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mercredi 15 avril 2015
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par Milner le 7 février 2006
publié en décembre 1975 (Columbia / Sony Music)
Cet album de Dylan était attendu avec une impatience et une curiosité toutes particulières, car on savait que sa préparation avait été longue et difficile, surtout au moment où le Zimm s’apprêtait à modifier son personnel. Outre son extrême raffinement musical, le programme même de ce disque n’était pas commode à établir, puisqu’il fallait trouver neuf chansons illustrant au mieux le retour à la simplicité, aux sources, aux gens et à la rue, tout en gardant une certaine cohérence à l’écoute de l’ensemble. Pour ce faire, et avant même de passer à l’enregistrement, Bob Dylan s’est attaché les services du parolier Jacques Levy qui cosigne tous les titres de Desire à l’exception de One More Cup Of Coffee.
Mais assez d’histoire pour ne pas évoquer la musique. Et là, une fois de plus, Dylan a de quoi étonner tout le monde, ceux qui n’aimaient pas encore l’artiste aussi bien que ceux qui n’aimaient déjà plus l’artiste folk-rock : d’abord, les vocaux sont plus que jamais émouvants, que ce soit en harmonie avec Emmylou Harris ou en solo. Dylan a appris à maîtriser sa voix, à la rendre plus naturelle, notamment en abandonnant le parti pris du timbre nasillard qui, nécessaire au début peut-être pour imposer un « son », était devenu un peu trop systématique. Les musiciens sont bien sûr parfaitement à la hauteur et forme la Rolling Thunder Revue. On retrouve entre autres Rob Stoner (basse), Scarlet Rivera (violon), Howard Wyeth (batterie) et Dom Cortese (accordéon).
Mais ce qui domine l’album, encore une fois, c’est la richesse et l’émotion formidable du chant de Dylan. Si formidable qu’il emmènera ce disque une nouvelle fois vers les plus hauts sommets des classements américains. L’album démarre en force sur Hurricane, long morceau de plus de huit minutes particulièrement entraînant narrant les péripéties de Rubin ‘Hurricane’ Carter. Il s’agit d’une nouvelle prise de position politique de Dylan, contre l’emprisonnement d’un boxeur noir, pour un meurtre dont la responsabilité n’a jamais été prouvée. Le texte décrit les faits de manière journalistique, sans lyrisme et comme au temps des vieux « talking blues ». Ce titre marque le retour du Dylan contestataire car dans cette chanson, il y a tout de même une claire accusation de la justice de classe.
La plupart des titres de Desire sont plutôt longs et joliment interprétés, ce qui n’est pas vraiment étonnant lorsqu’on se réfère à Bob Dylan. Ballade pour sa femme Sarah qui l’entendit, dit-on, pour la première fois lors d’une séance de studio, Sara est émouvante bien que son auteur la (les) reniera. Le long de six accords de piano, Isis est suffisamment bouleversante pour donner envie de pleurer sa larme. Quant aux textes, à l’exception de Oh, Sister - dont il est incroyable qu’ils se soient mis à deux pour écrire les paroles de cette chanson - ils montrent un Dylan assez inspiré bien que parfois aussi mièvre qu’une chanson country des Eagles.
Par rapport à son prédécesseur, Desire ressemble par moment à du bavardage, prétexte à des performances vocales et poétiques assez fabuleuses. Mais, avant que la Rolling Thunder Review ne se transforme en une espèce de Woodstock ambulant (Neil Young, Steve Stills et Joni Mitchell côtoieront le Zim), Dylan a tout de même publié cet album plus accessible aux foules dû à une volonté assez commerciale de marquer cette période de sa vie, ce que reprocheront les initiés qui préfèreront parler de folk niais... Ah, décidément, n’est pas Woody Guthrie qui veut !
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