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par Giom le 17 avril 2007
Tube incontournable des 60s, le morceau Mr Tambourine Man a beaucoup fait parler de lui. Par exemple dans ce film Dangerous Minds (1995) de John Smith avec Michelle Pfeiffer en prof de ZEP US de charme, les personnages analysent les paroles sous le filtre d’allusions à la drogue. Le monsieur au tambour ne serait autre qu’un dealer et l’injonction « play a song for me », ne serait qu’un appel à une substance illicite. Il est vrai qu’à l’époque, Dylan expérimentait beaucoup.
Mr Tambourine Man est donc une chanson de Bob Dylan. On sait en plus qu’elle fut composée lors d’un périple très kerouaquien entre New York et San Francisco en 1964, voyage très enfumé à ce qu’il parait. Pourtant, Dylan se défend de toute allusion à la drogue dans ce morceau. Il explique qu’il lui a été inspiré par son camarade de studio, le guitariste de Greenwich Village Bruce Langhorne à qui Tom Wilson, le producteur, avait demandé de jouer du tambour sur un enregistrement antérieur. Dylan avait été alors fasciné par la taille de l’instrument et avait gardé cette image en tête de Langhorne jouant de son immense tambour. Sauf que Langhorne n’en a jamais rien su et qu’il l’apprit un jour en lisant la pochette du coffret Biograph (1997) du maître. Comme quoi, lire les notes de pochettes de disques, ça sert toujours... [1]
La chanson a donc atterri sur l’album de Dylan Bringing It All Back Home de 1965. Ce fut la seule chanson écrite par Dylan qui fut numéro un des charts américains, mais ce ne fut pas sa version ! Car ce morceau allait changer le cours du rock sous la guitare 12 cordes des Byrds, les inventeurs californiens du folk-rock.
Les Byrds n’ont pas emprunté qu’un titre à Dylan, on peut ainsi citer You Ain’t Goin’ Nowhere, The Times They Are A-Changin’ ou encore It’s All Over Now Baby Blue mais Mr Tambourine Man fut le premier single de la bande à McGuinn et Crosby, sorti en avril 1965 mais enregistré avant la version de Dylan en janvier - grâce à l’écoute d’une démo antérieure, ce qui explique que certaines paroles du titre de Dylan ne se retrouvent pas sur la version des Byrds -, ce qui inventa véritablement un genre.
En effet, le folk-rock était né, il suffisait d’électrifier le titre en jouant sur le coté déjà extrêmement mélodique du titre, tirant même la composition vers l’univers de la pop. McGuinn ne s’y est d’ailleurs pas trompé, avouant qu’il avait voulu chanter ce morceau avec une voix « à mi-chemin entre la voix de Dylan et celle de Lennon ». La croisée des mondes donc, entreprise fondamentale qui allait lancer une véritable scène folk-rock à Los Angeles dont les représentants les plus connus, à part les Byrds, sont Buffalo Springfield ou Crosby, Stills And Nash. Mais le son des autres ne sera jamais véritablement comme celui des Byrds, en partie dû à cette fameuse 12 cordes Rickenbacker de McGuinn. Cette version de Mr Tambourine Man est si influente qu’elle participera même à faire virer ce cher Dylan vers l’électricité [2], c’est dire ! Ce dernier approuvait sûrement cette transformation électrique de son titre puisqu’on pu le voir cette même année sur scène rejoindre les Byrds, comme au Ciro’s de L.A. Les Byrds devinrent alors les Beatles américains et participèrent à rendre caduque la rivalité entre son british et son US. Dylan, lui, acquérit une stature internationale grâce aux vecteurs que représentèrent à la fois les Beatles en Europe et les Byrds sur la côte ouest américaine pour sa musique.
À noter que le folk-rock se définit par une section rythmique très présente pour justement évoluer par rapport à la relative sobriété acoustique du folk. Or les Byrds, en début de carrière, n’étaient pas à ce moment là de brillants instrumentistes et leur producteur, Terry Melcher, également producteur assistant à l’époque des Beach Boys, fit appel à des musiciens de studio pour l’enregistrement. Il s’agit du groupe de L.A. The Wrecking Crew (dont Leon Russell faisait alors partie) qui enregistrait au même moment le morceau des Beach Boys Don’t Worry Baby, ce qui peut expliquer les relatives similitudes rythmiques des deux titres. Sauf que détail important, on retrouve quand même Gene Clark, David Crosby et Jim McGuinn au chant et on reconnaît aisément le carillon si particulier de la 12-cordes de McGuinn.
Mais plus tard, les Byrds jouèrent bien sûr sans aide, rassurez vous, d’autant plus qu’ils s’estimaient sûrement aptes à interpréter ce titre eux-mêmes dès cette époque.
L’anecdote est croustillante quand on sait que plus tard justement ces mêmes Byrds publièrent le titre So You Want To Be A Rock’n’Roll Star (qu’on trouve sur Younger Than Yesterday) cherchant à se moquer du succès des Monkees, groupe qui n’écrivait pas ses morceaux ni ne jouait véritablement de leurs propres instruments. Qui a parlé du trompeur trompé ?
[1] Surtout quand on sait que ce même Langhorne joue de la guitare électrique sur Mr Tambourine Man.
[2] Lire à cette occasion l’article consacré au morceau Like A Rolling Stone
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