Voilà un objet que nous avons attendu longtemps. Nous qui rêvions de pouvoir remplacer notre vieille VHS du concert d’Hendrix à Woodstock, repiquée sur une tardive diffusion télévisée incomplète, par une édition DVD digne de ce nom, et bien, ce fut possible à partir de 2005 avec ce luxueux Jimi Hendrix : Live At Woodstock.

L’évènement est connu et ne mérite pas que nous nous y attardions trop, tant la glose ne pourrait être qu’une réécriture de ce qui a déjà été tant de fois écrit. Le bandana rouge, la Fender blanche étincelante comme la tenue de cow-boy moderne (à l’exception près, comme le dit Jimi avec humour pendant le concert, que seuls les cow-boys n’ont pas à accorder leur guitare), les solos prodigieux, l’hymne américain à la sauce napalm, l’improvisation dantesque, un Hey Joe conclusif de toute beauté et d’une sérénité absolue... tout y est donc, bien sûr, heureusement, tant mieux. On ne s’en lasse évidemment pas.

Attardons-nous plutôt sur ce qui est nouveau, notamment ce second disque qui présente un « second look » sur le concert grâce à la publication d’une vidéo exclusive tournée par un étudiant en théâtre de l’époque, âgé de 22 ans, un certain Albert Goodman. La vidéo, en noir et blanc, contraste énormément avec la version retravaillée et « purifiée » du premier DVD. Du coup, il en ressort une certaine authenticité bien sympathique qui a vite fait de faire oublier les imperfections techniques de la bande. Comme le précise l’avertissement inaugural, l’intérêt est donc principalement historique, mais intérêt il y a. Merci Mr. Goodman, quoi que vous soyez devenu, vous étiez au bon endroit au bon moment. Ce n’est pas toujours le cas de tout le monde.

Il y a également les autres acteurs de l’évènement à qui le DVD laisse une belle place. Les Billy Cox, les Larry Lee (hilarant Larry Lee, tout juste sorti du Vietnam à l’époque et donc complètement déphasé, s’offusquant à la vue d’une femme nue dans le public), les Eddie Kramer... Ce dernier, ingénieur du son attitré d’Hendrix, s’était vu confier la lourde tache de filmer le festival. Notre homme en fut tout paniqué quand, comme il le rapporte dans un des bonus du DVD, il s’aperçut quelques heures avant le début des festivités que la scène n’était encore presque pas montée. De quoi en faire frémir plus d’un. Ce sont en effet tous les témoignages de ces personnages de l’époque, tous acteurs à leur façon, qui donnent un véritable souffle au DVD, faisant renaître cette tranche de l’histoire de la musique populaire. Nous n’oublierons pas le regretté Noel Redding qui au début du premier DVD, dans le mini documentaire qui retrace l’ascension d’Hendrix avant Woodstock, nous raconte comment il en est venu à quitter l’Experience, formation mythique d’Hendrix avant le Gipsy Sun Of Rainbows, groupe inédit qui joua à Woodstock : « Un jour, pendant un concert, tout le public a voulu envahir la scène. Il a fallu fuir dans le van qui était derrière la scène mais des fans sont montés dessus à en faire péter le toit. Quand le van est parti, il y avait encore plusieurs personnes dessus, c’était de la folie. En rentrant à l’hôtel, nous avons dû rentrer par derrière, par les cuisines... À partir de ce moment là, c’en était fini pour moi. » C’est ça la folie Hendrix !

« Et au fait, ce concert de Woodstock ? », demandent certains. Comment ça ? Vous ne l’avez encore jamais vu ? Et bien, cela reste la première raison pour faire l’investissement de ce double DVD. Pour les vieux briscards aussi, on peut toujours s’amuser, lors du vingt-cinquième visionnage, à repérer une hippie portant un mignon petit chat pendant tout le concert sur la droite du gaucher magique.