Portraits
Bob Dylan - Part III - Faith, Doubt And Mercy

Bob Dylan - Part III - Faith, Doubt And Mercy

par Aurélien Noyer le 17 septembre 2007

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25 janvier 1980. Bob Dylan est sur scène à l’Orpheum Theater d’Omaha, Nebraska et harangue la foule : "Il y a des années, les gens disaient que j’étais un prophète. Ce à quoi je répondais "Non, je ne suis pas un prophète". "Si, tu l’es. Tu es un prophète", répliquaient-ils. Je disais "Non, ce n’est pas moi." Mais ils insistaient : "Bien sûr que tu es un prophète". Ils essayaient de me convaincre que j’étais un prophète. Et maintenant que je viens en disant que Jesus Christ est la réponse, ils disent "Bob Dylan n’est pas un prophète". Ils ne peuvent pas gérer ça." Et à peine a-t-il fini qu’il se lance dans une interprétation de Solid Rock, une chanson dans laquelle il explique qu’il s’accroche à un "rocher solide apparu avant les fondations du monde".

La question qui se pose alors est "Qu’est-ce qui s’est passé ? Comment un chantre de la contre-culture est-il devenu un fervent chrétien ? Comment l’homme qui raillait les bigots dans With God On Our Side est-il devenu born again ?" Je ne pense pas que quiconque aura jamais la réponse exacte à cette question. Mais on peut cependant trouver quelques éléments qui peuvent nous aider à comprendre...

With God on his (born again) side

Retour donc en 1978. Année étrange pour Dylan... Il vient de passer une décennie en demi-teinte. Des débuts hésitants avec des albums moyens (New Morning) voire franchement décevant (Self Portrait), puis le retour de l’inspiration avec Blood On The Tracks et surtout le succès de Desire, l’aventure de la Rolling Thunder Revue qui furent de grands moments pour Dylan, et ce, aussi bien sur le plan artistique qu’humain. En contre-partie de ce soudain retour en pleine gloire, il y eut les excès rock’n’roll typiques des années 70s, un douloureux divorce, le projet Renaldo & Clara, étrange film à la limite de la fumisterie. Au milieu de tout ça, il doit être difficile de garder la tête froide, de savoir qui l’on est, et ce, même si on s’appelle Dylan.

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Le double album Live At Budokan

Ainsi, lors de la tournée Street Legal (son décevant album de 1978), Bob est retombé dans la coke, l’alcool, s’embrouille dans de multiples aventures avec ses choristes. Sur le plan personnel, sa vie part en lambeaux et il semble en prendre peu à peu conscience. La vie sur la route l’use physiquement et moralement. Un album live de cette tournée sera enregistré au Budokan de Tokyo, album qui se fera incendié par la critique, accusant Dylan de jouer de la musique lounge pour Las Vegas. Et c’est un Bob Dylan épuisé qui monte sur scène à San Diego le 17 novembre 1978. Mais ce qui aurait pu être un show épuisant de plus au milieu d’une tournée éreintante fut une exception. En effet, durant le concert, un spectateur jeta une croix sur scène. Et alors que Dylan avait l’habitude d’ignorer les objets que ses fans lui offraient, il s’avança jusqu’à l’avant-scène pour récupérer cette croix. Un geste qui, bien qu’inhabituel, aurait pu être anodin, sauf que le lendemain, après un concert encore plus épuisant, Dylan se retrouva seul dans sa chambre d’hôtel de Tucson, Arizona et connut une expérience mystique. "Jésus m’est apparu comme le Roi des Rois, le Seigneur des Seigneurs", expliquera-t-il plus tard. "Il y avait une présence dans la pièce, et ça ne pouvait être personne d’autre que Jésus... Il a posé sa main sur moi, c’était une expérience physique. Je l’ai senti, senti sur chaque partie de mon corps. J’ai senti mon corps trembler . La gloire du Seigneur m’a ébranlé et élevé."

Dylan prétend donc qu’il s’agit d’une révélation brutale, spontanée, d’une réelle expérience mystique. D’ailleurs, il déclarera que les gens "croient souvent que Jésus ne vient dans la vie des gens que quand ils sont déprimés ou dans la misère, ou quand il sont vieux et décatis. Pour moi, ça ne n’est pas passé comme ça. J’allais bien. J’avais fait du chemin pendant cette année de tournée. J’étais relativement content, mais une amie intime m’a parlé de deux choses, dont l’une était Jésus. L’idée entière de Jésus m’était alors étrangère... J’ai eu confiance en elle et je l’ai rappelée en disant que j’étais désireux d’entendre parler de Jésus."

Mais soyons donc un peu critique vis-à-vis de cette tirade. En effet, il est clair qu’un homme qui doit se débrouiller pour que les deux choristes avec lesquelles il couche ne se retrouvent pas côté-à-côte sur scène de peur qu’elles ne s’écharpent, qui doit également supporter, à près de 40 ans, la vie sur la route et ce qu’elle entraîne comme abus de boisson et de substances moins licites, ne va pas si bien que ça. Rien de surprenant alors à ce qu’il cherche un moyen de remettre un peu d’ordre dans sa vie. Bien sûr, il n’est pas le seul rescapé des 60s à se dire qu’une vie un peu plus rangée ne lui ferait pas de mal. À la fin des années 70, bon nombre d’anciens hippies et autres contestataires, fatigués des excès et des lacunes d’une philosophie prônant une liberté sans limite, cherchent des principes plus stricts, des garde-fous. Et au pays du puritanisme, c’est la religion et plus particulièrement les églises évangéliques qui sont prises d’assaut par ces rock-stars fatiguées. Parmi les amis de Dylan, on compte entre autres Roger McGuinn et T-Bone Burnett qui ont déjà "trouvé Jésus". En outre, ses choristes noires ont été élévées à l’école du gospel et sont elles-mêmes très croyantes. On peut donc se demander quelle fut l’influence de son entourage sur la soudaine conversion de Dylan.

Mais toujours est-il qu’au printemps 1979, l’actrice Mary Alice Artes (alors petite amie de Dylan) demande à la Vineyard Fellowship, une communauté chrétienne de la "seconde naissance" ("born again") si deux pasteurs pourraient rendre visite à un Dylan avide d’informations sur le christianisme. Et, au sortir de leur entretien, Dylan leur déclara qu’il était prêt à "recevoir le Christ dans sa vie". Durant les mois suivants, Dylan fréquenta alors l’Ecole des Disciples de Vineyard cinq jours par semaine et participa activement à la vie de la communauté. La seule activité à laquelle il refusait de participer était le prosélytisme porte à porte. Préférant rester dans un relatif anonymat, il s’en trouva dispensé.

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Désormais fervent chrétien, il est alors prêt à rentrer en studio, sa nouvelle foi étant source d’inspiration de nombreux textes. À cette époque, Dylan n’avait pas de groupe attitré. Il ne garde donc que deux choristes de son groupe de scène et recrute une section rythmique de requins confirmés. Et pour assurer la production et les arrangements, il embauche Jerry Wexler, célèbre producteur de soul (Aretha Franklin, Wilson Pickett, Percy Sledge ou Dusty Springfield) et Mark Knopfler, tout auréolé du succès de Sultans Of Swing avec son groupe Dire Straits. Les séances d’enregistrement s’étirent tout au long du mois de mai 1979, séances durant lesquelles les musiciens découvrent les thèmes monomaniaques du nouveau Dylan (la religion, la Christ, la foi, etc...). Dylan s’implique tellement que Jerry Wexler, athée d’origine juive, devra demander à Bob d’arrêter d’essayer de le convertir. Naturellement, l’album subira énormement l’influence de la nouvelle foi de Dylan et sera donc tout naturellement orienté vers le Gospel. Dylan insistera même pour que l’album soit enregistré aux mythiques studios Muscle Shoals, avec les légendaires Muscle Shoals Horns. On retrouve donc sur l’album ces basses rondes qui ont fait la réputation de ce temple de la soul music.

L’album sort donc le 20 août 1979, et les réactions des critiques sont mitigées. D’un point de vue strictement musical, l’album n’est pas mauvais, loin s’en faut. Il faut bien admettre que la foi a donné à Dylan une motivation qui lui faisait défaut sur l’album précédent. Sa voix est plus assurée, plus mélodique et la production et les arrangements de Wexler et Knopfler lui servent d’écrin. Le véritable point d’achoppement de l’album, c’est bien sûr les paroles. Première catégorie de critiques : ceux qui s’en foutent. C’est le cas du critique Robert Christgau qui dira en substance "Qu’est-ce que ça peut faire qu’il ait choisi le Dieu de la Colère ? Est-ce que vous vous foutiez en rogne à cause du Dieu de l’Amour et des autres conneries hippies ?" Mais c’est un peu facile de s’en tirer ainsi. Non pas qu’il faille exiger de Dylan qu’il reste fidèle à vie aux idéaux de sa jeunesse. Que celui qui n’a jamais changé d’avis lui jette la première pierre... Le problème, c’est plutôt que ses paroles ont cruellement perdu en nuances et en subtilités. Alors effectivement, on attend pas autre chose d’un parolier comme Townshend qu’il sorte des inepties à propos d’un gamin sourd, muet et aveugle qui devient champion de flipper. Mais il est triste d’entendre un écrivain comme Dylan qui a régulièrement réussi le tour de nuancer suffisamment son propos pour qu’on ne l’associe pas à un genre ou à un style débiter le refrain de Gotta Serve Somebody.

But you’re gonna have to serve somebody, yes indeed
You’re gonna have to serve somebody,
Well, it may be the devil or it may be the Lord
But you’re gonna have to serve somebody.

D’ailleurs, cette chanson énervera tellement son fan et ami John Lennon que ce dernier écrira en réponse la chanson Serve Yourself qui répond à la précédente par un violent discours anti-religion.

You say you found Jesus. Christ !
He’s the only one
You say you’ve found Buddha
Sittin’ in the sun
You say you found Mohammed
Facin’ to the East
You say you found Krishna
Dancin’ in the street
[...]
You got to serve yourself
Ain’t nobody gonna do for you
You got to serve yourself
Ain’t nobody gonna do for you

Et quoiqu’en dise Christgau, il y a quelque chose de dérangeant à entendre les paroles de Dylan, sa vision du christianisme et de la spirutualité est celle d’un born again et assez extrême, même si dans un premier temps, il se définit comme partisan d’un christianisme tolérant, déclarant que les religions réactionnaires soit une chose "dont il faut se méfier... c’est vraiment dangereux. On peut trouver ce qu’on veut dans la Bible. On peut la trafiquer et un tas de gens le font. Je ne pense pas qu’on puisse légiférer sur la moralité. Le truc de base, je crois, c’est de se mettre soi-même en contact avec le Christ. Il vous guidera. Tout prédicateur digne de ce nom vous le dira : "Ne me suivez pas, moi, suivez le Christ."" Mais il faut croire que le Christ qu’il suit n’est pas des plus tolérant. En effet, durant la tournée suivant la sortie du disque, il refuse de jouer ses anciens morceaux, arguant ne vouloir "chanter aucune chanson que le Seigneur ne lui ait pas envoyé à chanter". On peut alors imaginer la déception des fans. Et cela va aller en empirant. Il mue progressivement en prédicateur, insérant des sermons de plus en plus longs, de plus en plus extrèmes entre les chansons. A Tempe, il se lance dans une violente diatribe contre l’homosexualité. Plus tard, il délivrera une harangue enragée sur l’Iran et l’Apocalypse imminente.

Mais malgré tout, l’album se vend bien. Durant la première année, il dépasse les ventes de Blonde On Blonde et Blood On The Tracks et se fraye une place dans le Top 30. Quant au single Gotta Serve Somebody, il atteint la troisième place des charts américain et se classe deuxième en Angleterre, un succès populaire qui lui vaudra même un Grammy Award récompensant la meilleur performance vocale rock masculine en 1980. Et c’est sans doute ce succès qui l’incite à retrouver rapidement en studio pour y enregistrer le follow-up de Slow Train Coming.

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Pochette de l’album Saved, version 1...

Imaginant surfer sans effort sur la réussite de ce dernier, il reconstitue l’équipe gagnante... enfin, presque. Jerry Wexler est toujours à la production, on retrouve la choriste fétiche (et maîtresse) de Dylan, Carolyn Dennis et le bassiste Tim Drummond, mais Mark Knopfler s’en est allé, emportant avec lui le batteur Pick Withers. Mais visiblement, Dylan n’en a cure. Après tout, ce qui a fait le succès de l’album, c’est lui et sa foi en Jésus, non ? Alors autant en remettre une couche avec un album nommé Saved (rien que le titre résume tout). Donc, ce n’est pas une surprise, les textes sont sans intérêt. Ils sont tellement dénués d’originalité que même un fervent chrétien n’y trouverait aucun attrait. Les titres parlent d’eux-mêmes : Saved, Solid Rock, In The Garden, Saving Grace ou Are You Ready ? (vers-type : "Are you ready to meet Jesus ?). Dieu et la religion ont déjà été chanté des milliers de fois dans l’Histoire de la musique populaire ; la country, le gospel et la soul ont été nourris de l’influence de la religion. Et la version qu’en donne Dylan ne correspond pas à celle d’un Johnny Cash qui, dans ses chansons, fait ressortir sa foi au travers de ses expériences personnelles. La version de Dylan semble plutôt sortir d’une brochure de la Vineyard Fellowship. Pour l’implication et l’expérience personnelle, on repassera...

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et version 2.

Et alors que sur le précédent album, la musique réussissait à sauver les meubles, elle est ici monolithique, laborieuse et pompeuse. Est-ce parce que Knopfler et ses arrangements ne sont plus là pour ajouter un peu de relief aux compositions ? Est-ce parce que Dylan s’est contenté de composer ses mélodies à la va-vite, pressé de pouvoir y poser ses (saintes) paroles dessus ? Toujours est-il qu’à l’écoute de l’album, on a l’impression d’entendre Dylan tentant d’imiter un pasteur noir en plein sermon. Et ce qui marche pour un baryton haranguant la foule avec le soutien d’un choeur n’est pas forcément efficace pour un petit blanc avec une voix aussi particulière que celle de Dylan. Et il a beau prétendre que Tim Drummond (basse) et Jim Keltner (batterie) sont "la meilleure section rythmique que Dieu ait inventé", ça n’empêche pas l’album d’être raté. A sa sortie le 23 juin 1980 (moins d’un an après Slow Train Coming), il se fait copieusement éreinté par la critique et les ventes chutent. D’ailleurs, la pochette originale représentant la main de Dieu venant toucher les mains des fidèles sera refusée par le label craignant s’aliéner le public non chrétien.

Dylan arrête alors les concerts pour quelques mois et prend des vacances aux Caraïbes, c’est là qu’il écrira sa première chanson profane depuis longtemps, la bien-nommée Caribbean Wind. Et visiblement l’inspiration profane est au rendez-vous puisqu’il écrit également une chanson-hommage à l’humoriste trash Lenny Bruce. Il rentre donc en studio avec ses musiciens habituels, mais décide de laisser de côté ses tendances gospel et son trip Muscle Shoals et opte donc pour Los Angeles. Aidé de Chuck Plotkin, collaborateur de Bruce Springsteen, il veut se mettre un peu au goût du jour. Mais malgré ses bonnes intentions, il n’est visiblement pas prêt. Il tente d’enregistrer Caribbean Wind mais n’arrive pas à cerner la chanson, à en tirer tout le potentiel qu’elle récèle. Et bien vite se tourne vers les rengaines à la Property Of Jesus.

Résultat : Shot Of Love, globalement aussi mauvais que sa pochette criarde peut le laisser présumer, se fait descendre en flamme. Seule la chanson Every Grain Of Sand échappe au carnage. Bien que d’inspiration chrétienne, cette balade tranche radicalement avec les productions précédentes. Au lieu de vaticiner, il se pose en spectateur, regarde le monde, ses beautés et ses défauts et décrit ce qu’il voit avec une poésie qu’on ne lui connaissait plus depuis longtemps.

In the time of my confession, in the hour of my deepest need
When the pool of tears beneath my feet flood every newborn seed
There’s a dyin’ voice within me reaching out somewhere,
Toiling in the danger and in the morals of despair.

Il semblerait que pour la première fois, Dylan parvienne à faire preuve d’une foi sincère et à l’exprimer en une chanson. Encore que... On peut se demander si les images et expressions chrétiennes que contient la chanson ne sont pas un relicat de la période qui vient de s’écouler et que Every Grain Of Sand voit Dylan quitter Dieu pour revenir dans le Siècle. Cette dernière hypothèse est peut-être la plus probable tant Shot Of Love marque la fin de la période chrétienne. Dylan entre dans une nouvelle ère, mais celle qui commence ne sera hélas pas meilleure que la précédente.

Infidel (to himself)

D’un point de vue humain, d’abord... Le début des années 80 est terrible pour Dylan : Lennon se fait assassiner fin 1980, Mike Bloomfield fait une overdose quelques mois plus tard, presque en même temps que Howard Alk, ami intime et de longue date qui se suicide par overdose dans les studios Rundown, propriété de Dylan. Un autre musicien chrétien Keith Green est victime d’un accident d’avion. Et pour couronner le tout, lors d’un concert à Avignon, un spectateur meurt électrocuté en tombant d’un pylône électrique et une autre spectatrice décède dans la cohue qui suit. Marqué par tous ces évènements, on ne compte aucune actualité Dylan en 1982. Du moins d’un point de vue professionnel... Même s’il a laissé tomber le christianisme, il n’en traverse pas moins une crise mystique qui le voit cette fois-ci revenir vers le judaïsme. Bien que d’origine juive, Dylan n’avait jamais été un fervent pratiquant. Mais on se souvient qu’au début des années 70, il avait assumé sa judaïté, puis avait suivi les cours d’un professeur de peinture juif, cours qui l’avait amené à modifier sa façon d’écrire et à enregistrer Blood On The Tracks.

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À aucun moment, Dylan n’aura annoncé publiquement son abandon de la foi chrétienne et son retour au judaïsme, mais le titre de l’album suivant ne laisse aucun doute : Infidels. Et Dylan va même jusqu’à inclure dans les photos intérieures du disques, une image de lui en pleine méditation devant le Mur des Lamentations à Jérusalem. Que la photo ait été prise bien des années plutôt à l’occasion de la bar-mitsva de son fils ne change d’ailleurs rien au message qu’elle véhicule.

Cependant, si d’un point de vue spirituel, le message est clair, il l’est beaucoup moins musicalement parlant. En effet, pour cet album, Dylan manque cruellement de perspectives. Il sait seulement qu’il veut sortir totalement de ses influences gospel et se remettre au goût du jour. Pour cela, il cherche le soutien de ses amis stars. Il va ainsi demander à Frank Zappa, à Elvis Costello ou encore à David Bowie de produire son futur album. Il essuie un refus catégorique de chacun d’eux. Il se tourne alors vers un fidèle et s’adresse à Mark Knopfler. Ce dernier accepte et, bien qu’échaudé par les errements de la période chrétienne, semble convaincu par la volonté de Dylan de sonner moderne. Après tout, Dire Straits sera le premier groupe à enregistrer un album entièrement avec du matériel digital et que Knopfler est un vieil habitué des studios qui n’aime rien autant que les nouveaux sons et les nouvelles techniques d’enregistrement.

Il ne reste plus qu’à trouver le reste des musiciens. Et Dylan n’hésite pas pour cela à réunir un casting de stars. Outre Alan Clark, clavier de Dire Straits amené par Knopfler, il réunit l’ancien Rolling Stones Mick Taylor et la légendaire section rythmique jamaïcaine, Sly Dunbar et Robbie Shakespeare. En soi, l’intention est très louable, seulement nous sommes dans les années 80, et cet album inaugure véritablement la mauvaise décennie dylanienne. Autant le son des premiers disques chrétiens pouvait sembler régressif (cette recherche du Muscle Shoals Sound), autant le son de Infidels reprend la tentative de modernisation annoncée sur Shot Of Love et la pousse à son paroxysme. Alors bien sûr, à la sortie de l’album, les critiques ont sans doute raison de s’enthousiasmer de voir Dylan revenu à des chansons plus en accord avec son personnage. Mais avec presque 25 ans de recul, il est bien difficile d’apprécier Dylan chantant à côté d’une caisse claire mixée beaucoup trop en avant, de la guitare soporifique de Knopfler (ce dernier est malheureusement beaucoup plus audible que Mick Taylor) et de son propre harmonica dont le son, autrefois agressif mais chargé d’émotions, s’est considérablement édulcoré au point qu’il pourrait sortir d’un synthé, ça ne ferait pas une grosse différence.

Bien qu’il soit crédité au côté de Mark Knopfler en tant que producteur, il est clair qu’il n’a que peu participer au travail de production. D’ailleurs, Infidels est son premier album à être enregistré grâce à la technologie numérique. Et s’il se désintéresse de la production de l’album, il en est de même pour la promotion. Bien que l’album soit sorti en octobre 1983, Dylan n’apparaitra pas en public avant le 22 mars 1984 pour une prestation au talk-show Late Night with David Letterman assez catastrophique. Le groupe de musiciens post-punk qui l’accompagne rame tout au long des 3 morceaux (il n’a même pas répété avec eux), et au milieu de la 3e chanson, Jokerman, Dylan se rend compte que son harmonica n’est pas dans la bonne tonalité et quitte le plateau à la recherche de l’harmonica adéquat, laissant son "groupe" jouer le riff en boucle.

En outre, l’ère MTV a commencé et, alors qu’il avait annoncé que ses clips seraient à la limite de l’expérimental, ceux de Jokerman et Sweetheart Like You n’ont clairement rien de révolutionnaire et ne sortent pas vraiment du format d’une MTV encore jeune mais déjà influente. Mais qu’à cela ne tienne, on ne lui demande plus de sortir du rang, c’est tout juste si on espère qu’il n’entache pas trop son oeuvre avec des albums atroces ou des versions indignes de ses classiques. Aussi fait-on un peu la moue lorsque sort Real Live, un album live (comme son nom l’indique) enregistré lors de la tournée consécutive à Infidels au cours de l’été 1984. Mick Taylor est de retour, Ian McLagan (ex-Small Faces) a été recruté aux claviers. Curieusement, alors que le début des années 80 était marqué par son refus de jouer ses anciens morceaux, on retrouve sur ce disque une majorité des titres des années 60 (Masters Of War, Highway 61 Revisited, Girl From The North Country, etc...), un titre des années 70 (Tangled Up In Blue) et seulement deux titres de Infidels, histoire de rappeler rapidement que la tournée était sensé promouvoir l’album précédent. D’ailleurs, quoique les critiques aient pu dire sur un éventuel retour de Dylan avec Infidels, leurs théories ne tiennent absolumenent pas la route à l’écoute de ce live. Bien qu’elles aient connu des jours et des arrangements meilleurs, les vieilles chansons de Dylan tiennent infiniment mieux la route que ses nouvelles compositions.

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Burlesque ou ridicule ?

Au final, Real Live est un album correct, sans éclat ni intérêt (qui a envie d’écouter des chansons dont on a déjà de bien meilleures versions ?), mais la tournée a tout de même permis à Dylan d’avoir un groupe en permanence avec lui. Et ça tombe bien, il est en pleine phase créative, écrivant chanson sur chanson. Il en avait déjà rejeté pas mal au moment d’enregistrer Infidels et il commence à en avoir assez pour envisager l’enregistrement d’un album. Mais problème... Il n’a pas envie d’entrer en studio pendant des semaines entières. Il oublie donc l’idée d’avoir un groupe de studio fixe, voire même un studio précis où enregistrer. Les séances d’enregistrement vont donc se tenir successivement aux Intergalactic Studios le 24 juillet 1984, aux Delta Sound Studios le surlendemain, puis aux Ocean Way Studios, etc... La liste est trop longue pour être détaillée ici, mais ces quelques exemples sont révélateurs. Et pour ce qui est des musiciens, c’est la même chose. Il recrute ceux qui sont présent là où il se trouve. Ainsi, il enregistre avec Lone Justice, groupe de country-punk à qui il avait donné une chanson, avec Benmont Tench, Mike Campbell et Howie Epstein issus des Heartbreakers de Tom Petty, avec Roy Bittan et Steve Van Zandt du E-Street Band, ou encore avec Sly Dunbar et Robbie Shakespeare.

Tout ceci montre bien le total désintérêt de Dylan pour le travail de studio. D’ailleurs, même s’il sera crédité comme producteur de l’album, il laisse carte blanche aux ingénieurs du son, au grand étonnement de Ron Wood, présent le 26 juillet aux Delta Sound Studios : "[Les ingénieurs] disaient "Hey Bob, on a pas besoin de ça" et il répondait juste "Oh, okay". Alors ils mixaient la piste comme bon leur semblait et il restait là à les laisser faire. J’essayais de le lui dire. "Hé, tu peux pas laisser ses mecs... Regarde !! Ils ont viré les choeurs" ou "Et la batterie ?!" Mais apparemment il y avait quelque chose qu’il l’interdisait d’intervenir."

On peut évidemment supposé que ce qui l’empêchait d’intervenir, c’était cette envie de sonner moderne, de revenir au coeur des années 80. Etant un homme du passé (les sixties ressemblaient alors à la préhistoire), il peut sembler naturel que Dylan N’OSAIT PAS intervenir, se disant que les ingénieurs du son sauraient mieux que lui comment faire pour sortir un son qui ne paraîtrait pas surrané. Toujours dans cette lignée, il demande à Arthur Baker, producteur de Cindy Lauper et du Born In The USA springsteenien, de se charger du mixage final de l’album. Résultat, Empire Burlesque qui sort le 10 juin 1985, est un album correct pour ce qui est des chansons (enfin, à l’aune des autres albums eighties), mais atrocement daté pour ce qui est du son. S’il n’y avait la voix, on ne reconnaîtrait pas un album de Dylan et écouter When The Night Comes Falling From The Sky est une véritable torture. Synthés moches, son de batterie éprouvant, tous les pires défauts du son eighties sont là. Seule Dark Eyes est sauvée de la catastrophe. Interprété "à l’ancienne", avec simplement une guitare et un harmonica, elle n’a pas la puissance des chansons des sixties et il est évident que les ingénieurs du son n’avaient pas la moindre idée de comment enregistrer un musicien seul avec sa guitare et son harmonica, mais bon... vu les circonstances, on s’en contentera.

Malgré son enregistrement s’étalant entre juillet 1984 et mars 1985, Empire Burlesque n’a pas été la seule préoccupation de Dylan. Car l’ancien chantre de la contre-culture s’est mis à une nouvelle forme de chansons engagées : le tube caritatif. Les 28 et 29 janvier 1985, il apporte sa contribution au single We Are The World écrit par Michael Jackson et Lionel Richie dont les bénéfices devaient aider à lutter contre la famine en Ethiopie. Puis en octobrer, sort Sun City, chanson protestant contre l’Apartheid en Afrique du Sud.

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Toujours dans la même idée, il participe au Live Aid en juillet 1985. Il clôture cet immense concert caritatif, accompagné de Ron Wood et Keith Richards, mais leur performance est désastreuse. Des problèmes techniques les empêchent d’entendre leurs retours, les musiciens sont à moitié ivres et Dylan choquera l’audience en rappelant le cas des fermiers américains qui souffrent de la crise économique, idée certes iconoclaste sur le moment, mais qui inspirera la légende country Willie Nelson pour l’organisation du Farm Aid auquel participera Dylan (c’était son idée après tout) accompagné par Tom Petty et les Heartbreakers.

A côté de ce triste spectable, le grand évènement de l’année 1985 pour les dylanophiles, c’est surtout la sortie de Biograph, un coffret de 3 CDs couvrant la discographie de Dylan de son premier album en 1962 jusqu’à Shot Of Love en 1981. Et plus qu’un simple best-of, Biograph recèle, outre les habituels classiques, pas mal d’inédits renversants. Ca va du très ancien Mixed-Up Confusion (1961) au plus récent Caribbean Wind (1981). Les amateurs peuvent alors découvrir la chanson du retour au profane, en plus de version live, de démos et d’outtakes. On arrive à un total de 22 inédits sur 53 titres, une vraie mine d’or mais qui donne l’impression que Dylan a essayé de résumer son passé pour mieux s’en débarrasser, tirer un trait dessus et passer à autre chose.

Dans l’immédiat, cet "autre chose", c’est une énorme tournée avec Tom Petty & The Heartbreakers. Etonné par l’énergie que la présence du groupe lui apporte, Dylan décide de programmer une tournée entière avec eux. Baptisée True Confessions, elle marque le renouveau de Dylan en tant que performer, le poussant chaque fois à réinterpréter des classiques avec force et conviction. Jusqu’alors, ses vieilles chansons lui étaient devenues étrangères. Trop vieilles, trop engagées, écrites par un jeune homme de vingt ans son cadet, elles ne lui parlaient plus. Totalement spontanés, ces concerts sont parfois un peu chaotiques, mais Dylan, en cohérence totale avec ses vingt années à tourner avec des groupes divers et variés, tire parti de ce chaos et le transforme en énergie créatrice, exactement comme durant sa première tournée électrique.

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Affiche du film Hearts Of Fire

Hélas, malgré son mariage avec sa choriste et amante, Carolyn Dennis (le couple divorcera en 1990), Dylan va traverser, de septembre 1985 à août 1986, une crise artistique et identitaire sans précédent dans sa carrière. Epuisé par les efforts qu’il a fourni lors des mois précédents, il est totalement perdu et fait véritablement n’importe quoi. Il accepte de tourner dans Hearts Of Fire, un nanar sur une rock-star fatiguée dirigé par Richard ’Return Of The Jedi’ Marquand. Il enregistre même quelques chansons sans intérêt pour la BO. Le film sera vite retiré de l’affiche en Angleterre et ne sortira jamais aux USA. Dylan avouera plus tard l’avoir tourné uniquement "pour l’argent".

Les concerts avec Tom Petty étant sans doute ses meilleurs depuis longtemps, l’idée d’une tournée américaine (sa première depuis 5 ans) s’impose rapidement et c’est tout naturellement que son label lui indique qu’il est dommage de lancer une tournée de cette envergure sans avoir de "matériel" à promouvoir. Il rentre donc en studio en avril 1986 pour enregistrer Knocked Out Loaded. Avec trois reprises, trois chansons co-écrites et seulement deux nouvelles chansons solo (et encore, ces nouvelles chansons sont basées sur des instrumentaux datant des sessions de 1985), c’est un des pires albums de Dylan. Absolument pas concerné par l’album, qui n’est là que pour faire plaisir à son label, il expédie l’enregistrement en un mois et ne s’en préoccupe plus, seule Brownsville Girl s’en tire plus ou moins, même plombée par un son typiquement eighties.

Enfin, la tournée avec les Heartbreakers, si elle débute parfaitement, tombe vite dans la médiocrité. Dylan adopte ce qu’il appelle sa "voix à stades", il crie plus qu’il ne chante. Et la tournée de l’été 86 se termine dans l’ennui général, autant pour Dylan que pour les Heartbreakers. Mais le pire était encore à venir...

En effet, il commence en 1987 à constituer un nouvel album. Encore une fois, il ne contient que deux compositions originales de Dylan lui-même (et encore, Had A Dream About You, Baby provient de la BO de Hearts Of Fire). Ajoutez à cela deux chansons co-écrites avec le parolier du Grateful Dead, Robert Hunter et quelques reprises et vous obtenez son plus mauvais album à ce jour. Enregistré n’importe comment (on retrouve des musiciens du Grateful Dead, toujours Sly Dunbar et Robbie Shakespeare et même Steve Jones et Paul Simonon), les musiciens se rendent compte dès les premières sessions de la catastrophe. Lorsque Dave Alvin des Blasters arrive à une session d’enregistrement, on lui explique directement que Dylan est en train d’enregistrer Self Portrait vol. 2. Mais là où ce dernier, auto-sabordage d’un génie en pleine gloire, avait provoqué la polémique, Down In The Groove est un non-évènement total. Ignoré de tous, c’est un (très) mauvais album de plus pour Dylan.

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Dylan sur scène avec le Grateful Dead

En parallèle avec l’enregistrement de l’album, il part en tournée avec le Grateful Dead au cours de l’été 1987... Les concerts se jouent à guichets fermés, mais on peut se demander si la grande majorité du public n’est pas constitué de quadragénaires tardifs espérant revivre un peu de leur jeunesse et peu concernés par la qualité du show. Les set-lists alternent chansons du Zimm’ et du Dead, Dylan se permettant même de ressortir des chansons de la période chrétienne, mais ce sont toujours les vieux classiques, même semblables à de vieux squelettes en putréfaction sortis de leurs cercueils, qui sont le plus applaudis. La seule constante de cette tournée reste finalement le tempo : un rythme mollasson et sans aucune énergie, made in Grateful Dead.

Début 88, il est intrônisé au Rock’n’Roll Hall Of Fame par Bruce Springsteen qui prononcera alors la célèbre phrase "Bob a libéré nos cerveaux comme Elvis a libéré nos corps". Et même si Springsteen essaie ensuite de trouver des qualités la discographie 80 du Bob en question, il n’aurait certainement pas fait de même pour Down In The Groove qui sort en mai 1988. Et bien que l’album soit un énorme bide, Dylan rassemble un groupe de scène réduit au strict minimum guitare-basse-batterie et commence à tourner... tourner sans s’arrêter, programmant sans cesse de nouvelles dates jusqu’à ce que cette tournée prenne un nom définitif, bien que non-officiel, le Never Ending Tour.

Traveling to New Orleans

A ce moment-là, la côté de Dylan est clairement au plus bas, il n’a plus confiance en lui. Ni dans sa voix, ni dans ses vieilles chansons qui lui sont devenues étrangères, ni dans ses talents d’écriture. Ca fait tellement longtemps qu’il réutilise des outtakes datant d’Infidels, voire de Shot Of Love et c’est tout juste si les tournée avec Tom Petty ou le Grateful Dead l’ont distrait quelque temps.

Mais au début du mois de avril 88, il reçoit un appel de son ami George Harrison qui lui demande son studio pour enregistrer une chanson bonus pour la version européenne d’un single. Il est à Los Angeles avec Jeff Lynne qui est en train de produire un album pour Roy Orbison. Dylan accepte et Harrison passe donc chez Tom Petty avant de s’envoler pour la résidence de Bob en Floride. Réaction du leader des Heartbreakers : "Cool, je me demandais ce que j’allais faire demain !". Du coup, Jeff Lynne et Roy Orbison suivent aussi et voilà une troupe de super-stars réunies pour enregistrer une chanson écrite à la va-vite par Harrisson, Handle With Care. Sans roadies, sans techniciens, l’enregistrement se passe dans la bonne humeur et la décontraction générale, aucun problème d’égo ne vient parasiter la session. D’ailleurs, le "groupe" se rebaptise Traveling Wilburys, chacun prenant un pseudonyme. On aura ainsi Nelson Wilbury (George Harrison), Otis Wilbury (Jeff Lynne), Lefty Wilbury (Roy Orbison), Charlie T. Wilbury Jr. (Tom Petty) et Lucky Wilbury (Bob Dylan). Lorsque Harrisson revient chez Warner avec le résultat, les cadres de la maison de disques croient devenir fous. Le résultat est bien trop bon pour être relégué en face B d’un single et ils demandent tout naturellement à Harrisson si un album est envisageable.

Et malgré un emploi du temps chargé pour chacun (surtout Bob qui doit partir en tournée fin mai), les cinq musiciens acceptent. Et c’est un franc succès. Le manque de temps se révèle être un avantage majeur. Obligés d’aller vite, les musiciens se fient à leurs premiers instincts et ont rarement sonné aussi spontanés. Ils gardent ainsi l’esprit enthousiaste de la première session dans le garage de Dylan. Ce dernier fournit même deux compositions originales. Dirty World est un gentil pastiche de Prince et Tweeter And The Monkey Man semble lorgné du côté de Springsteen. Mais l’important est qu’il se soit remis à écrire.

D’autant que l’album Traveling Wilburys Vol. 1 qui sort en octobre 1988 devient rapidement rapidement album de platine et, dépassant toutes les espérances, il reste 40 semaines dans les charts américains. D’autant que les échos de la tournée qui avait poussé Dylan à écourter les sessions des Traveling Wilburys sont plutôt bons, le public semble aimer le son direct et franc de son combo restreint.

Et d’autant que ses nouvelles chansons sont bonnes, et il le sait. Ecrite un soir chez lui, venant de nulle part, Political World est de ces chansons qui sortent spontanément, toutes faites. Dylan la couche sur le papier, il n’a pas encore de mélodie. Doutant toujours de ses capacités, il ne sait même pas s’il veut l’enregistrer et pense même prendre sa retraite. Ses dernières tentatives pour retrouver l’inspiration se sont heurtées à un accident qui l’a vu finir avec un bras dans le plâtre. Mais malgré tout, rapidement, voici qu’une deuxième chanson pointe le bout de son nez. Nourrie des doutes et du manque d’inspiration, elle s’impose comme une évidence. Elle ira pourtant rejoindre le même tiroir que Political World.

Puis la mort du basketteur Pete Maravitch lui inspire Dignity. Pour cette chanson, Bob retrouve ses vieux mecanismes lyriques. Il traite ses personnages comme des stéréotypes : "La chanson était comme devant moi, je l’ai rattrapée, je voyais mes personnages et je leur ai distribué mes cartes. [...] Le Béret vert, la Sorcière, Marie la vierge, Celui qu’on a pris pour l’autre, Big Ben, l’Estropié et Peau Blanche. La liste pouvait s’allonger indéfiniment." Disease Of Conceit est, quant à elle, inspirée par l’évangéliste défroqué Jimmy Swaggart. Suivent What Was It You Wanted ?, diatribe contre ces fans qui essaient toujours de vous dire ce que vous devriez faire, et Every Thing Is Broken.

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Mais il faut attendre la visite de Bono, venu partager une soirée chez Dylan, pour que ce dernier envisage l’éventualité d’un nouvel album. A la lecture des nouvelles chansons, Bono se montre on ne peut plus enthousiaste et face à l’angoisse de Dylan de ne plus être capable de mener à bien l’enregistrement d’un disque, Bono lâche un nom : Daniel Lanois. Ce dernier a déjà travaillé avec U2 et est une "valeur sûre" de la production de la fin des années 80. Pour finir de convaincre Bob, il décroche le téléphone, compose un numéro et lui passe le producteur. Une petite conversation plus tard, un deal est conclu. Dylan passera à la Nouvelle-Orléans où Lanois est en train de produire un album pour les Neville Brothers. Il verra comment Lanois travaille et en fonction de ça, ils décideront d’enregistrer ensemble ou non.

Ils se retrouvent à l’automne 88 et il faut à peu près une heure à Lanois pour convaincre Dylan qu’il peut travailler avec lui. Ils attendent donc le printemps 89. Dylan s’installe dans une grande maison à la Nouvelle-Orléans pendant que Daniel Lanois investit un vieux manoir victorien avec un de ses fameux "studios mobiles" et recrute quelques musiciens du coin. Lui-même et son ingénieur du son sont également des musiciens accomplis, ce qui leur permet d’être là si le besoin s’en fait sentir. De plus, le cadre est propice à un enregistrement qui trancherait radicalement avec les productions des années 80. Dylan se souvient de la première répétition : "Faute d’avoir mes guitares, j’ai choisi une des antiques Telecaster de Lanois - sur un sol en ciment et sous un toit en tôle, ça fait un son méchant, quoiqu’un peu trop cassant. Mais j’aimais bien cette guitare, je l’ai gardée."

Au début, les sessions sont assez difficiles. Les capacités d’enregistrement de Dylan sont un peu rouillées, et Lanois est très exigeant, cherchant toujours l’arrangement parfait. Ils travaillent d’ailleurs plusieurs chansons sans grand résultat, les laissant tomber les unes après les autres... jusqu’au déclic. When Teardrops Fall est enregistrée en une prise à trois heures du matin avec le groupe cajun Rockin’ Dopsie and His Cajun Band. Lanois, pensant pouvoir faire mieux, organisera l’enregistrement d’une nouvelle version mais abandonnera face à la qualité de la première prise. Puis viennent What Good Am I ?, Ring Them Bells, Everything Is Broken. A chaque fois, Lanois se révèle déterminant. Lorsque Dylan se perd dans des problèmes d’arrangements, de refrains ou de vers, Lanois lui propose sans cesse des solutions. Pas forcément toutes judicieuses, mais elles ont le mérite de faire avancer les choses.

De fil en aiguille, Dylan se sent de plus en plus à l’aise et revient sur les premières chansons avortées, puis en écrit carrément de nouvelles au milieu du studio, aidé par Lanois. Man In The Long Black Coat est l’exemple même de cette collaboration. Les paroles de Dylan sont parfaites. S’inspirant vaguement de I Walk The Line, il retrouve la verve de ses meilleurs textes. Quant aux arrangement, c’est du pur Lanois, sobre mais très intense. Amateur d’atmosphères, ce dernier n’hésite pas à laisser sur la bande les bruits des grillons et des insectes installés dans l’antique demeure. Au milieu de ces ténèbres, la voix de Dylan semble sorti d’un bayou brumeux. Alors que Lanois lui demandait sans session s’il avait encore des chansons de la trempe de Blowin’ In The Wind ou Masters Of War, Man In The Long Black Coat est peut-être celle qui s’en rapproche le plus.

Entre temps, un album live relatant la tournée avec le Grateful Dead est sorti. Dylan & The Dead, composé uniquement de chansons de Dylan, ne provoque que peu d’enthousiasme, mais se vend honorablement, profitant de la réunion de deux noms mythiques des années 60.

Aussi lorsque Oh Mercy !, l’album enregistré avec Lanois sort le 18 septembre 1989, c’est l’affolement parmi les critiques. Alors qu’on attendait plus rien de lui, Dylan semble un Lazare revenu d’entre les morts, avec Daniel Lanois en Sauveur. "Son meilleur album depuis Blood On The Tracks", clame-t-on. Et effectivement Dylan et Lanois ont réellement produit un album de toute beauté. N’hésitant pas à laisser de côté des chansons dont ils n’étaient pas certains de l’aboutissement (par exemple, Dignity ou Series Of Dreams), ils ont su chacun mettre de côté leurs défauts. Lanois a abandonné le son éthéré qu’il avait créé pour U2 et a sorti de son chapeau des sonorités rugueuses et organiques. De son côté, Bob s’est impliqué véritablement dans le travail de studio, acceptant de travailler sans relâche sur une chanson.

Lors de leur première entrevue, Daniel Lanois avait sorti à Dylan qu’il ne courait pas après les tubes : "Miles Davis n’en a jamais fait un seul." Et a posteriori, on peut se dire qu’il résumait ainsi parfaitement Oh Mercy ! L’album ne se vendra que correctement (seulement la 30e position des charts américains), ceci étant sans doute dû au caractère sombre et introspectif de l’album, tranchant avec la bonne humeur pop des Traveling Wilburys qui sont toujours présent dans le Top 30 ou avec le côté démago du live Dylan & The Dead. Mais il se classe néanmoins parmi les meilleurs albums de Dylan et accumule les succès critiques.

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Too Young Forever ?

Ayant retrouver l’envie d’enregistrer, il commence à envisager, dès la fin de l’année 89, l’enregistrement d’un nouvel album avec les frères Was. Mais dans un premier temps, la scène l’appelle. Fidèle à son Never Ending Tour, il repart sur la route pour quelques mois, profitant ainsi de son retour en grâce auprès de la presse et de ses fans. Et au printemps, le voilà prêt à retourner en studio... deux fois.

Il va alors enregistrer deux albums quasiment en parallèle : un en solo et un avec les Traveling Wilburys. Malgré la mort de Lefty "Roy Orbison’ Wilbury, ces derniers ont décidé de remettre le couvert, changeant tout de même de pseudonymes pour marquer qu’ils ne sont plus les mêmes sans la voix de velours d’Orbison. C’est l’occasion de se faire plaisir ensemble une fois de plus.

Alors on peut se dire que l’enregistrement de Under The Red Sky a dû lui sembler bien long et ennuyeux. D’un côté, lui veut faire un disque qui tranche avec le côté sérieux et sombre de Oh Mercy !, et apporte des chansons qui se rapprochent plus de la comptine ou de la berceuse que de l’hymne rock ou de la complainte introspective. De l’autre, les frères Was envisagent clairement un album ambitieux et rameutent un casting de superstars ahurissant. Ainsi se croiseront dans le studio Elton John, David Crosby, Robben Ford, George Harrison, Al Kooper, Stevie Ray Vaughan et même Slash des Guns’n’Roses. Devant tout ce grand monde et l’organisation colossale que nécessite l’enregistrement, Bob semble se désintéresser de tout. Est-ce le contraste flagrante avec la décontraction des Traveling Wilburys ? Toujours est-il qu’il reste dans son coin, la tête couverte par une capuche. Et lorsqu’il ouvre la bouche, c’est pour demander à Slash si ce dernier peut jouer un solo à la Django Reinhardt.

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Traveling Wilburys Vol. 3
sans Roy Orbison...

Finalement les deux disques sortent à l’automne 90, à quelques semaines d’écart. Le Traveling Wilburys Vol. 3 se vend honorablement. Chacun des musiciens ayant fait un come-back réussi depuis le premier volet, les gens semblent moins en attente d’un tel super-groupe. Mais peu importe, nos quatre compères se sont bien amusés et c’était bien le seul but du projet... Par contre, Under The Red Sky se fait proprement éreinté. Alléché par la qualité de Oh Mercy !, le public pensait avoir retrouvé "son" Dylan, le songwriter de génie de Blowin’ In The Wind, Just Like A Woman ou Knockin’ On Heaven’s Door. Et au lieu d’essayer de ressortir des morceaux de la trempe de Political World ou Man In The Long Black Coat, sommets de son disque précédent, Bob leur propose un disque dédié à "Gabby Goo Goo", surnom de sa fille de quatre ans. On a donc des titres comme Wiggle Wiggle (traduisible par "Guili Guili"), Handy Daddy, 2 X 2 ou 10,000 Men. On espère que les chansons les plus enfantines de l’album auront au moins amusé la petite, à défaut de séduire le public.

Et Dylan de repartir sur la route. Pendant les 6 prochaines années, il ne publiera plus aucun matériau original... mais fera quand même partie de l’actualité rock. Puisque le 26 mars 1991, sort un coffret sobrement nommé The Bootleg Series Volumes 1–3 (Rare & Unreleased) 1961–1991. Trois CDs et une énorme claque dans la gueule de tout dylanophile qui se respecte. Biograph, sorti au milieu des années 80, était un best-of sympa agrémenté de quelques inédits. Mais pour cette première saison des Bootleg Series, Dylan a creusé les fonds de tiroirs vieux de plusieurs décennies et ne propose pas moins de 3 CDs remplis d’inédits. De l’outtake, du live, des prises alternatives de morceaux connus, une vrai mine d’or qui éclaire d’un jour totalement nouveau la discographie de Dylan. Et même les années 80, ces années honnies, semblent recéler des pépites. Soigneusement rejetée à l’époque de Infidels, Blind Willie McTell mérite pourtant de briller au panthéon de ses meilleurs titres. Cette complainte portée par un piano célébrant un vieux bluesman adulé par Dylan tranche totalement avec le reste de ses enregistrements de l’époque. Et on peut supposer que c’est la raison pour laquelle il l’avait écarté du disque. Trop proche du vieux Dylan et pas assez moderne pour la nouvelle image qu’il voulait se construire.

Et même When The Sky Comes Falling From The Sky efface l’atroce souvenir qu’on avait d’elle. La prise alternative débarassée des synthés immondes qui gangrénaient la version présente sur Empire Burlesque se révèle être une chanson dans le style d’un Bruce Springsteen & The E-Street Band tout à fait présentable. Bob y imite même les intonations et les éclats de voix sur certains vers qui sont devenus la marque de fabrique du Boss.

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Pour tous les dylanologues qui s’étaient posé la question fatidique "mais qu’est-ce qu’il fout, ce con ?" tout au long des années 80, The Bootleg Series Volumes 1–3 est une épiphanie. Finalement, Dylan n’a pas vraiment écrit de mauvaises chansons dans les 80s, il les a juste mal enregistrées, et très mal choisies, préférant laisser de côté ses titres les plus inspirés pour des rengaines à la limite du racolage. Mais soyons honnêtes. L’intérêt principal de ce coffret ne réside pas tellement dans cette relecture de la période que l’auteur de ces mots a de façon très perverse décidé de traiter, sachant pertinemment qu’elle était la plus faible de notre troubadour. Ce qui fait l’attrait de l’objet, ce sont ces titres qui semblent être exhumés d’un autre âge : Hard Times In New York Town, une chanson enregistré sur un petit magnétophone en 1961, Last Thought Of Woody Guthrie, un poème récité sur scène en 1963, une répétition en studio de Like A Rolling Stone.

Folk Alone

Ignorant toute l’agitation pour des enregistrements qui appartiennent, pour lui, à un lointain passé, Bob continue toujours à tourner sans relâche, et pour éviter de sombrer dans la routine, de jouer toujours les mêmes morceaux, il inclut à sa set-list de plus en plus de vieux standards folk, des chansons traditionnelles ou des vieux blues, aménageant de véritables parties acoustiques durant les shows pour offrir à ces chansons, qu’il connait et qu’il aime depuis ses débuts, un écrin qui leur soit digne.

Et lorsqu’il doit rentrer en studio en 1992, pour des raisons contractuelles, c’est tout naturellement qu’il se tourne vers ces reprises. Les sessions sont produits par son ami, le guitariste David Bromberg. On y trouve des versions de traditionals comme Lady From Baltimore, Polly Vaughan, Casey Jones ou Duncan And Brady. Dylan part alors en Europe pour 11 dates et laisse à Bromberg le soin de mixer les titres. Pour une raison qui reste toujours inconnue, ces titres ne seront jamais publiés. Au lieu de ça, de retour dans sa résidence de Malibu, Bob s’enferme dans son garage et enregistre seul une quinzaine de reprises. Séduit par l’aspect simple et direct des chansons, il décide alors de les sortir telles quelles, ce sera Good As I Been To You et un véritable succès. Après la déception Under The Red Sky, ce recueil de chansons sans aucune prétention publié le 3 novembre 1992 présente un charme certain, d’autant que Dylan y interprête un répertoire avec lequel il se sent visiblement à l’aise ; sa voix semble avoir été faite pour chanter ces titres. Public et critiques plébiscitent donc cette nouvelle incarnation, ou plutôt réincarnation, de Dylan qui songe très rapidement à donner un frère à son nouveau bébé.

Mais avant ça, il y a quelque chose à fêter. En effet, nous sommes en 1992. Cela fait 30 ans que Dylan sort des albums, écrit des chansons, multiplie les concerts dans le monde entier. Et pour célébrer l’évènement, on fait ça à la sauce américaine. On réunit un panthéon de stars plus ou moins vieilles, on les fait chanter quelques chansons du Maître, lui-même chante quelques-uns de ses morceaux et puis tous entonnent en choeur un tube ultra-connus pour montrer qu’ils sont tous contents. Pour Dylan, ça s’est passé le 16 octobre 1992 et parmi les invités, on comptait Lou Reed, Tracy Chapman, George Harrison, Stevie Wonder, Ron Wood, Eddie Vedder et Mike McCready de Pearl Jam, Chrissie Hynde, Willie Nelson et pour assurer les instruments derrière toutes ces stars, on a exhumé les survivants de Booker T. & The MGs. L’enregistrement de l’évènement sortira en août 1993 et comme on pouvait s’y attendre, le résultat est bon mais vu le casting, on aurait attendu plus de vie et d’entrain dans ce spectacle somme toute assez formaté. Il se murmure d’ailleurs que certains participants se seraient retrouvés dans un bar au sortir de la cérémonie pour jammer jusqu’à l’aube. Malheureusement, il est peu probable que nous n’entendions jamais quoique ce soit de cette nuit qui dut être mémorable.

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Quoiqu’il en soit, le successeur de Good As I Been To You sort rapidement. Enregistré dans les mêmes conditions, seul dans son garage en quelques jours de l’été 1993 -sans changer une seule fois de cordes de guitare, dit même la légende- World Gone Wrong a un son encore plus brut que son prédecesseur. On peut penser qu’il aurait été mixé à partir de cassettes audio comme le Nebraska de Bruce Springsteen, mais rien ne permet de confirmer ou d’infirmer cette idée. Ce qui n’empêche pas l’album de connaître un succès encore plus marquant que Good As I Been To You. Peut-être pas un succès public, mais l’accueil des critiques est très enthousiaste et l’album, sorti le 26 octobre 1993, reçoit même un Grammy Award récompensant le Meilleur album de folk traditionnel. De tonalité plus sombre que le précédent, il y gagne par là même en intensité, et le résultat est tel que Sony lui propose sans hésiter un nouveau contrat pour dix albums.

Loin de marquer une baisse d’inspiration, ces deux albums de folk acoustique sont en quelque sorte un premier aboutissement de la carrière de Dylan. Après être passé par tous sortes d’expériences personnelles, musicales, voire même religieuses, il revient à ses premières amours et signe en deux albums une des plus poignantes déclarations d’amour à un style musical qu’un artiste majeur ait jamais enregistré. La boucle est bouclée... Que peut-il faire maintenant ?

Fin de cycle

La réponse est : "pas grand chose, à vrai dire". Il continue d’enchaîner les concerts un peu partout dans le monde, son groupe de scène évoluant régulièrement au gré des départs et des arrivées de ses musiciens. En 1994, il sorte son troisième best-of, très originalement nommé Bob Dylan’s Greatest Hits Volume 3 qui ne comporte qu’un inédit, Dignity enregistrée lors des sessions de Oh Mercy !. En août 94, il joue à Woodstock 94, festival sensé commémorer les 25 ans du festival originel de Woodstock... festival auquel Dylan n’avait pas daigné participer. Puis, comme il faut bien vivre avec son temps, il accepte de participer à la très populaire émission MTV Unplugged.

Après tout, pour quelqu’un qui joue acoustique depuis plus de 30 ans, l’exercice n’est pas très difficile. Dans un premier temps très enthousiaste, il souhaite insérer dans son set des reprises de vieux morceaux folk. Mais les producteurs de l’émission le rappellent à l’ordre et lui demandent de se limiter à ses vieux tubes. Et Dylan accepte, il est loin le jeune homme en colère, quittant le plateau du Ed Sullivan Show parce qu’on lui avait demandé de ne pas chanter Talkin’ John Birch Paranoid Blues.

L’émission est enregistrée en deux sessions, les 17 et 18 novembre 1994. On a donc droit à une collection de titres assez convenus : Tombstone Blues, All Along The Watchtower, Knockin’ On Heaven’s Door ou encore The Times They Are A-Changin’. L’intérêt de demander à un artiste comme Dylan de revenir sur des titres qui ne lui appartiennent plus vraiment depuis longtemps se révèle alors très limité. Seule originalité, la présence de John Brown, un inédit anti-guerre de 1963, revèle la sauce. Et encore on se demande si ce n’est pas une idée des producteurs pour attirer le dylanophile compulsif.

On se consolera en se disant que l’émission et le disque qui en sera tiré auront peut-être permis à un jeune public de découvrir que la chanson Knockin’ On Heaven’s Door n’a pas été écrite par les Guns’n’Roses. D’ailleurs, les ventes de l’album, sorti le 2 mai 1995, sont les meilleures du Zimm’ depuis des années. Mais une fois de plus, il n’en a cure. Il continue à assurer sa centaine de concerts annuels et de nouvelles chansons ne sont pas vraiment à l’ordre du jour. Et encore moins un nouvel album...

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[1Sources :

LIVRES

  • Heylin C., Dylan, Behind The Shades, Summit Books, 1991
  • Dylan B., Chroniques (volume 1), Fayard, 2005
  • Shelton R., Bob Dylan : Sa Vie Et Sa Musique, Albin Michel, coll. « Rock & Folk » 1987
  • Vanot S., Bob Dylan, Librio, coll. : « Musique », 2001.

SITES WEB

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