Brian charrie avec lui son lot d’évocations idylliques. Une voix ultra reconnaissable, qui a bien vieilli et une patte inimitable caractérisent un homme en apparence en paix avec lui-même et son époque. Un homme qui a traversé un paquet de tempêtes, mais qui est toujours là, derrière son piano, le teint halé et la toison fière.
Les fans de Wilson le savaient, tout spécialement après avoir jeté une oreille à son album hommage à Gershwin : sous ses apparences farfelues et "corporate", l’album de reprises de standards Disney allait être bon. Et il l’est ! Au point de s’imposer illico comme un superbe exercice de style, parfait pour passer les fêtes de fin d’année (même si un pareil concept appelle son lot interrogations mercantiles et capitalo-cyniques, ce qui ici n’est pas pris en compte).
La pochette est le premier bon point. Évocation de Surfin’ Safari, avec coucher de soleil en forme de Mickey, on est en plein dedans. Les premières mesures de You’ve Got A Friend In Me, le thème de Toy Story nous confirment la chose. L’interprétation est superbe et enlevée, pile poil entre les Beach Boys et l’original de Randy Newman (on va mettre de côté la version française de Charlelie Couture).
La suite s’apparente à une grosse madeleine de Proust et s’insinue à grand renfort d’images iconiques des films qui ont fait le succès de l’usine aux grandes oreilles. La Petite Sirène, Pinocchio, Mary Poppins, Le Roi Lion, Pocahontas, Le Livre de la Jungle, Dumbo et Blanche Neige et les Sept Nains, la sélection puise dans les classiques et les nouveautés et effectue un panorama exhaustif en forme de bande-annonce d’un paquet d’existences.
Si l’ensemble brille par la qualité de sa production et surtout par le goût avec lequel Wilson s’est amusé à offrir de nouveaux visages à des chansons qui, pour la plupart, font partie de l’inconscient collectif, il y a bien sûr quelques titres qui se détachent. Ainsi, The Bare Necesseties (Le Livre de la Jungle), Baby Mine (Dumbo), Stay Awake (Mary Poppins) et le superbe When You Wish Upon A Star (Pinocchio) suffisent à justifier le concept. Les autres aussi bien sûr, mais ces derniers tout particulièrement. La façon dont Wilson se glisse dans ces classiques pour en livrer une version alternative est non seulement très émouvante, mais aussi très sincère et pleine d’humour. Un humour particulièrement visible dans le morceau Heigh-Ho/Whistle While You Work/Yo Ho (A Pirate’s Life For Me) de Blanche Neige et les Sept Nains qui, s’il peut paraitre improbable, est en fait tout particulièrement significatif de la maestria de ce vieux roublard de Wilson.
Point de couleuvres maquillées en lanternes ou je ne sais quoi ici, mais un joli disque, au sens premier du terme, idéal pour retomber en enfance ou pour calmer le jeu entre les derniers Mastodon et Machine Head. Alors, ce n’est peut-être pas le truc le plus facile à assumer pour un headbanger, mais ce In The Key Of Disney semble être le disque parfait pour se lover dans son canapé, la tête à Disneyland et les pieds dans le sable. C’est Brian qui conduit, toutes fenêtres ouvertes. Un génie qu’on vous dit !
Vos commentaires
# Le 25 avril 2012 à 05:30, par TOM Feng En réponse à : In The Key Of Disney
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