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mercredi 15 avril 2015
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par Shyboy le 3 janvier 2006
sorti en 1975 (durée : 108 min)
Tommy est le concept album par excellence, composé par Pete Townsend guitariste des Who. L’album, sorti en 1969 a installé durablement la carrière du groupe en Europe et aux USA. L’œuvre est le fruit d’une réflexion sincère sur une société déjà en crise, autopsiant une jeunesse sans repères dans un monde complexe. Tommy est aussi le premier opéra-rock de l’histoire de la musique populaire porté sur les planches et sur pellicule en 1975 par l’Anglais Ken Russel.
L’histoire de Tommy est celle d’un gosse de quatre ans environ qui, à la suite d’un choc psychologique brutal, devient sourd, muet et aveugle. Malgré les efforts désespérés de sa mère et de beau-père pour le sortir de son état végétatif, le jeune garçon reste hors du monde ; seul son reflet dans le miroir l’intéresse, Tommy ne veut rien entendre, rien voir, rien sentir. Malgré ce handicap, il deviendra l’oracle de sa génération.
Mais avant la révélation, Tommy sera livré aux pires exactions, son beau-père - pensant bien faire et suivant l’adage "à situation désespéré, remède désespéré" - le laisse entre les mains de personnages plutôt douteux. Ainsi, Tommy découvrira la luxure et la drogue avec Tina Turner, « l’acid queen », en prostituée junkie, la religion et les passions qu’elle suscite avec un Eric Clapton incarnant un guitariste révérend « faiseur de miracle » dans un temple dédié à la guitare et au culte de Marilyn Monroe ! Puis, vient le sadisme du cousin Kevin qui le torture avec la passion d’un psychopathe pour sa victime, et pour clôre le tout, les abus sexuels de l’oncle Ernie incarné par le mémorable Keith Moon.
Malgré ce traitement de choc et les outrages, Tommy reste dans sa bulle jusqu’au mystérieux déclic qui mène notre héros à une décharge publique où ce dernier découvre son totem dans l’objet d’un flipper bien pourri...c’est la révélation : Tommy devient le Mozart du flipper, une bête de foire adulée qui remplit les salles, notamment dans un duel cultissime entre lui et The Pinball Wizard incarné ici par Elton John.
L’auréole du succès ne guérit pas le champion, il lui faudra briser le miroir pour muer et se trouver en tant que Messie moderne qui formera sa communauté autour du culte de son ego et du don pour le tilt... Les adeptes de cette secte lui bâtiront un sanctuaire éphémère à mi-chemin entre Disneyland et le goulag qui, comme toute utopie, s’écroulera dans le feu et le sang. Tommy s’échappe de l’enfer qu’il a créé pour retourner à la nature et retrouver le plaisir d’être libre...
Tommy est bien un film d’une époque, d’une génération et d’un état d’esprit : le design, les costumes, les stars (Eric Clapton, Elton John, Tina Turner, Roger Daltrey, Jack Nicholson), le kitsch baroque, les allusions à la drogue et à la pensée mystique, la dénonciation des abus de la société de consommation. Tous les aspects ridicules sont poussés à leur paroxysme par un réalisateur cinglé qui fait de l’œuvre des Who un conte initiatique, une recherche perpétuelle et sans fin du moi.
Pour conclure, Tommy est un délire visuel, sonore, une fable rock mégalomaniaque ; on y retrouve l’esprit déjanté du réalisateur Ken Russel, les décors et l’image sont sublimes, les acteurs restituent à merveille l’esprit "grand cabaret" du concept-album, mention spéciale au couple très crédible Ann-Margret / Oliver Reed.
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